Linvestissement du secteur hauturier est supérieur à 700 millions de dollars et les exportations avant la crise poulpière ont atteint 400 millions de dollars. Aujourdhui, toutes les sociétés sont déficitaires et nauront de visibilité pour sortir de la crise que si le plan de sauvetage mis sur pied par le gouvernement entre en application. «Ce nest pas à la ressource de sadapter à une implantation incontrôlée et illégale dunités de congélation, mais cest à ces dernières de sadapter aux possibilités de la ressource», répétait souvent Mohand Laenser, ministre de lAgriculture, du Développement rural et des Pêches maritimes. La pêche à outrance et anarchique des céphalopodes a engendré un épuisement accéléré de cette ressource. La décision des arrêts biologiques a engendré des crises en premier lieu avec lUnion européenne notamment lEspagne, puis avec les professionnels implantés dans les provinces du Sud. Le plan de sauvetage reste lunique issue pour assurer la pérennité des ressources. Par volonté Royale, le Maroc en 1975, après la Marche Verte et la récupération de nos provinces du Sud, a décidé de se doter dun code dinvestissements encourageant la création et le développement du secteur de la pêche hauturière, tant aux céphalopodes quaux crevettes, au moyen de chalutiers congélateurs. Le secteur inexistant à lépoque était exploité seulement par des chalutiers congélateurs étrangers. Lobjectif était de contrecarrer la présence des 1.700 bateaux de toute nationalité et de tout type, opérant sur nos côtes atlantiques et méditerranéennes et qui pêchaient au Maroc impunément, et ce depuis des décennies, arborant des pavillons aussi variés, allant du coréen, soviétique, chilien, japonais, au portugais ou espagnol. De plus, en 1982, la signature de la Convention internationale du droit de la mer, permit au Maroc détendre ses eaux territoriales à 200 miles de la côte; ce qui lamenait à devoir affirmer plus intensément sa présence en mer, sil voulait simposer et défendre ses frontières maritimes dans les divers forums internationaux et face aux puissances étrangères. Dès lors, le développement du secteur de la pêche hauturière a vu le jour rapidement. La flotte hauturière marocaine sest développée dans un environnement difficile et hostile, devant se ravitailler et débarquer ses prises à létranger jusquen 1990, et ayant dû faire ses armes et apprendre le métier sur le tas, avec les déboires dun débutant (erreurs, égarements et arnaques en tout genre) dus au manque dexpérience, de savoir-faire, de recul par rapport au temps, et le tout aboutissant fatalement à des faillites pour la plupart des pionniers du secteur. Lannée 1992, fut celle du rapatriement vers les ports marocains des derniers bateaux travaillant à létranger, du gel des investissements dans le secteur de la pêche et du début des arrêts biologiques. Gel non respecté pour les autres secteurs de la pêche. On voulait une pêcherie céphalopodière responsable, qui continuait jusquen 1999, à être exploitée avec encore 120 chalutiers congélateurs étrangers, en plus des 350 chalutiers marocains qui ne sont quau nombre de 290 aujourdhui. Soit 60 navires hauturiers en moins pour le pavillon marocain, et 120 chalutiers européens partis fin 1999, à la suite du non renouvellement de laccord de pêche avec lUnion européenne. La réduction de leffort de pêche hauturière, opérée bien avant la crise, et leffondrement de la ressource poulpière se traduisent par un total de 180 chalutiers hauturiers en moins sur les 470 existant à la fin de 1992. Soit une diminution de plus de 50% sur les 350 chalutiers hauturiers opérant dans la zone et qui navaient été construits que dans un but stratégique, socio-économique et national. Pour ce type de navires, aucune reconversion nest possible. La diminution de leffort de pêche, réclamée par lInstitut National de la Recherche Halieutique (INRH) depuis longtemps, ne visait et ne vise toujours que la flotte hauturière. Sous prétexte que le chalutage est destructeur. «Le maillage du filet utilisé par les chalutiers hauturiers est de 70 mm. Quid du chalut côtier, qui lui, nutilisait quun maillage de 30 mm et arrive à peine aujourdhui à 50 mm, alors que le Dahir Royal de 1973 impose un maillage de 70 mm pour tous les chalutiers ? De plus, en maintenant que la pêche avec le pot plastique était sélective, on ne peut que lui donner raison. Grâce aux millions de pots sélectifs en bord de mer, il ny a plus de poulpe ! Cest comme dire quil faut protéger le dauphin tout en autorisant un engin de pêche qui ne cible que le dauphin», a expliqué Rachid Benkirane, président de la Fédération Nationale de la Pêche Hauturière. La problématique de la pêche poulpière est une question de lobbies et darnaque. Il ny a quà chercher où sont passées les 140 licences de pêche hauturière que les détracteurs ont reçues et vendues. Trois ans après le départ de la flotte étrangère de nos eaux territoriales, les ressources se sont effondrées. Alors que 25 ans de pêche céphalopodière par des chalutiers hauturiers tant marocains quétrangers nont pas réussi à provoquer leffondrement de la ressource poulpière. Les lobbies sont aussi influents au niveau des instances dirigeantes du Royaume, que puissants financièrement. De fait, ils ont pu ruiner la région sans être inquiétés. De plus, ce petit lobby du sud, dit sahraoui, nest même pas concerné par la pêche, mais seulement par lapprovisionnement à terre, comme nimporte quelle unité de production nationale implantée sur le territoire marocain. Or, les flottes du nord du Royaume sont interdites de sapprovisionner en poulpes dans la ville de Dakhla. Chose pour le moins curieuse, pour un pays qui a opté pour une économie de marché. On se demande pourquoi ceux qui monnaient leur marocanité sont mieux lotis que leurs jeunes qui nont pas lindécence dexiger ou dacheter des passe-droits. Personne ne les a encouragés à créer des unités de congélation à Dakhla avec des capacités supérieures aux possibilités de renouvellement de la ressource poulpière.