Le rapport annuel du Conseil déontologique des valeurs mobilières, rebaptisé récemment Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC), est très attendu de la communauté des journalistes. Non pas qu'elle s'intéresse à la quarantaine de pages qu'il contient, mais plutôt à une rubrique spécifique : celle relative au contrôle de l'information, et plus précisément aux sanctions infligées par... l'autorité qui veille sur notre épargne aux sociétés qui n'ont pas (volontairement ou involontairement) respecté les règles en vigueur. Il ressort ainsi du rapport annuel 2015 qu'en matière de délais, les émetteurs sont de très bons élèves : aucun dépassement n'a été constaté dans les publications financières. Par contre, question exhaustivité des états publiés, il y a à dire, d'autant que 8 sociétés faisant appel public à l'épargne ont été rappelées à l'ordre, avant de régulariser leur situation. Le point le plus intéressant, à nos yeux bien sûr, reste le contrôle de l'information importante. Sur ce registre, les contrôles effectués par le gendarme du marché sur les états financiers en 2015 ont permis de détecter divers manquements relatifs à l'obligation d'information importante. «Il s'agit de six sociétés cotées qui ont enregistré de fortes baisses de leurs résultats au titre de l'exercice 2014 sans alerter le public au moment opportun et de cinq autres qui l'ont fait tardivement», souligne le CDVM. Et ces onze sociétés cotées ont toutes curieusement «bafoué» la même règle : celle du profit warning. Pourtant, là-dessus, le gendarme du marché est clair pour qui sait lire, d'autant que les émetteurs ont «l'obligation de procéder à la publication, sans délai et au moment où ils ont pris connaissance de l'information, d'un avertissement sur les résultats en cas de rupture par rapport à l'historique des réalisations ou d'écart significatif par rapport aux prévisions annoncées». Faute de quoi, ils seront sanctionnés. D'ailleurs, ces onze sociétés (IB Maroc, Med Paper, SNEP, Sothema, Stokvis, Unimer, BMCI, Involys, Jet Contractors, SRM et Fénie Brossette) ont fait l'objet de sanctions disciplinaires et pécuniaires. Pour retard de publication d'une information importante afférente au résultat de l'exercice 2014, Involys aura été la plus touchée : mise en garde et sanction pécuniaire de 167.000 DH. Pour autant, il a lieu de se poser certaines questions. Sur quelles bases les sanctions pécuniaires sont-elles arrêtées, surtout que pour une même «faute», elles diffèrent d'un émetteur à un autre ? Surtout, ces sanctions sont-elles à la hauteur des préjudices subis par le marché ? Parce qu'au final, si certaines entreprises préfèrent se faire sanctionner et ne pas gagner en crédibilité ce qu'elles auraient perdu en capitalisation si elles avaient publié ces informations importantes au moment où il a fallu, c'est qu'il y a bien une raison.