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Grand débat : «Il faut lutter contre les exonérations fiscales indues»
Publié dans Finances news le 04 - 11 - 2011

- Le PPS croit en la gauche et la Koutla et entamera la campagne électorale avec un vaste programme.
- Un programme qui place la dignité du citoyen au cœur de ses priorités.
- Abdelahad Fassi-Fehri et Abdeslam Seddiki, membres du Bureau politique du parti, reviennent sur quelques mesures phares préconisées.
* Finances News Hebdo : Après le Plan d'intégration de la femme, aujourd'hui, il est question de légaliser l'avortement, comme évoqué par la ministre PPS Nouzha Skalli. Est-ce là un simple hasard du calendrier ?
* Abdelahad Fassi-Fehri : Il n'y a pas une volonté délibérée de créer la sensation ou de provoquer un effet d'annonce qui pourrait entraîner une appréciation positive de la part de la population. Mais il faut savoir que le plan d'intégration de la femme a eu le mérite de soulever un certain nombre de questions fondamentales concernant la place de la femme dans le processus de développement. Entre autres, le processus de l'égalité homme/ femme. Et il est vrai que dans cette société, sous certains aspects, on reste assez patriarcal avec parfois une prégnance du religieux, mais il y a d'autres aspects positifs où l'on reste parfois conservateurs.
Malgré cela, la question de la femme est une question fondamentale et, à l'époque, notre camarade Saïd Saadi a eu le courage et la force de mener une action de concertation et de coopération avec la société civile, et de poser ce problème avec la vigueur nécessaire. Cela avait provoqué tout un débat dans la société marocaine. Le problème a été par la suite tranché grâce au concours royal qui a joué un rôle d'arbitrage positif. Finalement, la réforme de la Moudouwana a repris fondamentalement bon nombre de points contenus dans le Plan d'intégration de la femme et, depuis, nous disposons d'un arsenal pour construire cette lutte pour l'égalité homme/femme sur de meilleures bases.
* F. N. H. : Pour la légalisation de l'avortement, bien sûr, cette question a toujours été un tabou…
* Abdeslam Seddiki : Je dirais qu'il faut d'abord s'entendre sur l'appellation. Il est préférable de parler d'IVG (Interruption volontaire de grossesse). Parce que l'avortement est politiquement et socialement impropre.
* Fassi-Fehri : Il faut créer le débat autour de cette question. Les déclarations de Nouzha Skalli ne tendent pas vers une légalisation tous azimuts, mais vers un recours à l'IVG dans des conditions bien particulières, notamment quand la vie de la mère est en danger ou quand cette grossesse a eu lieu suite à des conditions bien spécifiques. Il s'agit donc de bien réfléchir à ces circonstances particulières. Et là, à mon avis, il n'y a aucune recherche d'effet d'annonce; c'est un vrai problème social dans la société marocaine qui a été soulevé. Et il serait très hypocrite de détourner le regard face à un phénomène pareil.
* Seddiki : Nous n'attendons pas les élections pour aborder les problèmes délicats, nous le faisons au moment opportun. Par exemple, la question des enfants nés en dehors des liens du mariage a été soulevée par la société civile dont nous sommes à l'écoute. Et nous travaillons de façon complémentaire. Je ne pense pas qu'il soit opportun de faire de ce dossier un point de fixation à la veille des élections, sachant que les attentes des masses populaires ne se résument pas uniquement à cela.
Nous avons d'ailleurs cerné les problèmes des populations, et comme nous ne pouvons pas aborder tous les problèmes dans une campagne électorale, nous avons établi des priorités. Et personnellement, je ne pense pas que la question de la légalisation des IVG soit une priorité. Et ce, d'autant plus que cette question a été abordée dans le cadre du ministère et non pas du parti. Et nous avons de tout temps gardé, en tant que parti, une certaine distance idéologique et de veille vis-à-vis des ministères et du gouvernement, même si nous y sommes. Le parti a sa propre autonomie, ses propres structures et ses propres analyses de la situation…
* F. N. H. : Vous avez évoqué le fait que le parti a établi un certain nombre de priorités. Peut-on savoir lesquelles ?
* Seddiki : D'abord, la satisfaction des besoins fondamentaux de base de la population et le respect de la dignité du citoyen. Vient ensuite la lutte contre toute forme de dépravation, qu'elle soit politique ou économique. Tout cela doit être accompagné d'un processus audacieux pour mettre notre économie sur un sentier vertueux de la croissance, parce que sans croissance, on ne peut rien réaliser.
