La saison estivale est à très haut risque en matière de piqûres de scorpions. Dans ce sens, le Centre Antipoison et de Pharmacovigilance du Maroc se mobilise. Les détails de la stratégie du centre créé en 1989, avec Docteur Sanaa Benlarabi, Médecin pharmaco-toxicologue au Centre. EcoActu : Début juillet, le ministre de la Santé avait affirmé que le nombre de décès suite aux piqûres de scorpion et de serpent a reculé de 65 cas en 2013 à 51 cas en 2017, sur 30.000 cas de morsures enregistrés chaque année par votre centre. Quels ont été les actions prises justement pour réduire drastiquement le nombre de décès ? Sanaa Benlarabi : Les Piqûres de Scorpion (PES) représentent la première cause d'intoxication au Maroc avec 30.000 cas par an et 50 décès dont 95% sont des enfants de moins de 15 ans. La stratégie nationale de lutte contre lesPiqûres de Scorpion,mise en place depuis 1999, a permis de diminuer la létalité qui est passée de 2,37% en 1999 à 0,18% en 2017 sans atteindre l'objectif zéro décès. Elle a aussi permis d'identifier les régions à risque qui sont : CasablancaSettat, Souss Massa, Béni Mellal Khénifra, MarrakechSafi, Draa Tafilalt et FèsMeknès. La création de la Commission Nationale de Toxicovigilance (Décision du ministère de la santé N° 11885 du 31 Août 2017) a été une opportunité pour faire une mise au point sur la Stratégie Nationale de Lutte contre les PES lors de sa première réunion du 7 septembre 2017, dédiée à cette problématique. Message audio de sensibilisation aux piqures de scorpions par le CAPM La Commission Nationale de Toxicovigilance a s'est réunie le 26 Avril 2018 une deuxième fois au siège du Centre Anti Poison et de Pharmacovigilance du Maroc. Les institutions présentes étaient : Le Centre Antipoison et de Pharmacovigilance du Maroc (CAPM), La Direction des Hôpitaux et des Soins Ambulatoires (DHSA), La Direction des Médicaments et de la Pharmacie (DMP), La Division de la Communication, et le service de santé des FAR. Les Directions régionales de la santé de : Fès-Meknès, Marrakech-Safi, l'Oriental, Rabat-Salé-Kénitra, Béni Mellal-Khénifra, Casablanca-Settat, Guelmim-oued Noun, Draa-Tafilalt, Dakhla-Oued Dahab, Souss-Massa, et Laayoune-Sakia El Hamra. Etaient présents aussi des experts réanimateurs, toxicologues et pharmacologues représentant le CHU de Fès, de Casablanca, d'Oujda, et la faculté de Médecine de Tanger.La réunion avait pour objectif dedéfinir les actions à mettre en place en matière de gestion des risques sanitaires liés aux Piqûres et Envenimations Scorpioniques, durant la saison estivale 2018. La saison estivale est une période qui connaît le nombre le plus important de morsures. Comment le centre s'y prépare-t-il ? Le ministre de la santéa parlé des piqures de scorpion (PES) : 30.000 cas en 2017. Les PES représentent la 1èrecause d'intoxications au Maroc. Avec 50 décèsdont 95% sont des enfants de moins de 15 ans ; le taux de décès par PES est passé de 2, 37% en 1999 à 0, 18% en 2017 grâce à la stratégie nationale de lutte contre les PES mise en place par le centre antipoison et de pharmacovigilance du Maroc (CAPM) mise en place en 1999. La stratégie a aussi permis d'identifier les régions à risque qui sont : CasablancaSettat, Souss Massa, Béni Mellal Khénifra, MarrakechSafi, Draa Tafilalt et FèsMeknès. Cette stratégie se base sur : * La standardisation de la conduite(CAT) à tenir, c'est-à-dire que devant toute PES, la victime va être traitée de la même façon dans toutes les structures sanitaires du royaume. Cette CAT est mise à jour selon les données internationales et en coordination avec les réanimateurs des régions les plus touchées à savoir : CasablancaSettat, Souss Massa, Béni Mellal Khénifra, MarrakechSafi, Draa Tafilalt et FèsMeknès. – la CAT est imprimée annuellement et envoyée à toutes les structures sanitaires du royaume. * La formation du personnel médical et paramédical sur cette CAT selon un plan de formation régional avec l'appui du CAPM et les personnes ressources locales visant les Réanimateurs, Urgentistes et médecin de SIAAP. * La mise à la disposition de ces régions de kit de prise en charge des PES (plus de 1000 kits distribués cette année) * La Redéfinition du circuit du patient selon les moyens de chaque région pour que la victime arrive rapidement à la structure sanitaire appropriée car la plupart des décès est due à un retard de traitement * Les campagnes de prévention information éducation sensibilisation (IEC) sur les PES : – Organisation de séances de sensibilisation en coordination avec les autres secteurs : entraide nationale, complexe polyvalents, prêche du vendredi, séance de lutte contre l'analphabétisme, maisons des jeunes... – Diffusion du matériel IEC élaboré au niveau national, Tables rondes, interventions média au niveau régional et provinciales * La collaboration multisectorielle : Malgré les efforts du ministère de la Santé, on n'arrive pas à diminuer le nombre de piqués ainsi