Interviewé par Imane Bouhrara | Depuis 1999, date de l'ascension de SM le Roi Mohammed VI au Trône, le Maroc s'est inscrit dans une dynamique transformationnelle sur tous les plans. Le point avec Khalid Cherkaoui Semmouni, Professeur à la faculté de droit à Rabat et à l'ISIC. EcoActu.ma : En 22 ans de règne, quels sont les chantiers phares lancés par le Roi Mohammed VI et qui ont marqué un tournant dans la vie du Maroc ? Khalid Cherkaoui Semmouni : Les 22 ans de règne de Sa majesté le Roi Mohammed VI, sont une occasion de faire le point sur le bilan des réalisations et les chantiers en cours, et d'établir les perspectives afin d'aborder l'avenir avec sérénité et optimisme. A vrai dire, le Maroc a effectivement changé même si quelques opinions dissonantes ne veulent pas admettre cette réalité. Le royaume a connu ces dernières années un développement économique et social remarquable. En 22 ans de règne, le visage de la monarchie a profondément changé grâce au Roi Mohammed VI. En effet, le Maroc a réalisé sur le plan socioéconomique des progrès indéniables et réalisé d'importants acquis, ayant permis au Royaume d'occuper une place distinguée aux niveaux arabe, africain et mondial. Depuis son intronisation en 1999, le Roi Mohammed VI a entamé une série de grands chantiers. Son règne a permis à la vie politique d'évoluer vers la modernité et la démocratie. Un Roi populaire, fédérateur, garant des équilibres politiques et arbitre des jeux d'influences. Considéré comme le Roi des pauvres, Mohammed VI a fait de la lutte contre la pauvreté l'une des préoccupations majeures de son règne. Sa préoccupation majeure est de veiller à ce que tous les Marocains, où qu'ils se trouvent, jouissent équitablement et librement de conditions de vie dignes. Cette préoccupation du Roi jette les bases des liens solides entre lui et son peuple, dans les bons et les mauvais moments. Le Maroc a connu, pendant les vingt-deux années passées, une évolution marquée par les avancées réalisées en matière politique, économique, sociale et juridique. Sans oublier, l'évolution qu'a connue le Maroc en matière de promotion des droits de l'homme. Aussi, les grandes infrastructures du Royaume ont-elles connu un véritable bond en avant, ce qui a permis au Maroc d'être sur la voie du progrès et de la prospérité, se plaçant en la matière parmi les grands pays du monde. Même sur la scène africaine… Au niveau africain, le Maroc est le seul pays du Top 5 des puissances économiques du continent à avoir vu son PIB progresser de manière continue. Sachant que le Maroc est le seul des cinq pays les plus puissants économiquement d'Afrique à avoir une monnaie relativement solide, en rapport avec les devises fortes que sont l'euro et le dollar. Par ailleurs, le Maroc est actuellement le second investisseur africain sur le continent après l'Afrique du Sud. Ce progrès est dû à la dynamique de son économie, qui s'est davantage diversifiée au cours de ces dernières années, et aussi grâce aux nombreuses réformes économiques et sociales menées. D'autant plus qu'il ne cesse de poursuivre la dynamique de développement dans toutes ses provinces du sud et de multiplier les ouvertures de Consulats Généraux des pays amis, comme à Laâyoune et Dakhla. S'ajoute, dernièrement, la reconnaissance des Etats Unis d'Amérique de la souveraineté marocaine sur l'ensemble du territoire du Sahara occidental. Aussi, les Etats-Unis affirment-ils leur soutien à la proposition d'autonomie du Maroc comme seule base d'une solution juste et durable. En effet, sous le sage leadership du Roi Mohammed VI, le Maroc demeure un partenaire crucial pour les Etats-Unis, dans le but de consolider une coopération bâtie sur les intérêts communs et au service du développement, de la préservation de la paix, et pour faire face aux défis d'un environnement sécuritaire de plus en plus complexe. Au niveau des alliances internationales, le Maroc s'attache ainsi davantage au pôle occidental, dans une forme de coopération économique et sécuritaire. Il multiplie les sphères potentielles d'influence en Afrique et dans le Monde arabe, ce qui place le Maroc à un carrefour foisonnant qui enrichit davantage son identité, et un relais désormais indispensable en matière de lutte contre le terrorisme et les autres menaces transnationales en passant par la sécurité régionale. Grâce à la politique visionnaire, qui a été davantage renforcée, soutenue et restructurée par le Roi Mohammed VI, le Royaume a réussi l'édification d'un Etat démocratique et moderniste, un exemple de modération et de