Paru aux éditions Tarik, «Les incendiaires» de Souad Guenoun, ce recueil est une série de photographies de toute une génération de jeunes marocains condamnés à vivre dans des circonstances misérables. Composé dune soixantaine de photos, ce recueil dillustrations reste parmi les documents les plus intéressants qui ont essayé de mémoriser lhistoire fragmentée des «haragas» et «chamkaras» du Maroc. Dis, Tanger, quas tu fais de tes progénitures ? Jetés dans les rues nauséabondes, violentés, affamés, en guenilles, ils errent, hagards, sniffent, épuisés, résignés, soumis et quand ils ont encore quelque révolte, attendent de sébouillanter ». Ce recueil photographique de Souad Guenoun ne traite certainement pas dun thème nouveau, mais son optique est novatrice. Avec des prises de vue nocturnes, à limproviste ou même préparées, cette photographe se transforme en fait en une historienne du quotidien de toute une jeune génération quelle a préféré appeler «incendiaires» comme une traduction des «haragas-chamkaras» et de limaginaire quils évoquent. Dans lintroduction de louvrage, faite par lintellectuelle Zakia Daoud, on peut lire : «certes, il y a des associations qui tentent de soccuper des enfants des rues, de les insérer, de les alphabétiser. Certes, il y a quelques rares institutions pour tout dire rien. Sinon des projets, comme celui dun plan (encore un) dintégration des enfants abandonnés, perdus dans les méandres des négligences et des égoïsmes comme la convention onusienne des droits de lenfant ratifiée par le Maroc en juin 1993. Sinon aussi des mots creux, des principes éthérés, de la pitié gluante et de la bonne volonté inefficace ».