* Le Maroc choisi pour abriter l'Observatoire des libertés de la presse arabe qui entamera ses travaux en mai prochain. * L'Observatoire doit publier chaque année un rapport sur la situation de la liberté de la presse dans le monde arabe. * Le Maroc saura-t-il être un terrain neutre et donner la liberté d'agir à cet organisme ? Le Maroc a été choisi pour abriter l'Observatoire des libertés de la presse arabe. Cette décision annoncée à la mi-février émane de l'Union des journalistes arabes (UJA) qui a opté pour le Maroc pour accueillir, à partir de mai prochain, le siège central et permanent de l'Observatoire baptisé OLPA. Comme l'indique un communiqué de l'UJA, la commission des libertés de l'UJA s'est réunie à Rabat pour prendre cette décision qui semble avoir été favorablement accueillie par le ministre de la Communication, Nabil Benabdellah. Même si le fonctionnement, la gestion et les plans d'action de l'Observatoire ont été examinés à Rabat, aucune information n'a encore été donnée concernant l'action de cet observatoire, les moyens et outils de travail, les prérogatives, et surtout, quelle est la valeur et la force obligatoire du rapport annuel que devra publier l'OPLA. Le bureau assure dans un communiqué qu'il agira dans la "transparence, la neutralité et le professionnalisme». Ce nouvel observatoire doit publier chaque année un rapport sur la situation de la liberté de la presse dans le monde arabe, le premier étant attendu en 2006. Mais l'information n'a pas eu grand écho auprès de la profession, puisque cette décision vient après un long feuilleton de procès contre nombre de publications marocaines. Elle ne semble pas enthousiasmer outre mesure la profession au Maroc. L'information est presque passée inaperçue si ce n'est de rares dépêches publiées ici et là. Le Maroc, terrain neutre ? Le choix du Maroc comme pays d'accueil de cet observatoire est en quelque sorte une distinction par rapport à d'autres pays arabes où la presse ne jouit pas réellement d'une véritable liberté d'expression. « Comparé à d'autres pays arabes, le Maroc donne l'impression de donner une large liberté d'expression à la presse. Mais à y voir de plus près, c'est assez nuancé, puisque la presse libre et indépendante paye très cher cette liberté. Mais il faut dire aussi que comparé à l'Algérie, la Tunisie ou la Libye, y a pas photo », souligne Boubker Jamaï, directeur du Journal Hebdomadaire. « Et puis, il y a d'autres pays qui connaissent une réelle dynamique de la presse, comme l'Egypte où le secteur de la presse, surtout hebdomadaire, est assez libre et où les capitaux sont détenus des fois par les journalistes eux-mêmes. Le Liban aussi a une presse libre dans une certaine mesure », conclut-il. Et puis, le Maroc saura-t-il être un terrain neutre pour cet observatoire face au poids important qu'accorde le Maroc à ses relations avec ses voisins? Rien qu'à voir le cas du Qatar qui, à chaque fois, se voit blâmé pour les informations relayées par la chaîne Al Jazeera. Qu'en sera-il du Maroc dont les deux pays voisins connaissent une réelle dégradation de la liberté de la presse, notamment l'Algérie et la Tunisie. Surtout avec l'Algérie avec qui le Maroc entretient des relations mitigées. D'autant plus que la liberté de la presse en Algérie, qui est une nouvelle fois menacée après la condamnation du journaliste Hakim Laâlam à six mois de prison ferme pour outrage au président de la République, se dégrade à vue d'il. En Tunisie, la situation n'est guère meilleure : OLPEC alerte l'opinion publique sur la multiplication des actes de censure qui frappent la presse tunisienne et étrangère en Tunisie. Le 7 février dernier, les autorités ont interdit la diffusion du numéro 257 du magazine « Al Maraa Al Youm », édité à Dubaï. Il semblerait qu'un article de l'éditorialiste de cet hebdomadaire, E. Mihoubi, évoquant la maladie du président tunisien Ben Ali, soit à l'origine de cette censure. Mais pourquoi chercher plus loin que le bout de son nez, il n'y a qu'à se pencher sur le cas du Maroc lui-même. Des poursuites judiciaires ont été entamées à l'encontre de trois hebdomadaires marocains dont certains se sont vus condamnés, pour le même motif, à des indemnités différentes. Le Maroc peut-il prétendre offrir à la liberté de la presse arabe ce qu'il n'offre pas à sa propre presse ? En attendant la parution du premier rapport de ce nouvel observatoire attendu en 2006 sur la liberté de la presse dans le monde arabe, les pronostics vont bon train : l'Observatoire sera-t-il courageux dans ses conclusions, notamment vis-à-vis du Maroc ?