◆ Jamais un vaccin n'aura été aussi attendu pour combattre une pandémie qui a plombé l'économie mondiale. ◆ Dans cette course engagée, le Maroc est depuis longtemps dans les starting-blocks, multipliant les partenariats avec les laboratoires internationaux. ◆ Le Royaume se prépare à l'ultime phase : la vaccination.
Par D. William
On peut tout reprocher au gouvernement marocain, sauf de n'avoir pas fait preuve d'anticipation. Dans la course à l'acquisition de vaccins qui se joue au niveau mondial, le Royaume est en effet dans les starting-blocks depuis longtemps. Il faut dire que faute de pouvoir contenir la propagation du coronavirus et limiter son raid meurtrier, la seule alternative reste un confinement total, dont personne ne veut entendre parler en raison de son coût économique exorbitant et de ses conséquences sociales dévastatrices, ou la découverte d'un vaccin. Le vaccin justement, c'est ce sur quoi parient maintenant tous les pays pour vaincre la Covid-19. Le Maroc, dont la situation épidémiologique s'est fortement dégradée, avec des cas qui dépassent de plus en plus les 5.000 contaminations quotidiennes pour 70 à 80 décès, mise aussi fortement sur ce fameux vaccin. Dès le 17 août, le Royaume annonçait, en effet, qu'il allait participer avec certains pays aux essais multicentriques relatifs à la Covid-19, du moment qu'il dispose de l'arsenal réglementaire et juridique lui permettant de se positionner pour obtenir la quantité de vaccin suffisante pour les citoyens, dans les délais opportuns, et garantir une autosuffisance par rapport à la production du vaccin. Trois jours plus tard, le Maroc concluait avec le laboratoire chinois CNBG deux accords de coopération en matière d'essais cliniques du vaccin anti-Covid-19, ouvrant la voie à une présence stratégique de Sinopharm au Maroc. Ces accords portent, entre autres, sur la coopération en matière d'essais cliniques de phase III du vaccin anti-Covid-19, avec la volonté de faire profiter le continent africain de ce vaccin. Un mois plus tard, soit le 18 septembre, un mémorandum d'entente a été signé pour l'acquisition de vaccins anti-Covid-19 produits par la Société «R-Pharm», sous licence du groupe «AstraZeneca». Objectif : sécuriser l'approvisionnement du pays en quantités de vaccins suffisantes. Par ailleurs, des négociations ont été engagées avec trois nouvelles sociétés pour l'acquisition d'un vaccin anti-Covid-19 dès qu'il sera mis sur le marché international, selon le chef du gouvernement, Saad Eddine El Otmani. Après cette phase de sécurisation, le Royaume est donc prêt à franchir l'ultime étape : la vaccination. Le 9 novembre, le Roi a ainsi donné ses hautes orientations en vue du lancement, dans les prochaines semaines, d'une opération massive de vaccination contre la Covid-19. Et ce d'autant que, selon les résultats des études cliniques déjà achevées ou toujours en cours, la sécurité, l'efficacité et immunogénicité du vaccin ont été prouvées. El Otmani s'est d'ailleurs montré rassurant à ce propos. Le «choix marocain du vaccin repose sur la sécurité et l'efficacité, deux critères fondamentaux, sachant que les études cliniques ont jusqu'à maintenant prouvé que le vaccin remplit ces deux conditions», précise-t-il. Pour l'heure, les essais cliniques qui ont eu lieu se sont avérés sans complications, fait-il savoir, assurant que le Comité scientifique national suit les différents résultats des recherches cliniques auxquelles le Maroc participe. Ainsi, l'opération de vaccination ciblera les citoyens âgés de plus de 18 ans, selon un schéma vaccinal en deux injections. Sont considérées comme prioritaires le personnel de santé, les autorités publiques, les forces de sécurité et le personnel de l'Education nationale, mais également les personnes âgées et celles personnes vulnérables au virus. L'opération sera ensuite élargie au reste de la population. Dans une première étape, quelque 10 millions de doses du vaccin anti-Covid-19 seront disponibles au Maroc, selon le directeur du laboratoire de biotechnologie de la faculté de médecine et de pharmacie de Rabat, Azeddine Ibrahimi. D'ores et déjà, le gouvernement, qui coordonne également avec l'OMS dans le cadre de son programme «Covax», est en train de préparer une vaste campagne de sensibilisation qui débutera incessamment. Objectif : clarifier