* Plus de souplesse pour les entreprises exportatrices et importatrices. * 5 ans de couverture de change. * Ouverture partielle des investissements à l'étranger pour les entreprises, compagnies d'assurances et OPCVM. Cela fait plusieurs mois déjà que les opérateurs du marché financier se faisaient écho d'une certaine libéralisation de la réglementation des changes. La nouvelle ne s'est pas beaucoup faite attendre et la libéralisation, bien que relativement partielle, est aujourd'hui une réalité, qui entrera en vigueur dès le début du mois prochain (août 2007). Certains ont qualifié ce pas de «mini big-bang» au vu et au su des implications qu'il aurait sur l'économie marocaine. D'autres trouvent l'innovation salutaire, mais reconnaissent tout de même les risques qu'elle engendre. En somme, la réforme porte sur huit nouvelles mesures. Les trois premières concernent le commerce extérieur. Il s'agit d'abord du relèvement de la part des recettes d'exportation qui peuvent être conservées dans les comptes en devises ou en dirhams convertibles de 20% à 50%. Une sorte de volant de devises, plus important, permettant aux entreprises exportatrices de faire face, avec plus de souplesse, à leurs achats à l'étranger et, partant, réduire les coûts de transactions et gérer plus efficacement leur trésorerie en devises. Deuxième mesure : la libéralisation des crédits acheteurs pour les exportateurs. Désormais, les entreprises marocaines peuvent accorder à leurs clients étrangers une échéance de paiement allant jusqu'à huit ans (dans le cas de biens d'équipements) pour 85% au maximum de la valeur de leur contrat. Aujourd'hui, ce délai n'est que de 150 jours ! Cette mesure vient ainsi mettre fin au rapatriement automatique de la valeur des biens ou des services exportés et permettra, par ricochet, aux entreprises marocaines de mieux se positionner sur les circuits de distribution internationaux qui exigent une certaine souplesse en matière de paiement. La dernière mesure de cette catégorie est destinée, quant à elle, aux importateurs. Ils pourront, désormais, régler par anticipation jusqu'à 40% de la valeur des biens importés et 20% de celle des services achetés à l'étranger. Ils n'étaient autorisés à le faire qu'à hauteur de 20.000 DH. L'élargissement des instruments de couverture contre les risques de change est également prévu par ces nouvelles mesures. Limitée initialement à 90 jours pour les contrats relatifs à des transactions commerciales et à douze mois pour la couverture des prêts et emprunts extérieurs, la duration des couvertures passe, désormais, à 5 ans. C'est même supérieur aux prévisions des opérateurs concernés qui tablaient sur 3 ans. Cette mesure permettra aux opérateurs nationaux de mieux se prémunir contre les risques de change. Pour l'appuyer, les banques, via leurs salles des marchés, pourront, désormais, placer leurs devises à l'étranger sur une durée de 5 ans. Cela leur permettra d'offrir à leur clientèle des instruments de couverture adaptés à la nouvelle réglementation. Les trois dernières mesures concernent l'investissement à l'étranger. Aujourd'hui, les opérateurs souhaitant réaliser un investissement à l'étranger doivent présenter une demande d'autorisation au ministère des Finances et à l'Office des changes. Ceci va changer. Les entreprises auront la possibilité, dès le début du mois prochain, d'investir à l'étranger jusqu'à 30 millions de DH par an sans aucune autorisation préalable. Encore faut-il qu'elles disposent de comptes certifiés et qu'elles aient au minimum trois années d'existence. Il faudra aussi que lesdits investissements soient en relation avec des secteurs liés à l'activité de l'entreprise, histoire de couper l'herbe sous les pieds des spéculateurs. Cette mesure, dit-on, est destinée principalement aux PME qui veulent investir de nouveaux marchés, notamment au Maghreb et en Afrique subsaharienne. Aussi, il a été procédé à la suppression de l'autorisation préalable pour le placement par les compagnies d'assurances de 5% de leur actif à l'étranger. Néanmoins, cette mesure ne concerne que les compagnies d'assurances saines sur le plan financier, couvrant leurs engagements et respectant les règles prudentielles. Sinon, s'abstenir ! Les placements peuvent être effectués sous forme de dépôts, titres de créances et actions cotés. Cerise sur le gâteau, la dernière mesure permet aux OPCVM d'investir jusqu'à 10% de leur portefeuille à l'étranger, quelle que soit la nature de l'actif sur lequel ils interviennent (actions, titres de créances, parts d'Opcvm...) ; chose qui leur permettra de profiter des opportunités alléchantes qui s'offrent sur les marchés internationaux. Ça leur permettra ainsi de diversifier le «risque Maroc» en intégrant dans leur portefeuille des classes d'actifs issues d'autres marchés financiers en totale décorrélation par rapport au marché marocain. «Ca va donner un nouveau souffle à tous les gérants de portefeuilles. Cette mesure nous permettra d'élargir notre univers d'investissement et d'améliorer, ce faisant, notre couple rendement/risque», avait indiqué Saâd Moualil, de Wafa Gestion, lors d'un work shop organisé par Attijariwafa bank en faveur de sa clientèle lundi dernier, et qui a porté justement sur ces mêmes nouvelles mesures d'assouplissement de la réglementation des changes. Par ailleurs, les professionnels de la gestion collective attendent incessamment une circulaire du CDVM à même de fixer les modalités pratiques d'application de ladite mesure. «C'est une mesure pas encore précise, et nous attendons une circulaire du CDVM pour savoir comment cela va être appliqué», ajoute Saâd Moualil. Ces huit nouvelles mesures inaugurent ainsi la première étape vers un régime de change plus flexible. Mais sommes-nous, toutefois, prêts pour cela ? Quelles conséquences auront ces différentes mesures ? Fathallah Oualalou, dans son discours prononcé à l'occasion de l'annonce de la nouvelle, reconnaît que «cette ouverture du compte capital n'est pas sans risque en raison de la plus grande volatilité qu'elle peut engendrer au niveau de l'économie». «Mais ce risque, poursuit-il, reste néanmoins maîtrisé au vu de la situation confortable de nos comptes extérieurs, de la stabilité du cadre macroéconomique, de la diversification des sources de croissance et des perspectives de l'évolution de la situation macroéconomique à moyen terme». À bon entendeur !