La grande réforme du secteur de la santé initiée par le Royaume prend forme. Si aucun calendrier officiel n'a été dévoilé, les contours de cette réforme laissent entrevoir un véritable Big Bang. Par A. Hlimi
Malgré un Conseil de gouvernement chargé mardi, l'exécutif a pris le temps d'analyser en détail l'exposé du ministre de la Santé, Khalid Ait Taleb, sur la réforme de la Santé que la pandémie a remise sur le devant de la scène. Gouvernance, ressources humaines et matérielles..., autant de sujets que le ministre a clarifiés tout en mettant à plat les vrais problèmes du secteur.
Une instance de législation L'un des premiers axes de cette réforme concerne la gouvernance. Il s'agit en effet de la mise en place, prévue, d'une instance supérieure pour la législation intégrée de la santé, des agences régionales de santé et des groupements territoriaux de santé. Le ministre a souligné que parmi les fondements principaux de ce chantier figure la valorisation des ressources humaines en levant les obstacles imposés par la loi 131.13, sur la pratique des médecins étrangers au Maroc, en promulguant de nouvelles règles qui s'appuient sur le principe de l'égalité de traitement entre les médecins marocains et leurs confrères étrangers. Le but est que le médecin étranger pourra exercer sa profession selon les mêmes conditions appliquées à son confrère marocain et les médecins étrangers qui pratiquent actuellement au Maroc. Ceci permettra de pallier le manque de médecins et de couvrir de manière plus importante l'ensemble du territoire. Le ministre a souligné, dans le même cadre, qu'il sera procédé à la création d'une fonction publique de santé dans le but de valoriser le capital humain du secteur de la santé publique et d'adapter sa gestion avec les spécificités de la profession de la santé.
Une plus grande ouverture aux investisseurs étrangers Ce projet de réforme vise également à renforcer l'investissement étranger et attirer l'expertise et les compétences médicales étrangères, ce qui permettra d'une part, de développer l'infrastructure de santé et assurer les équipements biomédicaux de grande qualité, et d'autre part, d'encourager les compétences médicales marocaines résidentes à l'étranger à retourner dans leur pays pour y travailler et s'y installer définitivement. Il faut dire que sur ce point, le Maroc n'aura pas beaucoup de difficultés pour convaincre, la santé faisant déjà partie de la tête de liste des secteurs visés par les IDE grâce à sa rentabilité et son caractère défensif. Ce chantier consiste à réhabiliter l'offre de santé à travers l'appui de la dimension régionale, en mettant en œuvre le programme de santé régional et en appliquant l'obligation du respect de l'option des traitements et en œuvrant à réhabiliter les institutions sanitaires.
Plus de data La création d'un système d'information intégré qui permet la collecte, le traitement et l'exploitation de toutes les informations de base relatives au système de santé, y compris le secteur privé, est un autre pilier de ce chantier. Ceci va permettre également un suivi précis du patient et l'évaluation du déroulement de ses traitements, en se basant sur le dossier médical commun tout en améliorant le système de facturation dans les établissements hospitaliers, a encore expliqué Ait Taleb. Au début de sa présentation, le ministre a déterminé le cadre général de ce chantier à travers trois éléments référentiels. Il s'agit en l'occurrence de la mise en œuvre des Hautes Orientations Royales visant à revoir intégralement le système national de santé, faire de la promotion du secteur de la santé un des grands chantiers vitaux et l'accompagnement de la loi cadre n°09.21 relative à la protection sociale, qui porte sur l'obligation de la réforme du système de santé national et sa réhabilitation. Ce cadre comprend le diagnostic des limites de l'actuel système de santé que Ait Taleb a expliqué par : «la succession d'un ensemble de réformes qui n'ont occasionné aucun changement réel dans le secteur, le manque cruel des ressources humaines et le déséquilibre régional dans leur répartition, une offre de santé inégale et ne répondant pas aux attentes des citoyens, la faiblesse de la gouvernance du système de santé devant l'absence de l'indépendance des institutions de santé, en plus d'un financement insuffisant du secteur». Voilà qui est dit.