Depuis que le Maroc a signé des accords de libre-échange, les efforts fournis par les pouvoirs publics et les opérateurs sont concentrés sur la mise à niveau du tissu économique national afin de lui permettre de concurrencer, à armes égales, les entreprises étrangères. Les actions déployées ont aussi concerné l'environnement de l'entreprise afin de promouvoir le Maroc en tant que plate-forme, essentiellement après la signature de l'accord de libre-échange avec les États-Unis. Toutes ces actions sont très louables, mais il est désormais impératif de prendre en considération les préoccupations politiques liées aux pratiques déloyales qui peuvent aller jusqu'à la ruine de certaines branches industrielles. Quels sont ces instruments ? Les mesures antidumping et les mesures compensatoires sont respectivement des mesures qui s'appliquent aux importations en dumping et celles ayant bénéficié d'une subvention et qui sont considérées comme pratiques commerciales déloyales. Ces mesures ne datent pas d'aujourd'hui, mais sont prévues par l'accord de l'OMC, à savoir l'accord antidumping et celui sur les subventions et mesures compensatoires. Un produit fait l'objet du dumping lorsqu'il est exporté vers le Maroc à un prix inférieur au prix de vente dudit produit sur le marché domestique. Une subvention est réputée exister si le produit considéré a bénéficié d'une contribution financière des pouvoirs publics dans le pays d'origine ou d'exportation. Les subventions ne sont passibles de mesures compensatoires que lorsqu'elles sont spécifiques. Ainsi, une subvention est dite spécifique lorsque son octroi est subordonné aux résultats à l'exportation ou lorsque la subvention est limitée à une entreprise ou à un secteur. Encore faut-il, que ces pratiques causent ou menacent dengendrer un préjudice important à la branche de production nationale du produit identique ou au produit similaire au produit, objet de dumping ou de subvention et qu'un lien de causalité est établi entre les importations objet de dumping ou de subvention et le préjudice causé. A noter par ailleurs que les mesures compensatoires et celles antidumping ne sont appliquées que suite à une enquête menée conformément à l'accord antidumping et l'accord sur les subventions et mesures compensatoires. Dans une première étape, la branche de production est appelée à déposer une requête en son nom. Cette requête devra remplir un certain nombre de conditions conformément aux règles de l'OMC. La deuxième étape est relative à l'ouverture de l'enquête et l'envoi de questionnaires aux producteurs et aux exportateurs et aux gouvernements en cas de subventions. Au Maroc, et bien que l'enjeu soit de taille, la législation marocaine demeure muette sur l'existence d'un dumping prohibé. «Elle ne précise pas les modalités d'ouverture des enquêtes sur le dumping et les mesures de sauvegarde ainsi que l'organisme habilité à mener ce type d'enquête», souligne Mohamed Lahlou, président de la commission «Compétitivité de l'entreprise» de la CGEM. Aujourd'hui, dans un contexte marqué par l'expansion du commerce international, le besoin se ressent de plus en plus; d'où la nécessité de réfléchir à une actualisation de la législation. Le Maroc a entamé un bon nombre de réformes en vue d'améliorer le climat d'investissement et de réduire le niveau du chômage qui continue à persister. Ceci ne pourrait être réalisable dans un marché menacé par la concurrence déloyale et la contrebande déguisée. Le dumping made in China La déferlante chinoise qui a marqué l'actualité ces derniers temps et les fermetures en cascades des sociétés du textile est une réalité atroce qu'il faut désormais éviter. Les différents États sont unanimes sur le fait que la Chine utilise des règles qui vont à l'encontre de l'OMC. Grâce aux pratiques déloyales, les échanges extérieurs chinois ont progressé de 35% pour s'établir à 1.100 milliard de dollars permettant ainsi à la Chine de devenir la troisième puissance commerciale mondiale. De même, le dumping social lui permet de renforcer son attractivité en matière d'investissement et d'occuper ainsi le deuxième rang après les États-Unis. Cette attractivité s'est faite aux dépens d'autres pays qui ont vu des multinationales délocaliser leurs activités vers la Chine et autres pays similaires. Toutes ces prouesses sont le résultat des mesures déloyales pratiquées par la Chine. Si les Américains, ou les Européens, ont pris une éventuelle décision d'appliquer la clause de sauvegarde pour freiner les importations des produits du textile-habillement, quen est-il des pays, tel que le Maroc, qui ne sont pas en position de force? Ils vont certes bénéficier de ces mesures, mais leur impact positif ne sera pas ressenti. Ce qu'on observe aujourd'hui dans le secteur du textile pourrait gagner d'autres secteurs. L'État chinois ne va pas continuer à subventionner ce secteur. Par ailleurs, il ne faut pas attendre que les Américains soient menacés pour en tirer avantage. La situation est fort embarrassante, mais les pouvoirs publics marocains sont appelés à prendre le taureau par les cornes parce qu'il y va de l'intérêt des secteurs vitaux pour l'économie marocaine.