Alors que le Projet de loi de finance (PLF) 2020 rentre dans sa dernière ligne droite pour son adoption définitive, l'ONG Oxfam au Maroc publie une note critique dans laquelle elle déplore le manque d'équité dans le Budget 2020. «La politique fiscale, les dépenses et l'affectation des ressources, y compris en matière d'investissement, restent fidèles au modèle développement actuel qui a produit plus d'inégalités», souligne l'ONG. «Au moment où on s'attendait à une restructuration globale et en profondeur de la politique budgétaire dans le PLF2020 après les assises fiscales, malheureusement, ce chantier est une fois de plus reporté», déplore Oxfam. La même source rappelle que le système fiscal constitue un levier central de réduction des inégalités. Il permet dans un premier temps de distribuer les revenus primaires et dans un deuxième temps d'influer sur le devenir des individus en dégageant les ressources pour le financement d'infrastructures et de services publics surtout pour les personnes et dans les zones les plus marginalisées. Or constate Oxfam, les investissements publics qui passent de 18,7 % à 16,3% du PIB en 2020, ne peuvent réduire les disparités sociales, territoriales et de genre. Par ailleurs, les ressources fiscales restent insuffisantes pour réduire les inégalités, et n'enregistrent qu'une croissance insignifiante d'une année à l'autre, malgré les années de croissance économique. «Les recettes fiscales marocaines sont inférieures respectivement de trois et deux points par rapport à la Tunisie et à l'Afrique du Sud. Elles sont en retrait de près de huit points par rapport à la moyenne de l'OCDE. Les pays composant cette dernière disposent d'un système fiscal bien plus performant et moderne», souligne l'ONG. Et d'ajouter : «Au vu de la distribution des revenus, le Maroc reste le pays le plus inégalitaire du Nord de l'Afrique. Ni la croissance continue au cours des vingt dernières années, ni les progrès affichés en termes de réduction de la pauvreté n'ont été suffisants. La montée des inégalités représente d'ailleurs un risque pour poursuivre la lutte contre la pauvreté. La croissance et l'augmentation des richesses semblent d'ailleurs ne bénéficier qu´à un tout petit nombre de personnes très fortunées». Pour Oxfam, le Maroc doit tendre à réduire cet écart et se doter des moyens nécessaires pour financer des politiques publiques plus justes, ambitieuses et redistributives, en instaurant une fiscalité plus progressive, assise sur une assiette plus large. Selon Laroussi Abdeljalil, Responsable de Plaidoyer et Campagnes à Oxfam Maroc, «la justice fiscale est un excellent moyen de cohésion sociale. Elle permet de corriger les inégalités en redistribuant les richesses lorsqu'elles sont mal réparties initialement, et de prélever les ressources nécessaires pour le financement d'infrastructures et de services publics qui profitent à toute la population. L'article 39 de la constitution marocaine de 2011 garantit l'égalité des citoyens devant l'impôt, qui doit être versé en fonction des capacités contributives». Dans ce contexte, Oxfam au Maroc réitère qu'il est «urgent de ramener plus de justice et de lisibilité dans notre système fiscal» en faisant contribuer davantage les plus riches et les grandes entreprises pour protéger les plus précaires.