* F. N. H. : Justement, comment provoquer cette croissance ?
* Seddiki : La croissance est la question prioritaire dans notre programme économique. Nous proposons un certain nombre de mesures fondamentales en partant de l'existant, puisque nous considérons que le Maroc a fait des efforts et que certaines actions ont été réalisées dans cette perspective, notamment des programmes sectoriels diversifiés. Le pays a également progressé sur le plan des infrastructures. Nous considérons que ces programmes sont utiles, mais il leur manque la cohérence et la convergence.
Donc, la première des choses à faire est la relecture et la révision de ces différents programmes en mettant le social au centre de la démarche. Pour notre parti, en tant que Parti du progrès et du socialisme, nous considérons que l'économique doit être avant tout au service de l'homme et doit avoir comme finalité la satisfaction des besoins fondamentaux de la population.
Deuxièmement, il faut prendre des mesures de lutte contre l'économie de rente et il est fondamental d'instaurer les règles de la concurrence.
Troisièmement, il faut mettre en place des mesures incitatives en faveur des TPE et des PME. Vous n'êtes pas sans savoir que ce sont ces structures qui innovent davantage, qui créent de l'emploi…
Le quatrième point est qu'il faut renforcer le secteur public. Pour nous, l'Etat doit être présent non seulement en tant que simple régulateur, mais aussi comme acteur de la croissance, notamment en tant qu'investisseur avec ses structures nationales et régionales. Dans ce sens, permettez-moi de vous dire que le PPS dispose de mesures concrètes concernant la régionalisation.
L'autre volet important pour créer de la croissance est l'instrument fiscal. Dans ce sens, il est impératif d'inciter les entreprises à réinvestir leur profit au lieu de distribuer des dividendes. Pour ce faire, nous proposons de réduire par exemple l'IS de 30 % à 20% pour les entreprises qui réinvestissent leur profit. D'autres propositions vont également dans ce sens, notamment la facilitation des procédures, l'amélioration du climat des affaires… Mais, le problème fondamental est la lutte contre la corruption.
Nous avons un taux de croissance de 4 à 5 %, mais la répartition du PIB est des plus inégalitaires dans le monde. Les chiffres du HCP font ressortir que 56 % du PIB vont au revenu du capital, 33% aux fonctionnaires de l'Etat et du public, et 11 % sont des recettes fiscales. C'est injuste de garder cette répartition qui est une bombe à retardement. Et ce n'est pas par hasard que nous voyons la pauvreté, la précarité et la marginalité chez une large partie de la population.
* F. N. H. : Concernant les mesures en faveur des TPE et des PME, cela vous semble-t-il réalisable dans un contexte où l'Etat est en train de faire la chasse aux dépenses fiscales pour justement renflouer ses caisses. Comment pensez-vous procéder ?
* Fassi-Fehri : La question fiscale est majeure dans notre programme, avec deux idées clés. D'abord, la fiscalité doit servir à encourager l'investissement. Donc, certaines mesures devront être prises pour pénaliser et sanctionner tout ce qui a trait à l'économie de rente, la spéculation…
Ensuite, la fiscalité doit être un élément fondamental de redistribution des revenus. Et, les économistes le savent bien, plus un système est équitable, plus il est rentable, donc les recettes sont plus importantes.
En prenant comme exemple l'IR, nous sommes pour que le plafond des basses tranches exonérées soit élevé à 4.000 DH. Par contre, pour les revenus très élevés, il faut un agrandissement fiscal de sorte que chacun paye en fonction de ses revenus.
Même chose pour la TVA : nous sommes pour une diminution, voire une suppression de la TVA sur les produits de première nécessité, notamment les médicaments, les produits et les services de base. De même, les produits de luxe méritent d'être taxés de manière substantielle.
Globalement, il s'agira de lutter contre les exonérations fiscales indues, ce qui suppose une réévaluation totale du système d'exonération. C'est un vaste chantier.
Bien sûr, il ne faut pas décourager l'investissement. Mais il est normal que les plus aisés mettent la main à la poche par solidarité, par citoyenneté. Et dans notre programme, il y a un appel à cette solidarité, surtout dans ce contexte de crise mondiale …
* F. N. H. : Par ailleurs, qu'est-ce que vous proposez pour assurer plus de cohérence entre les différentes stratégies sectorielles ?