aux citoyens tous les aspects liés au processus de vaccination pour assurer leur implication et instaurer un climat de confiance. Quand est-ce que la campagne de vaccination massive pourra-t-elle alors commencer ? Difficile à dire, surtout quand on sait qu'outre la production et le conditionnement, il faut une logistique importante, des ressources humaines disponibles et aussi l'acceptation par la population, déterminante pour la réussite de la campagne. En attendant, sur la scène internationale, la course pour la découverte du vaccin anti-covid-19 est lancée. Les laboratoires livrent bataille Il faut en moyenne 10 ans pour développer un vaccin. C'est ce que disent les experts, et ils le martelaient davantage au tout début de la pandémie. Mais leur discours actuel a un peu changé, «démenti», en quelque sorte, par les avancées réalisées en la matière par les grands laboratoires. En effet, d'ici la fin de l'année, voire début 2021, des vaccins contre le coronavirus pourront être disponibles. Pour le Directeur général de l'Organisation mondiale de la santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus, «jamais dans l'histoire, la recherche sur les vaccins n'a progressé aussi rapidement». Selon l'OMS, 48 vaccins sont actuellement en phase d'essais cliniques, dont onze en phase 3, la dernière avant la commercialisation. Celui développé par le laboratoire américain Pfizer et la société de biotechnologie allemande BioNTech, qui ont fait état, le 10 novembre, d'un vaccin «efficace à 90%», bénéficie, à ce titre, de préjugés très favorables. D'ailleurs, le patron de l'OMS s'est dit «encouragé par les résultats préliminaires des essais cliniques». La biotech américaine Moderna se distingue également, avec le développement d'un vaccin actuellement en phase III et fonctionnant selon le même principe que celui de Pfizer et Biontech, à savoir l'ARN Messager. Le vaccin de Moderna, jugé par la biotech efficace à 94,5%, dispose d'un grand avantage, du fait qu'il se conserve à -20° contre -80° pour celui de Pfizer. En Europe, le vaccin conçu par l'Université d'Oxford et AstraZeneca reste le plus avancé et devrait prêt d'ici la fin de l'année. Des essais cliniques devraient bientôt avoir lieu. En Chine, quatre vaccins sont en cours d'élaboration, tandis que de son côté, la Russie revendique 92% d'efficacité pour son vaccin Spoutnik-V contre la Covid-19, actuellement en phase 3 d'essais cliniques. Surenchère, effets d'annonce ou vraie dose d'espoir pour combattre efficacement ce virus pernicieux ? A en croire les experts, tout cela est réellement prometteur, mais encore faut-il plus de détails scientifiques sur ces annonces qui se résument pour l'instant en des communiqués de presse laconiques. Si le vaccin développé par Pfizer et Biontech, qui fait grand bruit en ce moment, a été évalué par un comité indépendant (contrairement au vaccin russe), plusieurs interrogations se posent toutefois. Quelle durée de protection offre-t-il ? Quel est son niveau de sécurité ? Quel sera son degré d'efficacité ? A l'évidence, la bonne surprise dans tout cela réside dans le fait que ces vaccins offrent apparemment des niveaux de protection supérieurs à ce qu'on aurait pu croire. Le vaccin contre la grippe protège, par exemple, à 60% selon les saisons.
Vaccin anti-Covid-19 : Voici comment le Maroc va s'approvisionner auprès de la Chine Les préparatifs de la campagne nationale de vaccination contre la Covid-19 vont bon train. Le Maroc a d'ores et déjà fixé sa stratégie d'approvisionnement auprès de la Chine. Selon une source proche du dossier, le Maroc recevra le premier lot du vaccin chinois contre la Covid19 d'ici décembre prochain, c'est-à-dire dans les 2 ou 3 prochaines semaines. Ainsi, le Royaume sera l'un des premiers pays à vacciner ses citoyens. Aussi, précise la même source, il a été décidé de programmer 10 vols entre le Maroc et la Chine au cours du mois de décembre prochain (à raison de deux vols par semaine), afin de s'approvisionner en quantité suffisante en termes de vaccins. De fait, le Maroc recevra 10 millions de doses à travers 10 vols, soit un million de doses par vol. On apprend également qu'environ 5 millions de personnes seront vaccinées dans une première étape, étant donné que l'approvisionnement auprès de la Chine se fera d'une manière progressive.