A. A. : Cest qui ce Oudghiri ? O. B. : Un jeune brillant, il paraît. Il est en poste à BNP Paribas actuellement. En fait, ils veulent rajeunir le personnel de la boîte et initier une politique de croissance plus agressive. A. A. : Quitte à me sacrifier ? O. B. : Oui ! Ecoute, nous sommes dans un système où, quelles que soient tes compétences, quand ce nest pas toi qui détiens tous les pouvoirs, je dis bien tout, tu es sur un siège éjectable. Je veux dire que si tu nes pas ton propre patron, rien ne doit te surprendre. Tu sais, tu évolues dans une structure où ils te courtisent au début en te faisant miroiter des offres hyper alléchantes. Tu y crois tellement et tu es tellement motivé que tu te prends pour Superman, un homme indétrônable. Comme le dit un proverbe africain, «certains ont le pouvoir dencenser et de motiver un coq au point quil se prenne pour un bélier et commence à donner des coups de... tête». Tu as le pouvoir, tu te crois invincible, tu te fais beaucoup damis, mais également des ennemis; et puis, un jour, paf ! Les ennuis commencent. Tes pouvoirs de décision sont limités; tes performances sont critiquées On te pousse vers la sortie. Sans les honneurs, après plusieurs années de bons et loyaux services. Et tu découvres que ceux qui prétendaient être tes amis dhier sont devenus tes pires ennemis. Mieux, même si tu nes pas sous leur coupole, tu nes pas à labri de leurs représailles non plus. Tu te souviens quand je suis monté en force dans le capital de la SNI ? Cela doit te servir dexemple. Pourtant, nous sommes dans un marché libre où se négocient des valeurs mobilières et je nai fait quagir en tant que businessman. Il faut que tu comprennes que nous sommes dans un milieu de requins où ne se concilient guère business et amitié. Les intérêts personnels passent avant toute chose, soigneusement enveloppés dans lhypocrisie et la malhonnêteté. Il faut donc non seulement avoir la carapace solide, mais également des dents longues. Quand jai racheté la BMCE en 1995, jai tout entendu. Les gens ont remis en cause mes compétences, ils mont dénigré et beaucoup ont prédit et souhaité ma faillite. Jétais certes assureur, mais en affaire, il faut avoir du flair et savoir prendre des risques. Jai eu du flair, jai pris des risques, et jai surtout su mentourer dune très bonne équipe. Aujourdhui, tous ceux qui me regardaient de haut à mes débuts dans le domaine bancaire baissent les yeux quand ils me croisent. Jai réussi à bâtir un empire financier. Un empire dont la croissance fulgurante tend à gêner certains. Pour résumer, je suis la cause principale de ton départ. N. O. : Ecoute Alamy, de toute façon, les performances de la BCM sont là pour témoigner de ta compétence. Tu peux donc ten aller avec le sentiment du devoir accompli. A. A. : Je sais, mais ce qui me gêne, cest la manière. O. B. : Pour ça, il faudra ty faire. Cest eux qui décident de la manière, et tu nas guère le choix