- Les dirigeants d'Apple, Google ou Twitter interdisent l'utilisation du digital à leurs enfants. - Certains établissements marocains vantent une pédagogie «connectée».
Il y a quelques semaines de cela, les géants de la tech ont connu un flux de désengagement massif des utilisateurs. Les chiffres présentés à Wall Street par ces géants montrent, en tout cas, une saturation en termes d'audience. Ainsi, pour la première fois de son histoire, le nombre d'utilisateurs actifs de Facebook en Europe a baissé. Le groupe de Mark Zuckerberg a perdu 3 millions d'utilisateurs sur le Vieux continent entre le premier et le deuxième trimestre 2018. Snapchat, également en panne d'abonnés, en a perdu 3 millions en trois mois. Relativement moins affecté, Twitter a vu le nombre de ses utilisateurs mensuels baisser d'un million entre avril et juin. Sur le marché, la réaction a été violente, les cours de Bourse de Facebook, Twitter et de Snapchat se sont effondrés. Face à cette baisse de régime, chacun brandit ses arguments : introduction de la nouvelle réglementation sur la protection des données (RGPD) pour Facebook, suppression de faux comptes pour Twitter, ou encore un nouveau design mal accepté pour Snapchat. Au-delà de ces raisons spécifiques, pourquoi trois des réseaux sociaux les plus populaires n'arrivent plus à séduire de nouveaux utilisateurs ?
Les jeunes de moins en moins séduits
A cette question, on ne peut apporter de réponse précise. Mais une étude récente atteste que l'usage de Facebook chez les jeunes Américains a baissé. Chez les 12-17 ans, la baisse a été de 9,9%, soit 1,4 million d'utilisateurs perdus. Y a-t-il une prise de conscience des parents du risque d'utilisation abusive des smartphones chez les enfants ? Certainement. En tout cas, les cadres des grandes entreprises de la Silicon Valley, mieux avertis sans doute des éventuels effets néfastes des réseaux sociaux, ne permettent pas à leurs enfants de passer trop de temps sur leurs objets connectés. «A la maison, nous limitons l'utilisation des gadgets technologiques» déclarait Steve Jobs en 2010. Etonnant ? Pas tant que ça. Les cols blancs de la Silicon Valley préconisent de plus en plus un enseignement sans technologie pour leurs progénitures : pas d'écrans en vue, que des livres, du papier et des crayons, dans des écoles complètement déconnectées, comme c'est le cas de la WaldorfSchool of the Peninsula, au cœur même de la Silicon Valley.
Les établissements marocains à contrecourant
Au Maroc, ce n'est pas le même son de cloche, certaines écoles prônent un modèle d'enseignement «connecté», en introduisant des écrans en salles de classe (tablettes, ordinateurs et autres gadgets technologiques…). Certains établissements ont d'ailleurs exigé pour cette rentrée scolaire, l'achat de tablettes et d'ordinateurs parallèlement aux fournitures classiques. Une facture salée qui s'ajoute aux lourdes charges de la rentrée. C'est le cas du groupe scolaire Louis Massignon, qui a récemment souhaité généraliser un plan numérique appelé «Moodle» aux classes de CM1, 5ème et seconde pour l'année scolaire 2018-2019. Un projet qui a suscité une vague d'indignation de la part des parents, qui se retrouvent contraints d'acquérir un outil «pédagogique» très coûteux. Pis encore : le même établissement a envoyé un acte d'engagement irrévocable aux familles d'élèves, dans lequel ils s'engagent à payer 12.400 DH pour les classes de seconde, et 6.400 DH pour le CM1 et classes de 5ème pour l'acquisition d'un matériel informatique, lequel devra être changé au bout des trois ans d'utilisation. Indignés par cette réforme, les parents ont fait part, via une lettre ouverte, de leur mécontentement à la direction de la mission laïque française. L'institut a finalement abandonné le projet en question. Le digital a un certain potentiel pour améliorer la qualité et la portée de l'éducation. Mais il peut être tout autant contreproductif, comme en atteste une étude de l'OCDE sur l'éducation numérique, qui stipule qu' «en moyenne, au cours des dix dernières années, les pays qui ont consenti d'importants investissements dans le digital dans le domaine de l'éducation n'ont enregistré aucune amélioration notable des résultats de leurs élèves en compréhension de l'écrit, en mathématiques et en sciences», sans parler du niveau d'orthographe et d'écriture. A méditer. ■
La France interdit le smartphone à l'école Tout récemment en France, dont le Maroc s'inspire si souvent, le Parlement a entériné l'interdiction du téléphone portable dans les écoles et les collèges, faute de pouvoir bloquer les applications non-scolaires. Selon le ministère de l'Education, cette interdiction «favorisera un environnement qui permet l'attention, la concentration et la réflexion indispensables à la compréhension et à la mémorisation». Par ailleurs, «sur les temps de récréation, cette interdiction permettra de renforcer les échanges entre les élèves afin de construire une sociabilisation harmonieuse, essentielle au développement des enfants».