La libéralisation effective du champ audiovisuel signifierait-elle la création dun espace non-étatique ? À lire les dispositions de la Loi n° 77/03, ce ne sera pas le cas, du moins au niveau formel des opérateurs qui sont appelés à y exercer de nouvelles missions. Au lieu dêtre élargi, le processus de libéralisation du secteur audio-visuel a été plutôt «soucieux» de la situation de nos deux chaînes nationales. La Loi sur la communication audio-visuelle impose certes une couverture du secteur, mais elle na manifestement pas bien précisé la fin du monopole de lEtat en la matière. Étant actuellement sous forme «bipolaire», avec les deux chaînes nationales, le paysage a vu la RTM subir des changements qui se sont avérés, en fin de compte, purement formels. La RTM et le SAP (Service Autonome de Publicité) vont se transformer en une société de participation nommée la SNRT (Société Nationale de Radiodiffusion et Télévision). Ses tâches ne vont pour autant pas changer. Non seulement «lEtat va conserver lensemble de son capital», mais la nouvelle SNRT sera dotée d«une mission de service public». Le service à vocation publique de la SNRT Cette concentration du capital entre les mains de lEtat, doublée des prérogatives que confèrent les missions de service public à la SNRT, laisse présager difficilement un débat réel sur la libéralisation de lespace audiovisuel. Même sil est tôt pour prévoir le climat de la concurrence et les chances des autres concurrents de grignoter des parts de marché en matière de publicité, on peut néanmoins émettre quelques remarques. La première est dordre légal. Elle concerne le paiement de la taxe relative à laudiovisuel et son fondement légitime une fois que plusieurs concurrents seront opérationnels. Le principe même de limpôt est, en effet, discutable du moment quune concurrence saine et loyale suppose lélimination de ce genre davantages. Or, les opérateurs privés appelés à investir dans le champ audiovisuel ne pourront jamais accepter ce genre de subventions «déguisées» au profit dentités ayant la forme privée sans en respecter les règles de fonctionnement. Quid du statut des employés ? La loi nouvelle a promis de respecter, et ce de façon rétroactive, tous les droits acquis des travailleurs. Autrement dit, au-delà de la problématique liée au contenu des émissions de la nouvelle SNRT, cest dabord le statut de ses employés qui ne devrait pas changer. Larticle 47 de la Loi énonce clairement que lobjectif de la création de toute entité publique dans le secteur audiovisuel reste lapplication de la politique de lEtat, accompagné dune vocation de service public. Dun autre point de vue, lunanimité constatée lors du vote de la Loi ne signifie pas quil y a eu une large concertation au sein des professionnels pour que leurs demandes soient prises en considération. Le ministre Nabil Benabdallah a certes précisé que le gouvernement a tenu compte des propositions de la SNPM, mais il a omis de signaler quelles nont été incluses que dans le préambule de la Loi. Autrement dit, leur degré de généralité ne pourrait satténuer quavec des décrets dapplication clairement définis. Le débat parlementaire sur la Loi de la communication audiovisuelle na pas apporté dautres éléments rectificatifs, surtout concernant les compétences accrues dévolues au HACA. La télévision «nationale» a donc été gâtée par la nouvelle législation. Reste à savoir si cette liberté juridique sera capitalisée au profit du téléspectateur marocain