Rassurez-vous, Lahcen Daoudi n'est pas dans la cuisine.Mais il était bien dans nos locaux il y a quelques jours, en tant qu'invité de la rédaction de Finances News Hebdo. Le ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de la Formation des cadres était d'ailleurs en bonne place dans la Une de notre édition du 7 avril. Mais pourquoi alors reparler de lui quelques jours après ? Je ne m'aventurerai pas à dire que c'est un visionnaire, mais je crois quand même que, dans son approche de l'enseignement supérieur, il y a des choses intéressantes qui passent quasiment inaperçues et qui, pourtant, peuvent servir à plus d'un titre le Maroc de demain. Quand il met ainsi en place des masters en terres rares, en batteries au lithium, en schistes bitumineux ou encore en analyse big data, c'est à peine si l'on y accorde de l'intérêt. C'est vrai que les titres de ces masters semblent un brin pompeux. Pourtant, ils découlent d'une logique simple, selon Daoudi : anticiper les métiers de demain et ne pas attendre que les investisseurs arrivent pour faire de la formation a posteriori, comme cela a été fait pour l'automobile et l'aéronautique. La généralisation de l'anglais dans les Universités est l'une de ses autres trouvailles. On en fait peu écho, et pourtant... Figurez-vous qu'il y a peu, je suis tombé sur un article sur BFM Business où il est dit que plusieurs études ont montré que plus un pays parle anglais, plus il a tendance à être riche. Ainsi, souligne l'article, dès 2008, les économistes Hyejin Ku et Asaf Zussman ont démontré que la maîtrise de l'anglais permet de dynamiser les échanges commerciaux entre des pays qui ne parlent pas la même langue à l'origine. En 2014, une étude réalisée par le chercheur Hayley Roppel, de l'Université d'Akron aux Etats-Unis, sur la zone de libre-échange du Sud de l'Asie (ASEAN), concluait que lorsque deux pays de cette région augmentent leur compétence en anglais (mesurée par leurs scores au test TOEFL) de 1%, leurs échanges bilatéraux bondissent de 7%, toute chose étant égale par ailleurs. La maîtrise de l'anglais impacterait aussi le PIB. En 2009, Chew Ging Lee, de l'Université de Nottingham, a étudié 43 pays des cinq continents en se basant, lui aussi, sur les résultats de leurs citoyens au TOEFL. Conclusion : il observe que l'anglais a permis d'accélérer la croissance des pays asiatiques et européens. Mais cette logique ne prévaut pas dans le cas de l'Afrique et de l'Amérique du Sud : Chew Ging Lee estime que si la maîtrise de l'anglais peut être un facteur de croissance, elle doit aussi être accompagnée d'institutions solides, d'un environnement politique stable et d'une bonne gouvernance. Pour sa part, Christopher McCormik, le vice-président d'EF Education First, après avoir étudié 60 pays, a eu une conclusion beaucoup plus catégorique en 2013 : toute hausse de la maîtrise de l'anglais dans un pays donné s'accompagnait, pour presque la totalité des pays étudiés, d'une augmentation du PIB par habitant. Mieux, l'étude révélait que les individus ayant une maîtrise de l'anglais exceptionnelle par rapport à la moyenne d'un pays donné, gagnaient en moyenne 30 à 50% de plus que leurs comparses ayant un niveau d'anglais plus classique. Bref, c'est dire que la langue de Shakespeare semble avoir de belles perspectives devant elle. Lahcen Daoudi n'est certes pas Nostradamus, mais quand même... well spotted !