tolérance, reconnu dans la promotion des droits de l'homme et de la coexistence religieuse, et aussi un partenaire modèle de tous les pays, dans la perspective d'un partenariat solidaire et exemplaire. Cette vision éclairée du Roi Mohammed VI de la politique étrangère constitue un référentiel pour plusieurs pays arabes et africains et consolide la position du Maroc en tant que facteur de stabilité et de paix dans son environnement maghrébin, africain et arabe. De même, cette politique éclairée a permis au Maroc de transcender des périodes difficiles que connaissait le monde. Après son retour à l'Union Africaine, grâce à la sage décision du Roi Mohammed VI, le Maroc a contribué à la consolidation de la paix dans le continent africain, à travers sa participation à plusieurs missions de maintien de la paix, sans oublier son élection au Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l'UA. Cette élection témoigne de la reconnaissance du leadership de SM le Roi par les Etats africains, et le rôle constructif et solidaire du Maroc en faveur de la paix, de la sécurité et de la stabilité en Afrique. Aussi, le Maroc, sous le règne du Roi Mohammed VI, a-t-il déployé des efforts dans le cadre de sa nouvelle politique en matière de migration, en adoptant une approche humanitaire et solidaire, protégeant les droits des migrants et préservant leur dignité. Ce qui a permis la régularisation de la situation de dizaines de milliers de migrants. Ainsi, le Souverain a été désigné leader de l'Union africaine (UA) sur la question de la migration. En concrétisant la nouvelle politique migratoire du Maroc, le Souverain avait proposé, lors du 30e Sommet de l'UA, la création d'un Observatoire africain sur les migrations (OAM). Cet organe aura pour mission de collecter les informations et de développer les échanges ainsi que de faciliter la coordination entre les pays africains sur la question migratoire. L'OAM a été créé et son siège a été inauguré dernièrement à Rabat. Sous la vision éclairée du Roi Mohammed VI, l'Afrique est désormais érigée en priorité stratégique dans l'agenda marocain, comme en témoignent les multiples initiatives de solidarité destinées aux pays du continent, et le rôle important du Maroc dans le traitement de plusieurs questions, comme l'immigration illégale, et la lutte contre le terrorisme dans la région du Sahel et du Sahara. Ce succès remarquable de la politique étrangère du Maroc, grâce à la vision éclairée du Roi, est d'une forte portée politique, visant à hisser notre pays au rang des Etats influents sur la scène internationale. Jusqu'à quelle mesure la pandémie Covid-19 a marqué la pertinence de ces choix stratégiques ? Durant les vingt-deux ans de son règne, le Roi Mohammed VI, a bien su gérer les crises les plus dures et a su réagir à temps. Citons, à titre d'exemple, le cas de la crise sanitaire due au Coronavirus (Covid-19). Dès la survenue de la pandémie Covid-19, le Maroc a su mobiliser, rapidement, sous l'impulsion clairvoyante du Souverain, à l'effet de gérer, de la manière la plus exemplaire, cette pandémie. Le Souverain avait émis ses Hautes Instructions pour faire rapatrier les étudiants marocains installés à Wuhan (Chine). Ensuite, une stratégie de sensibilisation de l'ensemble de la population : citoyens, forces de l'ordre, Forces Armées Royales, professionnels de la santé, médias, etc. et de les tenir informés de la situation et des risques sanitaires engendrés par cette pandémie. A vrai dire, le Maroc a réussi, en toute exemplarité, à prendre des décisions stratégiques, limitant la propagation de la pandémie au pays. Ainsi, il a été l'un des premiers pays à lancer une campagne de vaccination Covid-19, grâce aux instructions de sa Majesté le Roi Mohamed VI. 2020 et 2021 ont été particulièrement riches en rebondissement sur la scène nationale et internationale, particulièrement sur la question de l'intégrité territoriale du Maroc. Comment évaluez-vous les actualités qui ont marqué ces derniers mois sur ce dossier ? Le Roi a réussi, en 22 ans de règne, à asseoir et à donner une vision qui donne corps à ses aspirations. En effet, tout au long de sa sage conduite de la politique étrangère, le Maroc a pu gagner en crédibilité et en influence tout en jouissant d'une stabilité et d'un développement remarquables dans la région. En outre, le parachèvement de l'intégrité territoriale étant au rang des priorités de la politique étrangère marocaine. Dans ce cadre, le Maroc a présenté une proposition d'autodétermination le 11 avril 2007 pour résoudre le conflit