Les différentes réformes initiées au cours de cette dernière décennie ont montré leurs limites. Le marché des capitaux a visiblement besoin d'un nouveau souffle. Cinq priorités ont été identifiées par la tutelle et sont susceptibles d'impulser une dynamique autrement plus importante au marché. "Dans le cadre des efforts de la modernisation du marché des capitaux, le Maroc a entamé plusieurs réformes qui favorisent la consolidation du rôle du financement de l'économie, l'approfondissement de son efficience, sa transparence, son intégrité et, enfin, l'affirmation de son positionnement à l‘échelle régionale». a déclaré Nizar Baraka, ministre de l'Economie et des Finances. Celui-ci a rappelé que, durant ces deux dernières décennies, le marché des capitaux a connu de fortes mutations qui ont permis au Maroc de passer d'une économie d'endettement, où le secteur bancaire joue un rôle prépondérant en termes de financement, à une économie de marché. Aussi, les marchés de capitaux s'affirment-ils de plus en plus comme une composante importante, voire essentielle, pour le système financier, offrant ainsi des alternatives aux entreprises à la recherche de financement. C'est ainsi que pendant les années quatre vingt dix, la réforme du marché des capitaux avait clairement comme objectif la mise en place d'un cadre législatif moderne et la promotion du rôle de la Bourse en tant que vecteur de la mobilisation de l'épargne et du financement de l'économie. Cette réforme a été aussi marquée par la création du CDVM, autorité chargée de la protection de l'épargne investie en valeurs mobilières. Elle a été également renforcée par la mise en place de la législation qui concerne les OPCVM, les titres de créances négociables, les opérations de pension, de capital risque et de titrisation. A l'époque, ces réformes ont permis la mise en place des jalons d'un marché moderne qui affiche, à fin 2012, un actif net des OPCVM de 240 Mds de DH, une capitalisation boursière de 462 Mds et un encours de la dette privé de 182 Mds de DH. Signes d'essoufflement Néanmoins, le marché de capitaux a commencé à montrer des signes d'essoufflement, notamment à travers le resserrement de la liquidité et une stagnation de l'activité du marché boursier. Ceci a mis en évidence la nécessité de déclencher une nouvelle vague de réformes intégrées et globales permettant de raviver le marché des capitaux dans son ensemble. A ce titre, cinq priorités ont été arrêtées. Tout d'abord, renforcer la supervision et la transparence du marché des capitaux. «Conscient du fait que le renforcement des dispositifs et des initiatives régissant la protection d'épargne est une condition sine qua none du développement du marché des capitaux, nous avons lancé deux chantiers majeurs : le premier concerne l'adoption de la loi régissant l'autorité marocaine du marché des capitaux qui renforce l'indépendance, tout en instituant le cadre de coopération renforcée entre les différentes autorités de supervision du secteur financier», a souligné N. Baraka. Ces chantiers seront renforcés avec la loi portant création de l'autorité de contrôle des assurances et de la prévention sociale et la loi bancaire qui renforce les pouvoirs de l'indépendance de Bank Al-Maghrib. Ainsi, la supervision du secteur financier constitue un gage d'un contrôle public efficace et garant de la confiance des investisseurs et des opérateurs dans ce marché, spécialement dans le contexte actuel. Le deuxième chantier porte sur la loi sur l'appel public à l'épargne. «Nous allons mettre en place des dispositifs qui répondent aux standards internationaux pour une meilleure transparence du marché et un renforcement du contrôle de l'information imposé aux émetteurs», a déclaré le ministre. Dans ce cadre, celui-ci a annoncé la révision de la gouvernance des institutions qui font appel à l'épargne, avec une nouvelle architecture en phase de finalisation et qui devrait se traduire par l'ouverture du capital de la Bourse. En effet, la structure du capital ne sera plus exclusivement réservée aux sociétés de Bourse et la liste des actionnaires va être fixée par le statut de la société. «Les statuts sont en cours de finalisation avec une forte implication des différentes parties prenantes», a précisé Baraka. D'autres mesures ont été mises en place pour la relance du processus d'introduction en Bourse, notamment la reconduction jusqu'à 2016 des incitations fiscales en faveur des sociétés souhaitant s'introduire en Bourse. Par ailleurs, le législateur travaille sur de nouveaux instruments financiers qui vont venir enrichir la panoplie des produits proposés au marché Boursier. Et ce, à travers notamment la mise en place d'un cadre législatif régissant les fonds indiciels cotés et les fonds immobiliers cotés. «La mise en place prochaine d'un marché financier à terme, dont le projet de loi a été adopté par la Chambre des représentants en février dernier et est en cours de discussion actuellement au niveau de la Chambre des conseillers va permettre aux opérateurs de se couvrir contre les risques, y compris ceux liés aux marchés des matières premières », ajoute le ministre. Malgré le retard accusé dans leur mise en place, l‘ensemble de ces efforts de modernisation devrait être accompagné par des actions initiées par les opérateurs du marché, notamment en ce qui concerne la mise en place de l'infrastructure technologique pour accompagner l'introduction des nouveaux instruments financiers, l'amélioration des procédures opérationnelles du marché et la sécurisation des transactions à travers la mise en place d'une chambre de compensation. «Nous voulons aussi réconcilier les PME et les entreprises de tailles intermédiaires avec le marché car elles peuvent y trouver le financement nécessaire pour accompagner leurs activités», ajoute N. Baraka. Cette ambition sera traduite par la création d'un compartiment dédié à cette catégorie d'entreprises à la Bourse de Casablanca. Le troisième axe de la stratégie porte sur la réforme du marché de la dette privé. A ce titre, il a été proposé le développement sécurisé du marché de la dette privée des émetteurs, ce qui permettra également aux investisseurs d'apprécier convenablement le risque lié à chaque émetteur. En effet, «le recours à la notation devrait être encouragé sans pour autant être obligatoire», a fait savoir le ministre. Dans ce cadre, la nouvelle autorité de marché devrait ajouter des incitations supplémentaires pour encourager les émetteurs de titres de créances à adhérer. La transparence du marché des capitaux passe aussi par une communication financière plus adéquate et plus complète. Par ailleurs, le ministre a annoncé que de nouveaux produits de dette verront prochainement le jour et répondront aux exigences des investisseurs en termes de sécurité. il s'agit notamment des obligations sécurisées, dont le projet de loi est en cours de finalisation. Le quatrième axe concerne la mobilisation de l'épargne longue. Le Maroc a lancé plusieurs projets d'infrastructures et de développement nécessitant le recours à l'épargne longue. «Dans ce cadre, il y a une forte mobilisation du gouvernement pour le renforcement de l'épargne intérieure afin de maintenir le taux d'investissement à un niveau élevé et réduire le cap entre le taux d'épargne et le taux d'investissement», a conclu N. Baraka.