Un éventuel octroi de Statut avancé à la Tunisie boosterait la région du Sud de la Méditérranée. La coopération entre le Maroc et l'UE touche plusieurs domaines vitaux pour notre pays. Il faut une volonté politique et une mise en œuvre de moyens suffisants par les deux parties pour une convergence de l'acquis communautaire. J. Kerdoudi, président de l'Institut Marocain des Relations Internationales, livre son point de vue sur le bilan de coopération Maroc-Union européenne. - Finances News Hebdo : Quel bilan pouvons-nous faire de la coopération Maroc-UE ? Est-ce qu'effectivement le Maroc est le premier bénéficiaire en termes de subventions dans la région du voisinage de l'UE ? - Jawad Kerdoudi : Le Maroc a reçu des dons de 1,8 milliard de dirhams en 2010, et il est prévu dans le nouveau programme de coopération 2011-2013 de porter ce montant à 2 milliards de dirhams par an. Le Maroc est en effet le premier bénéficiaire en termes de subventions dans la région du voisinage de l'UE. - F. N. H. : Dans quelle mesure le plan d'action 2010-2015 permettrait-il des avancées sur le chemin du Statut avancé ? - J. K. : Le plan d'action 2010-2015 ne sera finalisé qu'au cours de cette année 2011. Cependant, un programme de coopération Maroc/UE a été signé en juillet 2010 pour la période 2011-2013, et portera sur 6 milliards de dirhams. Les nouveaux programmes lancés concernent la lutte contre l'analphabétisme, l'agriculture solidaire, le désenclavement rural, l'assainissement et la dépollution. Il est prévu également de lancer en 2011 un programme de développement rural dans la province d'Al Hoceima, et un appui en faveur de l'égalité homme/femme dans tout le pays. La société civile n'est pas oubliée puisqu'il est prévu près de 50 projets, dont 6 concernent la Justice, 5 la liberté d'expression, 4 la lutte contre la corruption, et 3 la démocratie locale et parlementaire. Comme on le voit, la coopération entre le Maroc et l'UE touche plusieurs domaines vitaux pour notre pays. - F. N. H. : L'UE discute aujourd'hui un éventuel Statut avancé avec la Tunisie. Quel sera l'impact de la réalisation d'un tel projet sur le Maroc ? Est-ce que cela ne risque pas de se traduire par une perte de certains avantages pour le Royaume ? - J. K. : On n'a pas à s'inquiéter de l'octroi à la Tunisie du Statut avancé par l'UE. D'abord ce pays frère connaît une situation actuelle très instable, et il faut souhaiter qu'un gouvernement puisse être rapidement mis en place pour le gérer. Ensuite, on ne peut que souhaiter que ce pays puisse également obtenir un Statut avancé par l'UE, lui permettant de progresser économiquement et socialement. Enfin, il n'y aura aucun impact négatif pour le Maroc. - F. N. H. : On a constaté un léger retard de la partie marocaine à faire une proposition à l'UE de ses attentes du Statut avancé, notamment en matière de convergence de l'acquis communautaire. Quels sont, d'après-vous, les types d'obstacles rencontrés lors des consultations entre différents acteurs et partenaires? - J. K. : En effet, l'UE insiste beaucoup en matière de convergence réglementaire avec le Maroc. Il semble, d'après les déclarations des responsables européens, que le rythme n'est pas assez rapide, et ils demandent la mise en œuvre par les autorités marocaines d'un pilotage politique et stratégique. Je pense, pour ma part, que la convergence réglementaire entre le Maroc et l'Union européenne est indispensable pour l'approfondissement du Statut avancé, et pour permettre notamment au Maroc d'intégrer le marché unique européen. Il faut pour cela la volonté politique et la mise en œuvre de moyens suffisants par les deux parties. - F. N. H. : Quel impact pourrait avoir la crise mondiale et celle du Monde arabe sur ce processus dans lequel s'est inscrit le Maroc avec l'UE ? - J. K. : Je pense que la crise du Monde arabe doit pousser l'Europe à accentuer sa coopération avec les pays sud-méditerranéens, pour les accompagner dans leurs efforts de démocratisation politique, et de développement économique et social. C'est vital pour l'avenir de toute la région méditerranéenne. Dossier réalisé par S. Es-siari & I. Bouhrara