C'est une première dans l'ère nouvelle de l'économie marocaine ! Bank Al-Maghrib vient de retirer l'agrément de la société de financement Diac Salaf. La société avait multiplié les annonces sur l'entrée dans son capital d'un investisseur étranger pour redresser la situation, mais les autorités ont perdu patience. Diac Salaf s'est noyée sous l'effet de ses pertes cumulées. On s'y attendait ! C'est ce que dit la communauté des investisseurs qui suivent de près l'entreprise cotée en Bourse. Mais personne ne pouvait prévoir le moment où tomberait la sanction, surtout que Bank Al-Maghrib a longuement maintenu le suspense sur ce dossier en accordant plusieurs rallonges de temps au management de l'entreprise. De son côté, celui-ci miroitait à chaque échéance l'arrivée imminente d'un investisseur étranger dans le capital. Investisseur dont l'identité a été tenue secrète, et qui était prêt à recapitaliser l'entreprise pour réduire les quelque 250 MDH de pertes cumulées qui épongent la totalité du capital (105 MDH en comptes sociaux le 31 décembre 2011). Diac Salaf existe depuis 1948 et a été introduite en Bourse en 1962. Selon les données de la Bourse de Casablanca, son capital est détenu à hauteur de 51,13% par Fininvest, 4,69% par Al chimie, 3,48% par Goldfin et les 40,7% restants constituent le flottant en Bourse. Une chute inexorable L'exercice fiscal de 2009 a été le premier exercice où les commissaires aux comptes de la société avaient tiré la sonnette d'alarme. Ces derniers avaient relevé un sous provisionnement de l'ordre de 108 MDH pour «risques encourus par DIAC SALAF pour le cautionnement des dettes de ses filiales». Le commissariat aux comptes avait déclaré à l'époque qu' «en cas de constatation de cette provision, la société serait contrainte à se recapitaliser sous peine de faillite». Mais c'est l'exercice fiscal de 2010 qui a concrétisé l'hémorragie de la société. Diac Salaf y a enregistré un PNB (équivalent du chiffre d'affaires d'une société commerciale) de 2,3 MDH mais constaté des provisions de 200 MDH. Résultat, une perte sèche de 214 MDH. Dès lors, les fonds propres ont été complètement laminés et la société devait se recapitaliser de plus de 150 MDH. L'exercice suivant, celui de 2011, a également été déficitaire de 16 MDH et comprenait des provisions de 3,3 MDH...seulement. Le secteur a pourtant été résistant ces dernières années. Tirées par le bon comportement de la consommation des ménages, les sociétés de crédit ont pu résister à la baisse des investissements. Certes, le coût du risque s'est accru, mais pas au point de mettre en jeu leur pérennité. Le cas Diac Salaf est certainement un cas isolé qui ne traduit pas un malaise généralisé du secteur. Que se passera-t-il maintenant ? La prochaine étape sera la liquidation de la société. Elle se fera conformément aux dispositions des articles 100 à 104 de la loi no 34-03 relative aux établissements de crédit et organismes assimilés, ainsi qu'à celles du titre III du livre V du Code de commerce. Concrètement, il sera procédé à la réalisation de l'actif (vente des biens et récupération des créances) pour, ensuite apurer le passif, soit le règlement des créanciers. Les actionnaires ne seront pour leur part remboursés qu'en dernier lieu. Mais vu l'ampleur des dettes comptables (253 MDH à fin 2011) alors que l'actif en valeur comptable à la même date n'est que de 189 MDH, le commissaire liquidateur devra réaliser de grandes plus-values sur les bien meubles pour dégager des ressources à restituer aux actionnaires, tout en supposant que le recouvrement des créances soit complet. Autant dire que la tâche sera bien compliquée, pour ne pas dire impossible. Parallèlement, dès l'annonce officielle de la mise en liquidation, il sera demandé à la société gestionnaire de prononcer la radiation des titres de la société Diac Salaf de la cote de la Bourse des valeurs. Une bien triste fin.