* Fassi-Fehri : Nous pensons que le fait que certains secteurs se soient dotés de plans est une chose positive, puisque cela donne de la visibilité. Mais nous avons trois critiques : la première est le mode d'élaboration qui souffre d'un déficit de concertation au sein même du gouvernement. Le deuxième reproche est que chaque ministère a travaillé de manière isolée. Il est invraisemblable, par exemple, de faire une stratégie de l'eau indépendamment de la stratégie agricole ! Il y a donc un manque de cohérence et de complémentarité et, pour y remédier, nous proposons de réhabiliter la mission de planification de l'Etat.
La troisième critique a trait, entres autres, au Plan Maroc Vert : nous proposons de mettre la question sociale au cœur de la révision de ce plan.
* F. N. H. : Qu'entendez-vous par la question sociale ?
* Fassi-Fehri : Le Plan Maroc Vert a certes des atouts. Il vient avec de la visibilité et place l'agriculture comme moteur de développement où il faut attirer de l'investissement privé.
Mais, il y a deux piliers sur lesquels il faudra travailler : d'abord, attirer l'investissement privé dans la grande agriculture, et le deuxième étant la petite agriculture. A notre avis, il faut rééquilibrer les efforts entre ces deux piliers. Le premier est très prédominant par rapport au second et je pense que le gouvernement s'en était rendu compte. D'ailleurs, certains financements externes ont été réorientés à la valorisation du deuxième pilier afin de rectifier le tir. Mais il faut un rééquilibrage plus important.
L'autre point important concerne les marchés interne et externe. En effet, on ne peut pas mettre en place un Maroc vert sans mettre la sécurité alimentaire au cœur de ce plan. Aujourd'hui, avec la flambée des prix, la facture alimentaire pèse très lourdement sur la balance commerciale.
Troisième point : c'est bien d'attirer l'investissement privé dans l'agriculture, mais il n'est pas question que ces investisseurs privés considèrent la population des travailleurs agricoles et les petits producteurs comme une main-d'œuvre corvéable.
Donc, cela vaut aussi bien pour Maroc vert que pour tout autre programme : l'emploi doit être créé dans des conditions dignes, avec tous les droits qui vont avec.
De manière générale, il faut procéder à la révision de ces plans pour maintenir les actions intéressantes et corriger le tir quand cela s'impose. Il ne s'agit nullement d'y renoncer, mais de les réorienter dans le sens d'une meilleure prise en compte de la question sociale.
* F. N. H. : Ne pensez-vous pas que le processus électoral favorise l'incohérence puisqu'il ne permet pas l'émergence d'une majorité. C'est-à-dire que le gouvernement est composé de plusieurs formations politiques n'ayant pas toujours le même programme…
* Fassi-Fehri : Il y a beaucoup de choses à dire concernant cette observation. Tout d'abord, très souvent, quand on parlait de cette insuffisance de coordination, on se cachait derrière le fait que le Premier ministre n'avait pas la maîtrise de l'ensemble des ministères. Avec la nouvelle Constitution, cet argument ne tient plus la route. Aujourd'hui, il s'agira de se doter d'un chef de gouvernement qui a la responsabilité de l'ensemble de son équipe et, par là, de l'ensemble de la politique publique.
Par ailleurs, il y a une réalité : aujourd'hui, aucun parti, voire deux ou trois partis ne constitueront pas une majorité. Le prochain gouvernement sera un gouvernement de coalition. Il faut souhaiter que ce soit une coalition homogène sur la base de programmes annoncés avant les élections. Et cette coalition devra se faire sur la base du même projet de société. Et puis, c'est aux citoyens de donner la force électorale au parti qui propose un programme qui est le plus proche de leurs aspirations.
Pour ce qui est de l'éclatement et de la multiplicité des partis, certes, c'est une réalité. Mais, il ne faut pas exagérer non plus, puisque sur les 35 partis, il y en a 10 ou 12 qui ont une présence et une histoire.
* F. N. H. : En évoquant les alliances, quelle est votre appréciation de la coalition des huit ?
