La Loi organique de Finances, la loi de règlement, l'évaluation à mi-parcours... sont autant d'ingrédients pour avoir une gestion transparente des finances publiques. Pour la mesure de performance, la réforme de la LOF introduira de nouveaux mécanismes de mesure. Pour Noureddine Bensouda, Trésorier général du Royaume, le rôle du colloque sur les finances publiques est de contribuer à la dynamique de réforme que connaît le Maroc. - Finances News Hebdo : Peut-on savoir jusqu'à quel degré la transparence, principale thématique de ce colloque, peut-elle remédier au déficit des finances publiques sachant qu'il est du en grande partie aux facteurs exogènes, comme la faiblesse de la demande étrangère, la hausse des prix des matières premières ... - Noureddine Bensouda : La transparence des finances publiques est un thème qui permet de faire progresser l'évolution démocratique de notre pays. Cette thématique reflète le partage de l'information avec tous les intervenants, notamment avec les deux Chambres du Parlement et, in fine, avec le citoyen dont les représentants sont au Parlement. Toute l'information qui est mise à disposition des citoyens et des parlementaires, avec un acteur majeur qui est la société civile, permet de savoir exactement comment on mobilise les ressources et comment on dépense l'argent de l'Etat. La transparence des finances publiques pose également la question de redistribution sur les prélèvements obligatoires, comment ils sont opérés aussi bien au niveau de l'Etat que des collectivités locales. Et, parfois, au niveau de certains établissements publics qui agissent par des prélèvements ou par des redevances qui permettent de mobiliser toutes les ressources nécessaires au niveau national pour faire face aux dépenses et répondre aux besoins de la population. - F. N. H. : La réforme de la Loi organique des Finances est toujours au stade de projet; mais une fois adoptée comment va-t-elle contribuer à plus de transparence dans la gestion des finances publiques ? - N. B. : Le projet de la Loi organique de Finances (LOF) vise l'amélioration de la performance dans la gestion des deniers publics. Et qui dit performance, dit mécanismes opérationnels et des systèmes afin de mieux la mesurer. Nous avons déjà des systèmes de reporting, notamment au niveau de la dépense ; à titre d'exemple, la gestion intégrée de la dépense, les systèmes de gestion intégrée de la recette... Tous ces mécanismes et ces instruments permettent de faire évoluer cette transparence. Mais, la performance, et c'est un peu le sens de l'évolution constitutionnelle que connaît le Maroc et du projet de la LOF, c'est également de savoir si les politiques publiques atteignent les objectifs escomptés, et cela passe par l'étude des indicateurs d'amélioration ... Pour mesurer cette performance, il faut une sincérité et un contrôle des comptes. Parce que sans ces instruments-là, nous ne pourrons pas évoluer vers des finances publiques de plus en plus claires, transparentes et efficientes. - F. N. H. : Parmi les ingrédients nécessaires à la réussite d'un tel chantier, la loi de règlement a été constitutionnalisée... Jusqu'à quel degré cela participera-t-il à rendre la gestion plus efficiente ? - N. B. : La loi de règlement est un document essentiel dans la mesure où elle est le reflet de ce qui a été fait, de l'exécution de la Loi de Finances et elle a toujours existé dans la Constitution et également au niveau de la LOF. Elle est un instrument important effectivement pour tendre vers plus de transparence puisqu'elle permet d'évaluer exactement ce qui a été réalisé. Comme vous le savez, lorsqu'une Loi de Finances est votée, il existe un plafond de charges et également une autorisation de recettes. Et, en fin d'année, cette loi de règlement permet de rendre compte à ceux qui ont voté la LF, à savoir les conseillers et députés, pour savoir précisément ce qui a été réalisé en matière d'investissement, de masse salariale, de compensation... Cette loi est donc très importante, mais l'une des évolutions importantes également est l'évaluation à mi-parcours. Et c'est ce qui est réclamé aujourd'hui aussi bien par des associations de la société civile que par le Parlement. D'ailleurs, le ministre de l'Economie et des Finances a dû rendre compte au Parlement de l'exécution de la LF 2012 à mi-parcours. - F. N. H. : Toutes ces réformes permettent d'atteindre un point culminant qui va aboutir à une réorganisation des institutions publiques. Comment cela se traduit-il à votre niveau ? - N. B. : En effet, toutes les réformes se traduisent par une réorganisation des structures et en même temps de gestion des ressources humaines. Je citerais à titre d'exemple la révolution qu'ont créée les nouvelles technologies de l'information et qui s'est traduite par une redéfinition des rôles, dans la mesure où certaines tâches ont été supprimées, d'autres ont évolué vers un autre niveau. Et l'un des objectifs de ce colloque est de vulgariser l'importance de la formation générale et en finances publiques pour opérer cette réorganisation. Par exemple, les ordonnateurs, c'est-à-dire les ministères dépensiers, vont devoir s'adapter au projet de la Loi organique de Finances qui va les rendre de plus en plus responsables, puisque les contrôles changent aussi et se situent à plusieurs niveaux, allant du simple contrôle interne jusqu'à celui de la Cour des comptes, par exemple. - F. N. H. : Ce colloque en est aujourd'hui à sa 6ème édition ; il émet des recommandations diverses relatives aux différentes thématiques arrêtées chaque année. Comment contribue-t-il à la dynamique réformiste des finances publiques ? - N. B. : Quand vous regardez la liste des invités, vous constatez qu'il y a là les représentants de toutes les institutions, qu'il s'agisse du Parlement, d'universités ou d'administrations et même d'étudiants. L'idée majeure est de tenir une rencontre annuelle de réflexion, de recherche scientifique... Une sorte de laboratoire à idées qui apporte un plus au débat et participe à l'évolution des pensées et des idées contribuant ainsi aux réformes ne serait-ce que par le débat et les échanges sur des sujets d'actualité. Surtout à la veille de la préparation de la Loi de Finances. C'est devenu un rendez-vous incontournable pour lancer le débat sur les finances publiques pour que tout un chacun apporte sa contribution à la dynamique actuelle sur le plan national. Et nous avons la chance d'accueillir pour l'occasion d'éminents professeurs, des experts et des hommes politiques venus d'ailleurs, comme le vice-président du Sénat français. Lors de la précédente édition, le président de la Cour des comptes français est venu en personne pour faire un témoignage et une analyse relative à la cohérence des finances publiques, thème du colloque de 2011. Ce genre d'initiative permet d'évaluer les expériences aussi bien marocaine et qu'étrangère et d'évoluer vers des modèles encore plus performants. Dossier réalisé par S. E. & I. B.