En dépit de la baisse du taux intermédiaire de l'IS, certains opérateurs estiment que la fiscalité est encore lourde pour les entreprises. La logique de deux poids deux mesures semble prendre le pas dans la politique fiscale actuelle, avec l'instauration de la CSS pour les grandes entreprises et la non mise en place de l'impôt de solidarité sur la fortune.
Chaque année c'est quasiment le même rituel. Les yeux sont braqués sur la mouture du projet de Loi de Finances qui sera soumise à l'approbation du Parlement. L'enjeu est de taille, car la Loi de Finances constitue un puissant levier de développement et traduit les politiques économique, sociale, fiscale et environnementale de l'Etat. Le volet fiscal de l'entreprise, créatrice de richesse et d'emplois, revêt une importance cruciale. Et avec la nomination du nouveau ministre de l'Economie et des Finances, Mohamed Benchaâboun, le discours officiel est visiblement orienté davantage vers le soutien des PME et TPE, qui traversent une période difficile (allongement des délais de paiement, conditions d'accès difficiles au financement et aux marchés publics, etc.). La question à se poser d'emblée est de savoir si la volonté gouvernementale de donner un coup de pouce aux PME/TPE se traduit dans les faits. Une lecture des mesures fiscales afférentes aux entreprises, contenues dans le PLF 2019 qui sera soumis au vote du Parlement, permet de répondre à cette interrogation.
Les mesures-phares : qu'en déduire ? Parmi les dispositions fiscales du PLF 2019 adoptées par le Conseil du gouvernement, il y a la contribution sociale solidaire (CSS) de 2,5% pour les entreprises qui réalisent un bénéfice net supérieur à 40 millions de DH. En d'autres termes, ces sociétés, qui s'acquittent de l'impôt sur les sociétés (IS) au taux marginal de 31%, devront en plus passer à la caisse pour la contribution sociale solidaire. Dans une société où le maintien de la cohésion sociale est nécessaire, la promotion de la solidarité par le biais de la fiscalité est parfaitement légitime, mais celle-ci ne doit aucunement occulter le débat de fond sur l'incapacité du gouvernement à élargir l'assiette fiscale, en raison, entre autres, de l'importance de l'informel. De même, cette nouvelle disposition renforce le sentiment de l'instabilité du système fiscal, avec les changements de taux récurrents de nature à ne pas favoriser une bonne visibilité pour les opérateurs économiques. N'y aurait-il pas une logique de deux poids deux mesures dans la politique fiscale actuelle, avec l'instauration de la CSS pour les grandes entreprises et la non mise en place de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) ? En tout état de cause, un faisceau d'indices le prouve. D'autant plus qu'une poignée d'entreprises paie la grande partie de l'IS, qui s'est chiffré à un peu plus de 50 milliards de DH en 2017. Dans le même ordre d'idées, la cotisation minimale (contribution calculée sur le chiffre d'affaires en cas de perte) passe de 0,5% à 0,75%. Ce qui ne sera pas sans impact négatif pour les petites entreprises et celles de taille intermédiaire. Néanmoins, l'une des bonnes nouvelles qu'apporte le PLF 2019 pour le tissu entrepreneurial national, est la baisse du taux intermédiaire de l'IS pour les entreprises réalisant un bénéfice net compris entre 300.001 et 1 million de dirhams. Celui-ci passe de 20 à 17,5%. «La baisse de ce taux intermédiaire est une bonne chose. Les entreprises qui réalisent cette tranche de bénéfice net sont dans une phase où chaque dirham compte pour l'investissement à même de promouvoir leur essor», fait remarquer un chef d'entreprise et ancien vice-président de Commission du patronat marocain, tout en laissant entendre que le gouvernement peut faire encore mieux pour réduire la pression fiscale qui pèse sur les entreprises. ■
La Tunisie améliore sa compétitivité fiscale Le rétablissement de la CSS a lieu dans un contexte régional assez particulier. En effet, le projet de Loi de Finances pour l'année 2019 de la Tunisie propose une forte réduction du taux d'imposition sur les sociétés. Celui-ci passera de 25% à 13,5%, notamment pour les sociétés évoluant dans les secteurs des industries manufacturières et ceux des technologies de l'information. L'objectif recherché par le gouvernement tunisien est de doper la compétitivité des entreprises opérant en Tunisie, tout en rendant le pays plus attractif aux yeux des investisseurs.