Par : Mohamed Badine El Yattioui, docteur en sciences po et spécialiste en politiques publiques et relations internationales Trump ou Biden ? Qui conviendrait le mieux au Maroc et à la défense de ses intérêts ? Si le président Trump n'a pas bonne presse dans le monde arabe en général et au Maroc en particulier, les choses sont bien évidemment plus complexes pour les relations bilatérales. Ces dernières sont dynamiques depuis de nombreuses années et dépassent les mots. Le partenariat historique maroco-américain, qui se veut multidimensionnel, s'est traduit dans les actes par la désignation du Royaume comme un allié majeur de la première puissance mondiale hors OTAN, la conclusion d'un accord de libre-échange (en vigueur depuis 2006), le renouvellement du Millenium Challenge Corporation Compact II en 2017 et l'accord militaire signé ce mois-ci. Le Secrétaire à la Défense, Mark Esper, a signé ce dernier avec le ministre délégué chargé de l'Administration et de la Défense nationale, Abdellatif Loudiyi. Cet accord de coopération est d'une durée de dix ans et permettra une coopération dans le domaine militaire, stratégique, les achats d'armes et d'équipements, la formation militaire et le renseignement. De son côté, le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, a déclaré «notre alliance est forte et faite pour durer». Les Etats-Unis souhaitent s´associer avec des partenaires africains fiables, comme le Maroc, pour faire face aux situations complexes qu'on retrouve dans le continent comme en Libye et au Mali. Le Secrétaire américain à la Défense a d'ailleurs souligné qu'à bien des égards, le Royaume est le premier pays ami des Etats-Unis d'Amérique. Entre les candidats Trump et Biden, en ce qui concerne la question nationale du Sahara, le premier a quelque part soutenu sa marocanité. Il a permis que l'aide publique des Etats-Unis au Maroc prennent en compte les provinces du Sud, ce qui peut être interprété comme une reconnaissance de la souveraineté du Maroc sur le Sahara par son pays. Historiquement, le Royaume a pu avoir des difficultés avec les Démocrates. Bill Clinton étant une exception du fait de la relation personnelle qu'il entretenait avec Feu SM Hassan II. Mais la complexité du système américain empêche les généralisations et la caricature. Rappelons que John Bolton, Républicain et conseiller à la Sécurité nationale de Trump (2018-2019), est à l'origine de la réduction du mandat de la Minurso à seulement six mois au lieu d'un an. En cas de victoire de Joe Biden, des réseaux hostiles risquent de se remobiliser sur la question du Sahara marocain. Tout sera question de lobbying. L'objectif principal du lobbying marocain est la défense de la cause nationale auprès des membres du Congrès. Au sein du Sénat, les séparatistes ont des relais comme le Républicain Lindsey Graham. En dehors, Kerry Kennedy, présidente de la Fondation Robert F. Kennedy, est un autre soutien. Souvenons-nous qu'en octobre 2017, le Congrès avait introduit une proposition dans le budget 2018 demandant aux services du Département d'Etat de «consulter d'abord la Minurso avant de donner son feu vert aux aides destinées au Sahara occidental». Initiative finalement non adoptée. D´autres acteurs sont également à prendre en compte, au sein de l´exécutif et en dehors de la Maison Blanche, comme le Département d´Etat et le Pentagone. Ces élections sont à étudier de près car les enjeux sont de taille du fait du niveau de coopération important dans des domaines stratégiques pour le Maroc.