* Sur le plan économique, deux avancées importantes sont à mettre à lactif du Souverain : le statut avancé et laccord de libre-échange avec les USA. * Notre diplomatie est appelée à se mobiliser davantage afin que notre pays ne soit pas marginalisé dans les grandes manifestations à caractère économique. * Point de vue de Jawad Kerdoudi, président de lIMRI - Finances News Hebdo : La politique étrangère du Royaume est essentiellement axée sur deux grands volets : la question du Sahara et le développement économique du pays via la politique douverture. En tant que président de lInstitut Marocain des Relations Internationales, comment appréciez-vous lévolution de ces deux axes au cours de cette dernière décennie ? - Jawad Kerdoudi : Je tiens tout dabord à souligner que je réponds à vos questions à titre personnel. En effet, les deux questions que vous soulevez, la question du Sahara et le développement économique, sont les axes fondamentaux de la politique étrangère de notre pays. La question du Sahara est primordiale, car nos provinces sahariennes représentent le tiers de notre territoire national. Outre nos droits légitimes sur ce territoire, sur le plan géopolitique linstauration dun Etat indépendant sous influence algérienne, est inacceptable pour le Maroc. Cela nous couperait de notre arrière-pays qui est lAfrique sub-saharienne de lOuest. De plus, le Maroc a dépensé des milliards de dirhams depuis 1975 pour le développement économique et social de ces provinces. Durant ces dix dernières années, des avancées remarquables ont eu lieu sous limpulsion du Roi Mohammed VI. Cest ainsi que le Souverain a effectué plusieurs voyages en Afrique subsaharienne et en Amérique Latine. Il en a résulté que le nombre de pays qui reconnaissent la pseudo «RASD» est passé de 79 à 30 actuellement. Mais, le vrai trait de génie du Souverain a été le plan dAutonomie de la région du Sahara présenté par le Maroc à lONU en avril 2007. Ce plan qui accorde à la région du Sahara une large autonomie sous souveraineté marocaine a été jugé «crédible et sérieux» par lONU. Cest ainsi que le 21 avril 2008, Peter Van Walsum, envoyé personnel du Secrétaire général de lONU pour le Sahara, a déclaré : «Lindépendance du Sahara occidental nest pas un objectif réaliste». Ce plan est appuyé par la majorité des pays européens et par les Etats-Unis, et place le Maroc dans une position favorable pour les futures négociations avec le Polisario sous légide de lONU. Quant au volet économique, le Maroc a réalisé durant ces dix dernières années deux avancées également remarquables. Il sagit du «Statut avancé» conclu entre lUnion européenne et le Royaume en octobre 2008, et qui couronne, entre notre pays et lEurope, un large partenariat qui a débuté par lAccord commercial de 1969, suivi de lAccord de coopération de 1976 et lAccord dassociation de 2000. La seconde avancée est la signature du Traité de libre-échange avec les Etats-Unis, mis en vigueur le 1er janvier 2006, qui ouvre pour notre pays de larges perspectives aux échanges et investissements avec la première puissance économique du monde. A noter que le Maroc est le seul pays dAfrique du Nord à avoir obtenu le «Statut avancé» de lUnion européenne et un Accord de libre-échange avec les Etats-Unis. - F. N. H. : Quels sont les points de convergence et de divergence dans les approches de Feu Hassan II et de Mohammed VI sur la politique étrangère du Maroc ? - J. K. : Sur le fond, SM Mohammed VI poursuit les mêmes objectifs que son défunt père: la défense des intérêts supérieurs de la nation marocaine. Sur la forme, le style diffère. Il apparaît tout dabord que le Roi Mohammed VI accorde plus de priorité aux problèmes intérieurs du pays, par rapport à lextérieur. La politique étrangère de Mohammed VI est plus pragmatique, plus vigoureuse (rappel dambassadeurs marocains en cas de crise grave), avec un franc-parler (concernant par exemple le dernier Sommet Arabe de Doha) qui était inusité par le passé. - F. N. H. : Le conflit au Moyen-Orient sinscrit dans la durée. Est-ce quon peut affirmer que cest lune des raisons expliquant la lassitude du Maroc, auparavant acteur actif dans ce dossier ? - J. K. : Il est certain que Feu Hassan II a joué un rôle primordial dans le conflit au Moyen-Orient, en simpliquant personnellement et en organisant plusieurs Sommets arabes au Maroc. Les données ont changé actuellement : lAutorité palestinienne et Israël négocient directement. Le conflit arabo-israélien est si lourd que même les grandes puissances (Etats-Unis, Europe, Russie) narrivent pas à le résoudre. Doù effectivement un retrait relatif du Maroc vis-à-vis de ce conflit. - F. N. H. : A loccasion de grands sommets internationaux tels le G8 ou le G20, certains pays du Maghreb sont présents, et ce contrairement au Maroc ? Quen pensez-vous ? - J. K. : En effet, jai noté que pour les Sommets du G8 et du G20 certains pays étaient invités et pas le Maroc. Cest ainsi que le G8 qui sest réuni du 8 au 10 juillet 2009 à lAquila (Italie) a invité, entre autres, lAlgérie, lEgypte, la Libye, le Sénégal et lAfrique du Sud. Ces Sommets sont très importants car ils prennent des décisions à caractère mondial, et il serait utile que notre pays puisse y être représenté. Il est indispensable que notre diplomatie se mobilise pour que notre pays ne soit pas marginalisé dans ces grandes manifestations internationales à caractère économique.