Officiellement, il semblerait que l'adoption de l'arabe dialectal dans l'enseignement fondamental marocain fasse partie des recommandations du colloque international organisé autour du thème de l'éducation nationale, des recommandations qui ont été adressées aux plus hautes autorités du pays, en plus du gouvernement et du parlement. Le choix de la darija devrait nourrir des débats passionnés eu égard à la sensibilité de la question de la langue arabe à l'école. Le colloque avait été organisé voici un mois par la fondation Zakoura, dirigée par l'influent homme d'affaires Noureddine Ayouch, et a été marqué par la participation de l'actuel ministre de l'Education nationale Rachid Belmokhtar, quelques jours avant qu'il ne soit officiellement désigné au gouvernement. Les travaux ont porté sur tous les aspects de l'enseignement, dont les choix à effectuer pour les langues d'apprentissage, et on semblerait devoir se diriger vers l'introduction de la darija pour l'enseignement fondamental. Les travaux de préparation du colloque avaient débuté en novembre 2012, avec tout un ensemble de spécialistes qui s'étaient penchés sur le diagnostic des maux de l'éducation et sur les solutions et remèdes à y apporter. Le colloque a été finalement organisé en octobre dernier suite au discours rude du Roi à l'occasion du 20 août, dans lequel le souverain avait établi un jugement acerbe sur la qualité de l'enseignement dans le pays, un « véritable séisme » à travers lequel l'ensemble des tares ont été évoquées par le Roi Mohammed VI. Les ateliers se sont donc intéressés au rôle des corps pédagogiques, mais aussi aux langues d'apprentissage, nationales, et aux langues de l'avenir. Ainsi, on a relevé que les élèves marocains maîtrisant la langue arabe représentent à peine 6% du total des apprenants, et pour le français, le taux baisse à 1%. Il a été donc recommandé d'accueillir les nouveaux arrivants à l'école avec leur langue maternelle afin de ne pas créer en eux une rupture cognitive et aussi pour leur éviter tout écueil dans leur premier « apprentissage à la vie ». Des passerelles devraient être établies entre les deux langues arabes, l'écrite et la parlée, au sein d'écoles expérimentales, avant la généralisation à l'ensemble du système pédagogique. Par la suite, les autres langues seront introduites progressivement, de façon « pragmatique » et économique, dans l'objectif de faciliter l'accès futur au marché du travail. Ainsi, les disciplines scientifiques devront cesser d'être dispensées en arabe, dès le secondaire, avec l'introduction du français à ces niveaux d'enseignement. Ensuite, l'anglais devra être la langue privilégiée pour les matières scientifiques et techniques, avec une plus grande ouverture, plus tard, vers les autres langues du monde, principalement l'espagnol, le portugais et le mandarin. Pour sa part, le vice-président du Mouvement Unicité et Réforme (MUR) Mohamed Hilali s'interroge sur la personne de Noureddine Ayouch et sur le droit qu'il s'est attribué de discuter de ce type de questions et d'adresser ses recommandations aux différentes institutions du pays. Pour Hilali, c'est le Coran et l'arabe qui sont visés en premier, en vue de leur suppression des corpus d'enseignement. « Cet individu, M. Ayouch, nous trouvera sur son chemin et nous combattrons ses idées ».