La procédure d'indemnisation en cas de sinistre corporel traîne durant des années dans les tribunaux en cas de recours à la procédure judiciaire. Les sinistrés préfèrent s'en remettre à la justice malgré la lenteur de cette démarche. Chacun de nous peut être ou a déjà été victime d'un accident d'automobile. Piéton, cycliste, motard, passager d'un véhicule ou conducteur, nul n'est épargné par les multiples dangers de la route. Malgré la mise en application du nouveau code de la route en 2010, les chiffres ne rassurent pas. D'après les données provisoires, le nombre d'accidents en 2011 a connu une légère hausse comparativement à l'année précédente. En effet, le nombre d'accidents corporels est passé de 65.461 en 2010, ayant causé la mort de 3.778 personnes et engendré 11.414 blessés graves et 87.618 blessés légers, à 68.855 accidents corporels en 2011 avec 4.066 morts, 12.495 blessés graves et 90.027 autres blessés légers. La grande partie des dossiers de sinistre est transmise aux différentes compagnies d'assurance marocaines chargées de l'indemnisation des sinistres matériels et corporels. L'assurance de la responsabilité civile automobile ayant été rendue obligatoire par le législateur marocain depuis un siècle, tout dommage corporel causé par un véhicule terrestre à moteur est intégralement indemnisé. Le problème qui se pose concerne le versement des indemnisations aux assurés en cas de sinistres corporels. Et la question qui se pose d'emblée est : à quoi est dû ce retard ? Le remboursement des indemnités par les compagnies d'assurance est une procédure longue et complexe qui requiert beaucoup de patience de la part des victimes, notamment pour ceux ayant opté pour l'action judiciaire. En effet, en cas de dommage corporel, les victimes ont deux solutions. Soit choisir la transaction directe avec la compagnie d'assurance, à savoir l'entente à l'amiable, soit recourir à la justice. Souvent, les victimes sont face à une impasse entre le choix de la procédure la plus courte avec des indemnités qui sont inférieures aux dégâts réels, et la procédure judiciaire qui risque de durer des années. Selon Bachir Badoo, Directeur général de la Fédération Marocaine des Sociétés d'Assurance et de Réassurance (FMSAR), «les retards n'incombent pas aux entreprises d'assurance, mais aux victimes qui choisissent systématiquement d'aller devant la justice pour faire valoir leurs droits». Le choix d'aller devant les tribunaux peut être drastique, surtout pour les personnes ayant besoin d'un traitement ou d'un suivi coûteux, ou pour les personnes avec incapacité physique permanente (IPP). Et pour cause, la moyenne de traitement des dossiers des sinistres corporels par les tribunaux est de 4 ans et peut aller jusqu'à 10 ans, voire plus. Et pourtant, la majorité des sinistrés a recours à la voie judiciaire qui leur assure une indemnité bien supérieure à celle proposée par les compagnies d'assurance en cas de transaction à l'amiable. Quand la justice s'en mêle ! La lenteur de la procédure est due en partie au système judiciaire. D'après un fonctionnaire au sein d'une cour d'appel, en plus du manque d'effectif, les tribunaux sont confrontés à la problématique du transfert des convocations aux compagnies d'assurance. A rappeler que cette tâche au sein des tribunaux incombe à l'huissier de justice qui est payé par l'avocat de la victime pour faire exécuter cette démarche. Tous les dossiers des sinistres matériels et corporels ne sont pas traités directement par les agents ou les courtiers d'assurance, mais sont transférés aux compagnies d'assurance qui siègent dans la capitale économique. Par conséquent, le problème se pose au niveau des convocations en provenance de tous les tribunaux du Maroc qui atterrissent au tribunal de première instance de Casablanca pour être adressées aux compagnies d'assurance. Or, si l'huissier du tribunal de première instance n'est pas payé, les convocations ne parviendront pas à leurs destinataires, ce qui retarde énormément la procédure. D'après Saïd Naoui, avocat au Barreau de Casablanca, doctorant en droit et agréé près la Cour de cassation, «malgré les efforts entrepris par certains juges pour réduire les délais de traitement, leurs efforts restent modestes à cause du manque de moyens qui entache nos tribunaux». D'autre part, une fois la procédure judicaire achevée, les dossiers de remboursement des sinistres corporels restent des mois, voire des années dans les tiroirs des compagnies pourtant, d'après les derniers chiffres publiés par la FMSAR, le chiffre d'affaires de la branche automobile pour l'ensemble des compagnies d'assurance s'élève à 7.531 MDHen 2011. Cherchez l'erreur ! Dossier réalisé par L. Boumahrou