* Fassi-Fehri : A mon sens, chacun est libre de s'unir à qui il veut : on ne peut pas contester la liberté des partis, mais on ne peut pas s'empêcher de dire que c'est une tentative de réintroduire de manière dissimulée le PAM. Ce parti a été, en effet, sérieusement mis en cause cette dernière période à cause de pratiques que le peuple marocain n'a pas acceptées. Avec les quatre qui se sont mis ensemble au départ, il y avait une certaine cohérence à tendance libérale. Mais, quand on amène un parti islamiste, un autre de gauche…, il faut se poser des questions.
* F. N. H. : Il y a aussi la Koutla …
* Fassi-Fehri : Elle a certes ses faiblesses. Je ne dirais pas qu'elle a la légitimité historique mais, quand même, elle réunit des partis de combat, à savoir le PPS, l'Istiqlal et l'USFP. Imaginez qu'en 1998, lorsqu'est venu le gouvernement de l'alternance, est-ce qu'on aurait pu faire les mêmes avancées au Maroc avec ceux qui étaient là depuis 20 ou 30 ans ?
Feu Hassan II avait compris cela et c'est la Koutla qui est venue et qui a donné une crédibilité à tout le processus de réformes. Et, aujourd'hui encore, sur certains objectifs fondamentaux, elle a encore un rôle à jouer. En tout cas, nous, nous nous battons pour ce bloc. Certes, il y a beaucoup d'insuffisances peut-être (c'est une autocritique que nous faisons), mais je pense que cette coalition a un rôle important à jouer.
4 F. N. H. : Qu'en est-il du PJD ? Quel regard portez-vous sur ce parti ?
* Fassi-Fehri : Là aussi, il faut avoir une appréciation objective. Nous avons une opposition fondamentale en terme de projet de société avec ce parti, mais on ne peut pas ne pas constater que récemment, le PJD a eu une attitude positive concernant le Mouvement du 20 février : il est certes resté à l'écoute des revendications, mais sans chercher à les exploiter politiquement ou à mettre de l'huile sur le feu. Il a également fait campagne pour la nouvelle Constitution.
Et avec toutes les réserves qui nous séparent, force est de constater que le PJD est une force existante sur la scène politique qui joue un certain rôle en terme de stabilité du pays. Et ça, on ne peut pas ne pas le souligner. Ne concluez pas qu'on fera alliance avec ce parti, mais nous sommes dans une logique objective !
* Seddiki : L'option d'un rapprochement avec le PJD n'est pas posée parce que le PPS, c'est d'abord la gauche et la Koutla qui sont ses alliances fondamentales et prioritaires. Et cela se décide au niveau du congrès du parti. D'ailleurs, ce mercredi (NDLR : 2 novembre) sera annoncé notre programme commun avec la Koutla qui se prévaut de démocrate progressiste.
* F. N. H. : Mais comment est gérée la distribution des portefeuilles ministériels ? Et comment se fait-il que le PPS n'a jamais eu de ministères stratégiques, notamment les finances ?
* Seddiki : Nous sommes un parti très fort en termes de capacité d'analyse, d'influence, de propositions… Mais nous n'avons pas encore pu transformer comme il se doit cette force politique et intellectuelle en potentiel électoral. Surtout au regard du déroulement des élections. Je ne vais pas vous étonner en vous disant qu'il y a des partis qui n'ont même pas d'existence sur le terrain et, comme par hasard, ils se retrouvent avec 40 ou 50 sièges au Parlement.
Nous, nous travaillons de manière militante et nous n'avons pas ce qu'on appelle «moul chekkara».
* F. N. H. : Pour revenir au programme économique du PPS, que préconisez-vous concernant la réforme de la compensation ?
* Seddiki : Il faut inscrire la réforme dans une démarche progressive. Il faut, premièrement, passer en revue chaque produit séparément pour trouver la solution idoine. Par exemple, l'idée qui figurait dans le projet de Loi de Finances de surtaxer les grosses cylindrées qui consomment le plus de carburant, il aurait été intéressant de la garder, puisque les grosses cylindrées bénéficient ainsi d'une large partie de la subvention et doivent payer un peu plus.
Pour ce qui est du sucre, on sait qu'une grande partie est consommée par l'industrie : alors on sait où aller récupérer la subvention. Idem pour la farine : là aussi, il faut assainir le circuit de distribution et mettre fin à l'intermédiation.