que d'arriver à zéro car la problématique du scorpion implique plusieurs intervenants ; c'est pourquoi la collaboration entre eux est primordiale, notamment les interventions dans les médias et communiqués de presse, l'Implication de tous les départements concernés à savoir le ministère de l'Intérieur (autorités locales et collectivités), ministère de l'Environnement, de l'Habitat, le ministère de l'Agriculture, le ministère des Affaires islamiques et des Habous, le ministère de la Jeunesse et des sports et le ministère de l'Education nationale. Pour ce dernier, une campagne IEC a été organisée par les académies régionales de l'enseignement pour les élèves du primaire et du collège. Nous envoyons aux académies une leçon type « nahj salim » avec des messages simples de prévention. Les enseignants utilisent cette leçon pour faire des séances aux élèves ; suite à ça on demande aux élèves de faire des dessins sur les messages IEC pour évaluer s'ils ont bien assimilé les messages. Pour encourager les élèves le CAPM organise un concours de dessin et offre des prix pour les 3 meilleurs dessins sur le plan national. Pour ce faire une collecte des dessins est faite au niveau des académies régionales, un premier tri est fait à ce niveau pour être envoyé au CAPM. Cette année nous avons octroyé 3 prix nationaux : Khénifra, Temara, Rhamna). Souvent, la presse rapportele manque de traitement et de prise en charge, notamment dans les zones les plus reculées. Qu'en est-il vraiment ? Toutes les structures sanitaires des régions à risque disposent de ces kits selon le nombre de PES qu'elles déclarent au CAPM. Le traitement des PES repose sur la distinction des PES en piqure : Classe I : sans envenimation il n'y a que des signes locaux : douleur, rougeur.... Cette classe représente 90% des PES et ne nécessite pas d'hospitalisation. Le traitement est basé sur des soins locaux, le traitement de la douleur et une surveillance du pouls, de la température, tension artérielle pendant 4h à compter de l'heure de la piqure. Passé ce délai, le malade peut quitter la structure sanitaire. Classe II et classe III, c'est une piqure avec passage du venin représentent moins de 10% des PES. Le traitement se fait en milieu hospitalier. Pour la Classe II : c'est une PES avec des signes généraux : fièvre, vomissement, sueurs ... à hospitaliser dans un service de médecine pour traitement. Pour la classe III, c'est une PES avec une détresse vitale : cardiaque, respiratoire ou neurologique. A hospitaliser en urgence en réanimation pour traitement. Le traitement des PES se base sur le traitement des symptômes que présente le piqué et devant chaque PES un kit est ouvert pour traitement. Dans ce kit il y a tout ce qui nécessaire pour traiter une PES de la compresse pour les soins locaux à la dobutamine qui est utilisée en cas de détresse vitale. Depuis sa création en 1989, comment la stratégie du centre a-t-elle évoluée pour prendre en considération toutes les évolutions démographiques, etc ? En 1989, le centre a été créé et il s'est intéressé à suivre le profil épidémiologique des intoxications, pour savoir quel est le problème pour mener des actions ciblées. C'est ainsi qu'on a trouvé que les PES représentent un véritable problème de santé publique dans certaines régions et qu'il fallait mettre en place un système spécifique de déclaration des PES pour mieux cerner le problème et avoir le maximum de renseignement sur les victimes ; âge, origine géographique... L'analyse de ces données a permis de connaitre à fond la problématique ce qui a abouti à la mise en place de la stratégie nationale en 1999. Au fur et à mesure des résultats de cette stratégie, le centre l'a renforcée par les kits, la création de comités provinciaux, la nomination de correspondants régionaux, la formation continue, les campagnes régionales de prévention locales.... Devant les résultats satisfaisants de cette stratégie, le centre a décidé de l'élargir en 2013 pour qu'elle englobe toutes les envenimations : scorpion et serpent (morsure de serpent 150 à 200 cas par an). En cas de piqure de scorpion, quelle attitude faut-il adopter et quels services compétents contacter ?
En cas de piqure de scorpion, ne pas paniquer, rester au calme pour ne pas accélérer la diffusion du venin, ne pas mettre de garrot ni appliquer des produits tels que henné, butane... Il faut noter l'heure de la piqure, désinfecter et se présenter à la structure sanitaire la plus proche pour distinguer piqure simple donc traitement sur place, des fois on n'a besoin que d'une surveillance donc ne pas demander à tout prix des médicaments, ou piqure avec envenimation donc transfert vers l'hôpital. S'il s'agit d'un enfant de moins de 15 ans il faut qu'il soit hospitalisé dans un hôpital avec service de réanimation. Aussi, le CAPM dispose-t-il d'une permanence téléphonique 24H/24 et 7J/7 qui vont renseigner les piqués ou leur famille selon l'état clinique du piqué.