Le monde a vécu un changement de paradigme juste après la crise de 2008. Il faut réinventer un nouveau modèle en se basant sur les nouvelles technologies. Avec la stratégie Maroc Digital, le Royaume se prépare tant bien que mal aux changements induits par la digitalisation de la sphère économique et financière. Les travaux du 2ème Meeting sur l'information financière au Maroc, tenus jeudi 8 septembre 2016 sous le thème «Dématérialisation & Marché financier», ont tenu toutes leurs promesses. En effet, plus de 200 participants, très intéressés par les enjeux de la digitalisation, ont pris part à cette manifestation organisée par Maroclear, la Bourse de Casablanca et Finances News Hebdo. Dans une salle archi comble et devant un auditoire attentif, c'est le ministre de l'Economie et des Finances, Mohamed Boussaid, qui a planté le décor, rappelant tout d'abord, dans son discours inaugural, les différentes étapes par lesquelles est passé le marché financier dans son processus de dématérialisation avec, entre autres, la création du dépositaire central Maroclear et la sécurisation du système de règlement-livraison des titres. L'argentier du Royaume a par la suite souligné la nécessité d'appréhender la dématérialisation sous un angle plus global. «L'économie mondiale est en train de se transformer et l'apport des nouvelles technologies a fait que beaucoup de secteurs sont en train de muter complètement, voire parfois de disparaître», indique-t-il. D'ailleurs, au cours de ces dernières années, certains pays comme l'Espagne ont vu disparaître 40% de leurs agences bancaires. En France, avec le développement du numérique qui a pour corollaire une baisse de fréquentation des agences, les experts s'attendent à la fermeture d'un tiers des agences d'ici 2020. En cela, fait remarquer Boussaid, il «est nécessaire d'avoir une conception plus large de la dématérialisation et réinventer un nouveau modèle en se basant sur les nouvelles technologies». «Certes, la digitalisation est une opportunité, mais tous les métiers de la finance vont être bouleversés, d'où la nécessité de bien s'y préparer», renchérit-il. Non sans avertir qu'«il faudra que les régulateurs soient vigilants, en faisant notamment évoluer la réglementation afin de pouvoir gérer les nouveaux risques inhérents à la digitalisation». Anticiper ou subir Dans un exposé brillant, Mamoun Bouhdoud, ministre délégué chargé des Petites entreprises et de l'Intégration du secteur informel, a puisé de son expérience personnelle pour aborder ce thème. Un thème qu'il juge «extrêmement important, parce que c'est le trait d'union entre deux sujets stratégiques pour le Maroc : celui de l'économie numérique et celui des marchés financiers, deux composantes qui ont été des facteurs essentiels dans la transformation de l'économie mondiale en général et des marchés financiers en particulier». Restant convaincu que la digitalisation va fondamentalement changer le monde, Bouhdoud rappelle que «nous avons vécu un changement de paradigme juste après la crise de 2008, date à laquelle, pour la première fois dans l'histoire, on a pu douter des institutions financières». Ce qui a, entre autres, induit la montée en puissance de toute la population qui a grandi avec Internet, un changement profond dans les habitudes consommation et dans notre mode de fonctionnement, ainsi que l'émergence de nouveaux canaux de distribution. Cette situation a poussé à prendre conscience qu'il fallait se focaliser sur la régulation en tenant notamment compte de ces innovations technologiques afin de mieux gérer les marchés financiers, explique-t-il. En cela, note Bouhdoud, l'arrivée des blockchains est synonyme d'une «révolution violente qu'il va falloir anticiper ou subir». Le Maroc se prépare tant bien que mal à cette nouvelle réalité. Le ministère chargé de l'Economie numérique a, en effet, mis en place une stratégie baptisée Maroc Digital, avec pour objectif principal de favoriser l'émergence de l'écosystème des start-up. «Nous avons comme ambition d'avoir trois locomotives au moins dans le Top 30 africain. Mais, comme vous le savez, on ne peut pas avoir d'émergence de start-up dont la valorisation est faite en général sur le capital sans avoir le levier de la Bourse derrière. Le trait d'union entre les deux est donc très important», souligne Bouhdoud. Des panels instructifs L'intervention de Bouhdoud a été suivie par la tenue de deux panels : le premier, modéré par Bachir Baddou, DG de la Fédération marocaine des sociétés d'assurances et de réassurance (FMSAR), a été consacré à «La dématérialisation, levier de croissance pour le marché financier». Dans le second panel, modéré par Fatima Ouriaghli, directeur de la publication de Finances News Hebdo, il s'agissait pour les différents intervenants de répondre à la question : «Quelle stratégie digitale pour l'attractivité du hub financier régional» ? Ce second Meeting sur l'information financière au Maroc se soldera, comme la première édition, par une série de recommandations. Recommandations auxquelles «les autorités accorderont une oreille attentive», promet Mohamed Boussaid. Rendezvous est d'ores et déjà pris l'année prochaine, pour la troisième édition.