Toute analyse critique de la politique de lemploi au Maroc reste tributaire du degré dinsertion du monde des entreprises dans la problématique de lemploi. Entre productivité, compétitivité et emploi, cest ce dernier thème qui paraît resurgir en tant que locomotive réelle de la croissance économique. Daprès ce point de vue qui commence déjà à senraciner, les ressources humaines ne devront plus être «subies» par les entreprises en tant que charges lourdes à gérer mais en tant quélément crucial dans nimporte quelle vision de croissance. Les économies modernes seraient-elles celles qui arrivent à tirer le degré de lemployabilité par la croissance, ou au contraire, celles qui comptent énormément sur leurs ressources et capital humain pour créer une nouvelle dynamique de croissance ? A cette question non encore tranchée par la doctrine économique, cest chaque pays, pris isolément, qui tentera dapporter la réponse adéquate suivant ses préoccupations, ses priorités et surtout ses moyens. Cest ainsi que pour Ahmed Benrida, directeur de lemploi au sein du ministère de lEmploi, «la voie de la restructuration et de la réforme est une alternative sérieuse face à la problématique de lemploi». Ceci est dautant plus remarquable que le volume annuel de la création des emplois au Maroc sélève à des besoins de 330.000 postes à créer. Alors que les potentialités de léconomie marocaine dans ses deux versants privé et public arrivent quand même à créer annuellement 220.000 emplois par an. Le déficit estimé à près de 80.000 emplois par an serait absorbé dans le seul cas où le produit intérieur brut marocain aurait atteint le stade de 5% à 6%. Cest pourquoi, pour Ahmed Benrida, «la problématique de lemploi ne devrait pas être seulement vue du seul niveau macroéconomique. Linadéquation qui persiste encore entre la formation et lemploi demeure aussi un problème important à résoudre». Il est vrai que lévaluation de la politique de lemploi est du genre «pluridimentionnel». Cest dans ce sens que lintervention de A. Ibrouk, professeur à luniversité Cadi Ayyad à Marrakech, a constaté que «lapplication de façon non hiérarchisée de la panoplie des mesures habituellement utilisées en matière de stimulation de lemploi peut parfois paraître insuffisante pour placer le pays sur un sentier de croissance soutenue et durable». Car la croissance et lemploi demeurent organiquement liés au point que les ressources suffisantes paraissent être la seule issue offerte pour notre pays pour réduire le chômage, surtout celui des jeunes diplômés. A ce titre, les chiffres présentés en marge de cette conférence par certains spécialistes font état dune aggravation sérieuse du taux de chômage, si la croissance tant attendue tarde encore à voir le jour. Ainsi, dici 2014, le Maroc compterait quelques 2 millions de chômeurs «qualifiés». Croissance vs ressources humaines Leur inévitable conversion vers des métiers du secteur tertiaire savère plus quune nécessité du moment que les secteurs public et privé, industriel et commercial, arrivent très loin, derrière le secteur des services, en matière de création demplois. Dun autre point de vue, la croissance mesurée par son contenu en emplois serait une idée «nouvelle» pour les responsables marocains. Le marché du travail na jamais été aussi directement lié à la grande problématique de la croissance et ce, malgré lexistence de lemploi au sommet des priorités au niveau du discours politique et social officiel. La modification du cadre légal du travail au Maroc, ainsi que son rattachement au niveau de la croissance démontre que la perte des emplois enregistrée dans le secteur textile, par exemple, est un schéma typique pour tous les autres secteurs. Il faut remarquer que limpact de louverture économique a toujours été estimé comme bénéfique pour la lutte contre le chômage, alors que cette ouverture est une sérieuse menace pour le tissu productif national. Cet exemple typique du textile démontre à bien des égards que le sort des entreprises nationales est plus que jamais lié aux postes demplois à créer dans le cours et le moyen terme. Même lapport financier national et européen pour créer les structures adéquates dune croissance durable pour léconomie marocaine paraissent ne plus pouvoir assurer ce rôle de relais que lon voulait leur attribuer. Cest dire que léconomie marocaine souffre encore des pratiques «anciennes» de gestion et de perception de la valeur ajoutée des compétences et des ressources humaines. Cest tout un autre débat, même si des interférences sont parfois dune influence directe sur la pénurie actuelle des postes de travail.