Reste le problème épineux du gaz butane parce que le pauvre consomme une bonbonne de butane par mois, tandis que le riche une par semaine. Qui plus est, le butane est aujourd'hui utilisé dans les fermes pour l'irrigation. Mais, sincèrement, priver le monde rural de la subvention du butane sera criminel, parce que les gens vont se rabattre sur le bois de forêt. Il s'agira plus de rationaliser la distribution.
En gros, pour mener la réforme, il faut juste de la volonté et du courage politiques. Propos recueillis par Imane Bouhrara
Fortune et droit sur la succession
Seddiki : Il y a des tranches à fixer concernant les grandes successions. Il est normal qu'une personne qui hérite d'une fortune colossale paye un droit à l'Etat. Il s'agit plus d'une question de moralisation de la vie publique. Si l'on introduit l'impôt sur la fortune, l'impôt sur la succession, plus tout ce qui est relatif à la justice sociale, c'est pour inciter au paiement des impôts.
Pourquoi faire des prélèvements à la source, même pour de petits salaires, et laisser certaines personnes ayant des fortunes colossales sans contribution aux efforts de développement du pays via le paiement d'impôt, ne serait-ce que par solidarité ?
Fassi Fihri : Je pense que nous avons aujourd'hui besoin de signaux forts dans le sens d'une contribution à la solidarité nationale. Il ne faut pas aller vers la spoliation ou la privation des gens de leurs biens; il n'en est pas questions, mais quand même, nous avons besoin que tout le monde accepte de participer à cette solidarité nationale. A quand la Loi de Finances 2012 ?
Seddiki : Le problème de la Loi de Finances est inédit et n'a pas été prévu dans le calcul de l'agenda fixé pour les élections. Le gouvernement a préparé le projet de loi et la balle est dans le camp du Parlement. Or, logiquement, le Parlement actuel n'est pas en mesure de se pencher sur le projet de Loi de Finances. En effet, à moins d'un mois des élections, la plupart des parlementaires étant en campagne, la discussion de cette loi sera reportée après les élections.
Le scénario que je préconise est le suivant : le Roi va désigner, le 26 novembre, un chef du gouvernement. La nouvelle Constitution ne précise pas de délai de formation du gouvernement, mais, dans le meilleur des cas les tractations vont demander un mois. On sera déjà fin décembre. Le gouvernement devra ensuite préparer sa déclaration pour avoir l'investiture. Si l'investiture est votée par le Parlement, le gouvernement adopte l'actuel projet de Loi de Finances ou la considère comme non conforme à sa déclaration; auquel cas, il devra préparer une Loi de Finances rectificative. Entre temps, la Constitution donne au gouvernement les moyens juridiques pour expédier les affaires courantes sur la base de l'article 75. Tout cela devrait prendre un mois. Donc, il faut espérer avoir la Loi de Finances 2012 fin janvier. A mon sens, c'est le scénario le plus plausible.
Et puis, il faut également s'occuper au plus vite de la loi organique des Finances.
Lutte contre la précarité
Seddiki : Quand on a un million de foyers qui vivent dans la précarité, 70% habitant en milieu rural, dont une bonne partie est gérée par des femmes sans ressources, qui plus est chefs de ménage; quand on a 400.000 enfants qui abandonnent l'école; quand les enfants de la rue se comptent par centaines de milliers et que les mendiants sont estimés entre 200.000 et 500.000 personnes; quand on a 66% des salariés qui sont des travailleurs précaires; quand le SMAG est à peine de 60 DH par jour; quand on a un million et demi de personnes handicapées …, on ne peut pas ne pas avoir un plan audacieux inclusif pour intégrer ces personnes-là dans la vie nationale.
Il ne s'agit pas de distribuer des revenus à tort et à travers, mais il faut un revenu de dignité pour que les gens assurent leur subsistance. Donc, on propose un revenu de 1.000 DH pour ces foyers en précarité, par exemple. Il s'agit d'une aide ciblée. Quitte à critiquer le système libéral, la croissance crée des phénomènes d'exclusion et de pauvreté.
Il faut mettre en place des politiques sociales pour corriger les dommages collatéraux de la croissance, et il faut des pendants régionaux à ces politiques.
Concernant la classe moyenne et afin de préserver son pouvoir d'achat, l'accent doit être mis sur l'accès au logement. Si l'Etat fait un effort à ce niveau-là, il soulagera énormément la classe moyenne.


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