Une option qui vient compléter la réglementation marocaine des prix de transfert, mais qui demeure facultative. Les opérateurs plaident pour que le dispositif soit opérationnel dans les plus brefs délais. Au Maroc, à l'instar d'autres pays, la fixation des prix de transfert fait souvent l'objet d'un désaccord en matière d'interprétation de textes fiscaux avec la Direction des impôts. Les redressements s'avèrent parfois trop lourds pour être acceptés facilement par la multinationale, objet de rectification. Pour rappel, les prix de transfert sont définis généralement comme les prix associés aux transferts de biens, de services ou d'incorporels entre sociétés d'un même groupe, situées dans des pays différents. Ces prix peuvent être un moyen d'affecter à telle ou telle entité du groupe une part plus ou moins grande du résultat fiscal et, par conséquent, de soumettre ces résultats à des taux d'imposition différents. Dans le cadre des procédures de vérification de comptabilité, ces prix sont souvent remis en cause par l'administration fiscale. Interpellé sur les enjeux de cette pratique dans un pays en quête de développement comme le nôtre, Mohamed Hdid, expert-comptable DPLE et commissaire aux comptes, répond : «Je ne pense pas que le redressement fiscal découlant des prix de transfert est systématique au Maroc plus que dans d'autres pays. L'appréciation des prix de transfert entre les entités locales et celles non résidentes est le souci de toutes les administrations fiscales modernes. Cette appréciation vise à lutter contre l'exportation des bases imposables et, partant, des recettes fiscales». Plus précisément, en fixant le prix de leurs transactions internes, les groupes opèrent des choix motivés par des considérations organisationnelles et d'efficacité, mais qui affectent de façon directe et immédiate l'assiette taxable des Etats. Les risques de désaccord entre les entreprises et les administrations sont importants. Ces dernières considèrent souvent que les valorisations ne reflètent pas toujours le prix du marché. «La particularité pour le Maroc est l'appréciation des prix de transfert entre entités marocaines qui se traduit dans certains cas par une double imposition», alerte M. Hdid. Un avis partagé par Asma Charki, TAX partner, qui explique pourquoi cette appréciation n'est pas du goût des entreprises (voir entretien p.29) Quel impact sur les IDE ? Et c'est là où le bât blesse. D'aucuns poussent le bouchon plus loin et considèrent que cette disposition n'est pas exempte d'incidences sur l'investissement étranger direct. Un constat que ne partage pas notre interlocuteur. Il précise : «La disposition a pour objet de sécuriser la base imposable au Maroc et ne peut être critiquée en tant que tel. C'est dans ce sens que la procédure des accords préalables (APP) a été introduite depuis deux ans. L'APP peut être définie comme un accord conclu entre le contribuable et l'autorité fiscale, permettant à une entreprise multinationale, par la détermination concertée d'une méthode de prix de transfert, de s'assurer que les prix pratiqués dans ses relations industrielles, commerciales et financières intragroupe sont conformes au principe de pleine concurrence. Un tel accord permet de sécuriser toutes les parties prenantes et de travailler dans la sérénité et la confiance mutuelle, ce qui constitue indiscutablement un atout pour les investisseurs étrangers». Toujours est-il que cet accord préalable, dont les textes ont été introduits dans la Loi de Finances 2015, est toujours bloqué au niveau du SGG. Ses décrets d'application n'ont pas encore vu le jour. Il est important que ce dispositif des accords préalables soit opérationnel dans les plus brefs délais. Il est aussi impératif que son application soit pratique et la plus simple possible. Sous d'autres cieux, la conclusion de l'accord reste contraignante et lourde en termes de documents à fournir. «Pour éviter ces lourdeurs, son application à des sujets moins complexes, tels que les accords sur le niveau des facturations des services, celui des marges en mode cost, par exemple, devra être privilégiée», annonce M. Hdid. Aussi, il faut que cet accord préalable, une fois en application, ne prenne pas beaucoup de temps au risque de dissuader les opérateurs étrangers désireux d'investir au Maroc. Par Soubha Es-siari Cadre légal et règlementaire L'article 213 II du CGI prévoit que lorsqu'une entreprise a directement ou indirectement des liens de dépendance avec des entreprises situées au Maroc ou hors du Maroc, les bénéfices indirectement transférés, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont rapportés au résultat fiscal et/ou au chiffre d'affaires déclarés. L'article 214 III du CGI dispose quant à lui que l'Administration peut demander à l'entreprise imposable au Maroc communication des informations et documents relatifs : - à la nature des relations liant l'entreprise imposable au Maroc à celle située hors du Maroc; - à la nature des services rendus ou des produits commercialisés; - à la méthode de détermination des prix des opérations réalisées entre lesdites entreprises et les éléments qui la justifient; - aux régimes et aux taux d'imposition des entreprises situées hors du Maroc.