Au-delà des thématiques à suivre et des portefeuilles proposés par les spécialistes en 2020, se posent certains enjeux qui vont conditionner l'évolution du marché financier marocain. Tour d'horizon. Par Y. S
1. Politique monétaire En 2019, la politique monétaire au Maroc est restée quasi inchangée. Le taux directeur a été maintenu à 2,25%, avec une approbation des mesures spécifiques devant être mises en place par Bank Al-Maghrib dans le cadre du programme d'appui à l'entrepreneuriat. Seul le taux de la réserve obligatoire a été revu à la baisse de 2 points de pourcentage. Une action qui a permis l'injection de 11 Mds de DH dans le circuit monétaire. Le crédit bancaire, quant à lui, devrait connaître une amélioration graduelle, avec une croissance avoisinant 4% en 2019, puis 4,7% en 2020 et 5% en 2021, estime Bank Al-Maghrib dans son dernier rapport trimestriel sur la politique monétaire. Verra-t-on un changement de la politique monétaire avec la lente progression de la production des crédits bancaires ? À suivre.
2. taux obligataires En 2019, les taux obligataires ont atteint des bas historiques. A chaque séance d'adjudications, les actions à haut rendement étaient recherchées au moment où les taux s'effritaient. Une situation résultant d'une bonne tenue des finances publiques face à une abondance de liquidités chez les institutionnels qui sont les grands perdants de ce déséquilibre. Suite à la baisse des taux enregistrée en 2019, le spread (BDT 10 .D/Y) reste favorable aux actions cette année 2020. Il est de 0,8 pt. L'année 2020 démarre sur le même trend. Une chute du 15 ans qui a piqué à moins de 3% mardi dernier. La direction du Trésor a retenu 7 Mds de DH sur cette maturité au taux de 2,944%, soit une baisse de 7,7 pbs par rapport à la dernière émission similaire.
3. Développement de véhicules d'investissement Le manque d'alternatives d'investissement a été pénalisant pour les investisseurs en 2019 (les institutionnels surtout). Les OPCI et les ETFs sont deux véhicules d'investissements très attendus cette année. Ces classes d'actifs apporteront un nouveau souffle au marché financier. Les premières sociétés de gestion d'OPCI ont obtenu leurs agréments et des fonds sont déjà mis en place. Les ETFs, eux, sont prévus par le nouveau règlement de la Bourse, mais ils nécessitent par contre la promulgation de la loi sur les OPCVM, dont l'agenda est encore flou. Pour le non-coté, le programme de financement innovant introduit en 2019 a été reconduit dans le Budget 2020 pour le même montant de 12 Mds de DH. Rappelons qu'une première opération a eu lieu en 2019 consistant en le transfert de la propriété de 5 CHU à la CMR pour un montant estimé à 5 Mds de DH. Ce mécanisme vise à confier aux investisseurs institutionnels le financement de projets d'infrastructures, qui a été annoncé dans le cadre du partenariat public-privé.
4. Nouvelle(s) OPV Pour alimenter son budget général de 3 Mds de dirhams (comme inscrit dans le cadre du projet de Loi de Finances), le gouvernement prévoit un programme de privatisations de 6 Mds de dirhams en 2020, la moitié étant réservée au Fonds Hassan II. Et à l'image de l'année dernière avec Maroc Telecom, d'autres entreprises privatisables pourraient sortir (en partie) du giron de l'Etat. Si la liste des entreprises privatisables contient plusieurs noms, celui de Marsa Maroc revient avec insistance dans les salles de marché. Cotée en Bourse, la cession d'une partie des parts de l'Etat dans son capital sera une opération «facile», notamment sur les aspects juridiques, de valorisation et de communication. De plus, Marsa Maroc dispose d'une «belle histoire» boursière, à l'image de Maroc Telecom. L'opérateur portuaire a été introduit en Bourse en 2016 lors d'un processus de privatisation où l'Etat avait cédé 40% de sa participation pour un peu moins de 2 Mds de dirhams. L'opération a été réalisée au prix ferme de 65 DH/action (hors décote ou prime spécifique). Trois ans et demi plus tard, son cours en Bourse s'établit à 227 DH. Un record.
5. Risques géopolitiques/Commerciaux Si la guerre commerciale a conditionné les marchés mondiaux en 2019, les nouvelles tensions géopolitiques pourraient prendre le relais cette année (ou s'ajouter au lot). Leurs premiers effets (positifs et négatifs) se font déjà sentir : inconstance des marchés actions, hausse du pétrole et des matières premières (avec le palladium qui a distancé l'or pour atterrir à plus de 2.277 euros l'once). Sur notre marché local, le secteur minier a profité des tensions actuelles entre les Etats-Unis et l'Iran. SMI et CMT ont particulièrement été recherchées par les investisseurs. Tout récemment, les Etats-Unis et la Chine ont signé une trêve commerciale après dix-huit mois de conflit, prévoyant une baisse de certains droits de douane et l'achat par Pékin de 200 milliards de dollars de biens et services américains supplémentaires au cours des deux prochaines années. Pékin et Washington présentent cet accord de «phase1», signé à Washington par Donald Trump et le vice-Premier ministre chinois Liu He, comme une nouvelle étape après des mois d'attaques et de représailles à coups de hausses des droits de douane entre les deux premières économies mondiales. ◆