* Trois agences de notation concentrent près de 94% du chiffre d'affaires mondial de cette industrie. * Les revenus des agences proviennent essentiellement des émetteurs de dettes. Au lendemain de la crise financière internationale déclenchée en 2008, les agences de notation ont été sur la sellette. Et pour cause : des établissements financiers ont été notés comme ne présentant aucun risque, et ce à la veille de leur déclaration en faillite. Or, la notation financière sert justement à mesurer la probabilité de voir un émetteur de dette ne pas respecter ses obligations financières. Elle s'applique à la solvabilité de tout émetteur : entreprises, Etats et collectivités locales . A noter que la récente débâcle des subprimes n'est pas seule responsable de la remise en cause du système de notation : la crise asiatique de 1997-98, le scandale d'Enron en 2001 ont également relevé les insuffisances des agences. D'après un analyste du Centre Marocain de Conjoncture, plusieurs critiques peuvent être relevées à l'encontre des agences de notation. La première qui leur est adressée porte sur l'opacité de leurs méthodes de notation. La seconde a trait à la forte concentration du marché dominé par trois agences qui concentrent près de 94% du chiffre d'affaires mondial de l'industrie de la notation. Une troisième remarque, et qui n'est pas des moindres, démontre que leurs revenus proviennent essentiellement des émetteurs de dette. Ce qui, bien entendu, remet en cause leur objectivité dans la mesure où elles sont juge et partie. Une quatrième critique renvoie à l'incapacité chronique des agences à anticiper les dégradations brutales de solvabilité des entrepreneurs. C'est le cas d'ailleurs de la crise des subprimes où plusieurs entreprises qui allaient tomber en cessation de paiement étaient considérées comme tout à fait solvables. Autre remarque dénoncée par notre conjoncturiste, c'est l'action procyclique des agences. La tendance des agences à surréagir, une fois les crises confirmées, contribue en effet à aggraver celles-ci. Le problème est que c'est sur la base des notes attribuées que se décident parfois d'importantes mesures. A titre d'exemple : Bâle II lie le capital réglementaire nécessaire pour couvrir le risque de crédit au rating des agences. Elle revêt aussi une importance fondamentale en matière de titrisation. Aujourd'hui, et à l'aune des soubresauts qui ont marqué la conjoncture économique, quel sera le sort de ces agences ? A quel point peut-on avoir confiance en leurs notes, aussi bien bonnes que mauvaises ? Le rapport annuel Doing Business 2010 classe le Maroc 128ème parmi 183. Le problème n'est pas le classement en soi, mais surtout son objectivité et partant, les recommandations qui en découlent. Celles-ci ne peuvent avoir aucune valeur si la note d'origine est erronée. A noter que dès sa publication, ce rapport a fait couler beaucoup d'encre. L'unanimité est de mise sur le fait que le Doing business, qui note le pays selon le degré de facilité de faire des affaires, souffre de nombreuses limites sur le plan méthodologique, mais surtout conceptuel. « Son idée de base est que moins de réglementation est synonyme de progrès, ce qui est largement contestable comme l'a mis en évidence la crise », commente notre analyste. Les méthodes se multiplient au gré des agences, les critères se calculent à la fantaisie de techniciens pas toujours dotés d'objectivité nécessaire à ce genre d'exercice. Et donc le flou continue. La dernière notation attribuée au Maroc est celle attribuée par l'agence Standard & Poors le 23 mars dernier. Celle-ci a rehaussé la note du Maroc du crédit souverain de la dette à long terme en devises de BB+ à BBB- et de la dette en monnaie locale à long terme de BBB à BBB+ avec des perspectives stables. La Coface s'y associe afin de considérer que le Maroc a entrepris d'importantes réformes structurelles et suffisamment significatives pour garantir un climat serein à l'investissement dans le pays. On va même jusqu'à dire que cette notation favorable est le reflet de la résilience de l'économie marocaine devant la crise économique internationale. Sans vouloir verser dans le pessimisme, ces notes aussi bonnes soit-elles doivent être appréciées avec une grande attention. Les pouvoirs publics marocains peuvent s'assurer de la véracité de leur notation à travers les indicateurs économiques élaborés par des organismes tels que la Direction des études et prévisions financières, le Haut Commissariat au Plan... Ils peuvent également, via le benchmarking, positionner le Maroc dans le Maghreb, voire dans la zone méditerranéenne en vue d'identifier les réformes à mener. Et justement la question qui se pose est : quel sera l'avenir de ces agences qui, osons le dire, ont montré leurs limites ? Le sommet du G20 a esquissé les principales voies à suivre et qui se résument essentiellement dans la supervision des activités des agences et la transparence des méthodes d'évaluation et leur fiabilité «Encore, il est primordial de lever le conflit d'intérêt entre la mission du conseil et le rôle d'évaluateur exercé par une même agence sur un même titre». Juste par souci dobjectivité !