* Le marché de lemploi reste très opaque et il nexiste pas encore doutils de mesure de lefficacité des incitations à lemployabilité. * Bien quil nexiste pas de données pouvant fournir une appréciation de lauto-emploi comme moyen dinsertion dans la vie active, il nen reste pas moins un moyen intéressant à explorer. «Lemploi est une équation complexe», ce sont les termes de Mustapha Mansouri, ministre de lEmploi et de la Formation professionnelle, qui a présidé louverture officielle du séminaire interrégional organisé par lANAPEC et lAMPES, Association mondiale des services demplois publics, organisé les 17 et 18 mai courant à Ouarzazate. Mansouri a assuré que «Ce nest pas toujours facile, mais tous les moyens sont mis en uvre pour assurer laccès à lemploi». Ce séminaire tenu sous le thème «Approches et programmes pour linsertion des jeunes dans la vie active» a réuni des experts venus de 30 pays et organisations divers pour exposer leurs expériences et échanger leurs avis et remarques. Le Maroc a accueilli cette manifestation denvergure en sa qualité de vice-président de la région Maghreb et Moyen-Orient, assurée par Hafid Kamal, Directeur général de lANAPEC. Beaucoup de clivages mais également beaucoup de convergences, lemploi est érigé en priorité pour les jeunes de différents pays et est, de ce fait, au centre des politiques sociales. Deux principaux ateliers ont ponctué cette rencontre : lemploi salarié et lemploi indépendant où chaque pays a fait le bilan de sa politique publique en la matière. Emploi salarié, un manque dinformations Pour le Maroc, de premier abord, la stratégie gouvernementale intervient de deux manières distinctes pour résoudre cette complexe question de lemploi. Dabord de manière structurelle par le développement économique et ladéquation formation-emploi et, ensuite, par une politique proactive en appuyant lauto-emploi, en améliorant lemployabilité des demandeurs demploi et en dynamisant lintermédiation. En somme, la politique nationale demploi revient sur les mots-clés, notamment sur ceux repris dans dautres pays. Ce séminaire est de ce fait capital pour le Maroc et constitue une opportunité pour tirer des leçons des pays qui lont précédé en la matière. Le premier atelier sest penché sur lemploi salarié qui a fait ressortir trois préoccupations essentielles et communes aux différentes présentations. Il sagit notamment de la formation qualifiante, du contrat aidé et de laide à la création. Le premier constat est que la problématique est très diversifiée, puisque les expériences diffèrent. Sest posé également le problème de lopacité du marché et du manque dinformations sur les tendances du marché du travail. Ainsi les jeunes ne disposent pas dassez dinformations ni de temps sur le marché de lemploi et des opportunités de carrière pour pouvoir rectifier le tir et opter pour des études qui vont leur permettre dintégrer facilement le marché du travail. Citons à titre dexemple le service public demploi de la Suède qui sefforce de transmettre les connaissances du marché de l'emploi suffisamment tôt et de manière constante. Dans cet atelier, chaque pays a exposé les mesures dencouragement de lemployabilité et lauto-emploi, et des interrogations ont été soulevées concernant lapproche genre et linexistence de mesures defficacité de ce dispositif. Lexpérience de notre voisin, la Tunisie, fait ressortir des incitations fiscales importantes pour appuyer le recrutement, notamment par une prise en charge par lEtat de 50 % du salaire versé à la recrue au titre dencouragement au recrutement des diplômés de lenseignement supérieur pendant une année, dans la limite de 250 dinars tunisiens par mois. Mais selon un entrepreneur marocain présent lors de ce séminaire, cette mesure reste très tributaire de la bonne foi de lentrepreneur et peut faire verser dans la temporalité excessive de lemploi. Il explique néanmoins que dans le cas dun contrat bien déterminé entre le service public demploi et lentreprise, cette mesure est très incitative au recrutement, notamment dans les rangs des diplômés. Pour cet entrepreneur marocain, de toutes les expériences citées, celle de la dualité formation/emploi est la plus porteuse. «Par le biais dune convention signée avec lOFPPT, des jeunes suivent une formation de technicien par une formation ciblée assurée par lOFPPT, ces jeunes qui, durant leurs deux années détudes, font la moitié de leur cursus au sein de lentreprise, ce qui leur permet dacquérir une expérience. À la fin de leur cursus, ils sont tous recrutés par notre entreprise. Et grâce au turn-over, nous sommes en constante formation de nouveaux techniciens. Cette dualité formation/entreprise est une excellente chose», affirme-t-il. Cest une idée que le Burkina Faso a mise en application à travers «Top Vacances Emploi» conjointement entre lAgence Nationale pour lEmploi du Burkina Faso et lUniversité de Ouagadougou. Dun coût denviron trente cinq millions de francs CFA, le projet a initialement concerné 300 jeunes diplômés titulaires de la maîtrise, du DEA, du DESS ou du Doctorat issus de lUniversité de Ouagadougou depuis 2004. À lissue des trois mois, du 15 juillet au 15 octobre 2006, 304 jeunes diplômés ont bénéficié dune mise en position de stage, tandis que 249 personnes ont été formées en technique de recherche demploi. Parallèlement, 242 jeunes diplômés ont bénéficié dune formation entrepreneuriale. À lissue de cet atelier, une idée a émergé pour le Maroc et qui reste à réaliser, cest le prolongement de la bourse détudes pour une année supplémentaire pour les jeunes diplômés issus de zones éloignées. La culture entrepreneuriale nous fait défaut Cest Mustefa Boudiaf (voir entretien) qui a modéré latelier Emploi indépendant, une tâche pas très facile puisque de tous les pays participants au séminaire, aucun ne peut se targuer dune longue expérience en auto-emploi ; il y a donc un manque de données pour pouvoir mesurer limpact de ce moyen. «Il ny a pas assez dinformations pour donner une appréciation du travail indépendant comme moyen dinsertion dans la vie active», explique Mustefa Boudiaf. Lauto-emploi est néanmoins important à explorer, de lavis de tous, mais le chemin est long pour atteindre lobjectif qui lui est assigné. Autre problème soulevé par tous les exposants, celui du financement. Il sagit dun problème de relation avec les banques qui ne sont pas préparées à être les partenaires souhaités, vu les grandes attentes des créateurs demplois. Les banques ont dailleurs leurs raisons aussi, notamment le manque de dossiers consistants, labsence dune expertise sur le marché et puis parce que les banques nont pas développé de mécanismes pour la création dentreprises. Plusieurs réflexions ont été émises à lissue de cet atelier, notamment la formation et laccompagnement. Il faut donc diffuser la culture entrepreneuriale dans leurs cursus pour les préparer à être entrepreneurs. Le deuxième aspect, crucial de lavis de tous, est laccompagnement, notamment par la création dincubateurs et de pépinières dentreprises, mais aussi par le coaching et le parrainage. Les jeunes doivent également disposer de données sectorielles en développant un bon système dinformation.