autour du Sahara marocain, comme une solution politique globale qui préserve son intégrité territoriale et respecte sa souveraineté nationale, en s'attachant à la légitimité internationale et aux résolutions du Conseil de sécurité. Il est à rappeler à cette occasion, que cette initiative d'autonomie est soutenue par le Conseil de sécurité, en tant qu'instance exécutive suprême des Nations unies, dans plusieurs résolutions qui réaffirment le maintien du processus de négociation afin de parvenir à un règlement de la question du Sahara marocain dans le cadre d'une solution politique réaliste, pragmatique et durable, qui repose sur le compromis. S'attachant à la légitimité internationale et aux résolutions du Conseil de sécurité, le Maroc est pour une solution politique globale qui préserve son intégrité territoriale et respecte sa souveraineté nationale, d'autant plus, il ne cesse de poursuivre la dynamique de développement sur toutes ses provinces du sud, et de multiplier les ouvertures de Consulats généraux des pays amis, comme à Laâyoune et Dakhla. Ce succès diplomatique va lui permettre d'attirer des flux d'investissements et de développer économiquement la région. De plus, le Maroc a savouré son succès diplomatique après avoir obtenu du président américain sortant, Donald Trump, une annonce surprise reconnaissant sa souveraineté sur le Sahara, alors que l'Algérie n'a pas pu l'avaler et n'arrête pas d'attaquer le Maroc à travers ses médias hostiles. En effet, le Maroc n'acceptera aucune tentative menaçant son intégrité territoriale. Par exemple, pour le cas d'El Guerguerate l'année dernière, les Forces Armées Royales sont intervenues, sur hautes instructions royales, afin de sécuriser la zone obstruée par les milices séparatistes de manière pacifique et pour nettoyer la zone tampon d'El Guergarate, en conformité avec l'article 51 de la Charte des Nations unies. Lequel donne le droit au Maroc de recourir au principe de la légitime défense en cas de menace réelle et imminente de sa souveraineté. Récemment, les Etats-Unis d'Amérique ont salué le leadership du Maroc dans la lutte contre le terrorisme. A quel point justement le Maroc joue-t-il un rôle phare de stabilité dans la région et dans le continent africain ? Effectivement, le rôle du Maroc en matière de lutte contre le terrorisme et du maintien de la stabilité et de la sécurité est apprécié par les Etats-Unis d'Amérique. Mais pas seulement l'USA, il est apprécié aussi par les Nations unies, et par plusieurs organisations africaines et internationales. Les observateurs ne cessent de classer le Maroc comme l'un des havres préservés du terrorisme au Proche-Orient et en Afrique du Nord. A savoir aussi qu'il est devenu un modèle et une référence internationale dans le domaine. Nombreux sont les Etats qui lui demandent de l'aide pour prévenir des attentats terroristes. En cumulant une expérience en la matière, le Maroc s'est résolument engagé en faveur de la promotion d'une approche de coopération globale et cohérente au niveau continental, en matière de lutte contre le terrorisme et de prévention de l'extrémisme violent. Le Maroc a, en effet, placé la lutte contre le terrorisme en tête de ses priorités, développant une stratégie multidimensionnelle dans ce domaine, basée sur un système à trois piliers : le renforcement de la sécurité intérieure, la lutte contre la pauvreté et les réformes religieuses. A partir de cette stratégie intégrée, le Maroc a accumulé une expertise reconnue et une action efficace dans le domaine sécuritaire. D'autant plus qu'il veille au partage de son expérience opérationnelle développée au niveau du continent africain dans le cadre de sa stratégie nationale de lutte contre le terrorisme qui associe aussi l'approche religieuse, à travers l'Institut Mohammed VI de formation des imams, destiné à la formation des imams africains et qui consiste à promouvoir un islam authentique tolérant et de juste milieu, et aussi la Fondation Mohammed VI des oulémas africains qui contribue à préserver les valeurs de tolérance authentique de l'Islam en Afrique à travers le réseau des Ouléma africains. D'autant plus, l'engagement du Maroc au Sahel est devenu incontournable, en tant que partenaire africain, qui veut jouer un rôle plus prépondérant dans le développement et la lutte contre le terrorisme dans la région, vu que le Maroc, a développé un véritable modèle précurseur de coopération Sud-Sud, qui se base sur les liens multidimensionnels avec les pays africains dans différents domaines, dont le domaine sécuritaire