L'étau se resserre pour le secteur des assurances dans le contexte actuel de baisse du marché actions de plus de 30% en deux ans. Pour l'heure, cette baisse n'entame que les plus-values latentes des entreprises du secteur, selon la DAPS. Mehdi Tazi, Directeur général de Cniaa Saada, nous explique la situation de son groupe. Finances News Hebdo : Peut-on savoir jusqu'à quel degré votre activité financière a-t-elle été affectée par la chute de la Bourse de Casablanca ? Mehdi Tazi : Les produits financiers constituent un élément important dans la formation du résultat d'une compagnie d'assurance. Il est donc évident que la baisse du marché boursier ces deux dernières années, a eu un impact sur la performance financière des compagnies d'assurances et ce, via deux mécanismes : - La constatation éventuelle de dépréciation des actifs, - La baisse des valorisations des actifs induisant la diminution des réalisations des plus-values. Cependant, les revenus récurrents, à savoir les coupons obligataires, les revenus de DAT, les loyers et les dividendes sont moins impactés par cette conjoncture. Notre politique de placement nous assure une allocation d'actif équilibrée entre les produits de taux, les actifs immobiliers et les actions. F. N. H. : Quels sont les principaux axes stratégiques de votre gestion Actif/Passif au courant de l'année 2012 ? M. T. : La gestion Actif/Passif est réalisée selon la nature des branches (Vie ou Non Vie). Pour la branche Vie, le suivi de l'indicateur TMG (Taux Moyen Garanti) permet de situer le niveau de rendement auquel doivent être placés les actifs. En effet, le portefeuille financier affecté à cette branche doit générer annuellement au moins un taux supérieur au TMG. Nous avons donc concentré nos placements tout au long de l'année sur des actifs à haut rendement récurrent, tout en maintenant une duration actif proche de celle du passif. Sur la branche Non Vie, l'enjeu est plus au niveau de la détermination du seuil maximum à supporter sur le marché actions et immobilier qui permettrait, à la fois de créer des plus-values latentes à long terme et de maintenir le taux de couverture et la solvabilité de l'entreprise. F. N. H. : Quel sera l'apport des règles prudentielles Solvency II en matière de sécurité de placements ? Et quelles sont les contraintes additionnelles qui peuvent en découler ? M. T. : En Europe, Solvency II imposera aux assurances de mobiliser une partie des fonds propres afin de couvrir le risque de placement. Ainsi, plus le portefeuille est risqué, plus l'assureur devra posséder des capitaux propres. La gestion de portefeuille dans le cadre de Solvency II exigera donc une nouvelle contrainte : la Value at Risk en plus de l'ALM. Au Maroc, notre autorité de tutelle et notre Fédération ont travaillé ensemble afin de s'inspirer de Solvency II pour mettre en place un cadre prudentiel adapté aux particularités du marché marocain et des spécificités des acteurs du marché. Dans ce sens, la DAPS a donné la priorité au pilier II de solvency II, via la mise en place de la circulaire du 26 août 2008 qui pose les nouvelles règles en matière d'organisation du contrôle interne et des mesures et gestion des risques. L'autre avancée importante de notre secteur s'inspire du pilier III et met l'accent sur la transparence et la communication financière en faveur du public et de l'autorité de contrôle pour l'ensemble des compagnies d'assurance, qu'elles soient cotées ou non. D'autres directives, qui pourront impacter sensiblement nos règles et processus de gestion d'actifs, seront traitées par le pilier I. Nous entamerons les travaux nécessaires pour leur implémentation dès que l'autorité de tutelle fixera les directives et dès que les études quantitatives d'impacts seront terminées et validées par la Fédération des assurances. F. N. H. : Qu'est-ce qui empêche les compagnies d'assurance à investir dans le non-côté ? M. T. : Le Private Equity (PE) est un secteur récent et en plein essor au Maroc ; qui permet, notamment, d'apporter un support à certaines branches d'activité au Maroc. Cependant, ce type d'investissement ne peut constituer qu'une part très faible de l'allocation et ce, même dans les marchés occidentaux où cette industrie est plus mature du fait de manque de liquidité, du niveau élevé de risque et de la difficulté de définir les valeurs de marché des portefeuilles non-côtés. Cnia Saada a donc alloué depuis plus de dix ans une part de ses investissements pour investir dans quelques fonds d'investissement pour encourager l'industrie du PE au Maroc et jouer pleinement son rôle d'investisseur institutionnel dans les limites permises par son allocation cible.