qui arrive en tête. A partir de ce constat, la coopération entre le Maroc et le G5 Sahel (constitué de la Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad) est très nécessaire pour la stabilité dans la région et dans le continent africain en général ; et pour faire face efficacement aux menaces terroristes auxquelles il n'est plus possible de répondre selon une approche exclusivement nationale. Quels sont les défis futurs qui se posent pour le Maroc sur la scène aussi bien nationale qu'internationale ? Depuis 1999, des efforts remarquables ont été accomplis avec succès sous le leadership du Roi Mohammed VI, mais il reste encore bien des choses à faire dans le domaine social et économique. En premier lieu, il faut s'attaquer aux inégalités sociales, au niveau de l'éducation et de la santé, qui doivent être revues de manière profonde, et bien exploiter le capital humain qui reste la principale richesse du pays, car il est peu valorisé jusqu'à présent. Le Souverain a reconnu depuis l'année 2017 que le modèle social actuel était dysfonctionnel et a promis des réformes pour remédier aux inégalités sociales et économiques. C'est dans cette perspective qu'il convient d'inscrire la décision royale de mettre en place un nouveau modèle de développement plus inclusif, faisant ainsi écho au discours du Roi prononcé le 13 octobre 2017 lors de l'ouverture de la session parlementaire : « Si le Maroc a réalisé des progrès manifestes, mondialement reconnus, le modèle de développement national, en revanche, s'avère aujourd'hui inapte à satisfaire les demandes pressantes et les besoins croissants des citoyens, à réduire les disparités catégorielles et les écarts territoriaux et à réaliser la justice sociale». Par exemple, dès son intronisation, le Roi Mohammed VI a fait de l'éducation une priorité. Mais vingt-deux ans plus tard, notre système éducatif est encore en retard, malgré les différents plans ou stratégies mis sur pied. Il est urgent de faire une refonte du système éducatif et de mettre en œuvre la loi-cadre sur l'éducation. Le système éducatif marocain devrait être accessible, capable de transmettre aux jeunes les compétences dont ils auront besoin et doit suivre le rythme des progrès dans le domaine numérique. Aussi, est-il nécessaire de résoudre l'inadéquation entre la formation et l'emploi (en rapprochant l'offre universitaire des besoins du marché du travail). D'un autre côté, on enregistre des failles du système de santé marocain au niveau des ressources. L'épidémie de Covid-19 a mis à rude épreuve ce système, et elle ne sera probablement pas le seul bouleversement qu'il sera amené à affronter. Donc notre système de santé devra, à l'avenir, se préparer à de futurs chocs sanitaires. Concernant la situation de la femme marocaine, il persiste encore des disparités entre les deux sexes dans l'accès à la santé, à l'éducation, et à l'emploi. En plus, de l'analphabétisme élevé des femmes, notamment dans le milieu rural. Ce qui nécessite des réformes juridiques pour mettre fin à toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, et les placer au cœur du développement. En ce qui concerne l'économie, le modèle de croissance actuel n'est plus en mesure de garantir une évolution de l'activité économique susceptible de créer de la richesse et de l'emploi. Malgré les efforts du gouvernement qui ont permis l'essor d'un nombre réduit de secteurs, comme l'automobile et l'aéronautique par exemple, l'évolution de la productivité demeure limitée, ce qui empêche un véritable décollage de l'économie marocaine. D'où la nécessité de développer les secteurs stratégiques, comme l'agriculture, les énergies renouvelables, rendre l'offre industrielle plus compétitive et renforcer le rôle des stratégies sectorielles dans la cohérence des politiques publiques. Sur le plan international, le Maroc a connu de profondes transformations. Ses relations internationales se sont diversifiées, tant au niveau des acteurs que celui des orientations stratégiques de sa politique étrangère. Mais, concernant les causes nationales, notamment la question du Sahara marocain, afin d'obtenir davantage de soutien pour la marocanisation du Sahara et pour renforcer son poids stratégique régional, le Maroc devra renouer ses liens avec les pays scandinaves, d'autres pays d'Afrique anglophones, et des pays d'Amérique latine et d'Asie, par le biais de la diplomatie économique, qui est une forme de politique étrangère dont les outils reposent sur le commerce extérieur, l'intelligence économique et la sécurité humaine.