Ecrit par S.E.| En quoi est ce que la ZLECAF peut constituer une opportunité pour remédier aux formes multiples et intersectionnelles de discrimination à l'encontre des femmes ? Telle est la question sur laquelle s'est penchée Nouzha Chekrouni Senior Fellow au Policy Center for the New South. L'entrée en vigueur de la ZLECAF le 1er janvier 2021 est cruciale pas uniquement sur le plan commercial et économique mais aussi du fait qu'elle souligne l'importance des mesures sociales et politiques. A ce titre, Nouzha Chekrouni Senior Fellow au Policy Center for the New South (PCNS) rappelle dans une vidéo diffusée par le think tank que dans les objectifs généraux, on retrouve l'article 3 qui stipule promouvoir et réaliser le développement socioéconomique inclusif et durable dont l'égalité de genre et la transformation structurelle des Etats partis. En s'attardant sur la question genre et tout en la reliant à la question des Objectifs de Développement Durable (ODD), Chekrouni répond à la question suivante : parmi les défis des ODD, qu'en est-il de l'égalité hommes-femmes en Afrique (sur le plan de la participation économique, de l'accès à l'éducation et à la santé dans le contexte de la pandémie, de la pauvreté en milieu rural...) ? De prime abord, elle tient à rappeler qu'il n'est plus acceptable d'avoir un seuil de représentation faible des femmes dans aucun domaine. En 2018, le Haut Commissariat au Plan a révélé que la participation des femmes dans la vie économique au Maroc (entrepreneuriat féminin) est parmi les plus faibles au monde (soit 22% vs 48% de moyenne au niveau mondial). Cette problématique a été exacerbée en temps de pandémie et rehaussée par la surcharge des services de santé qui ont pour droit fil la hausse de la mortalité maternelle. « Ceci nous interpelle sur la nécessité d'avoir des services de maternité durable », rappelle Nouzha Chekrouni. Ajoutons à cela que la pandémie a touché de manière disproportionnée les hommes et les femmes. Ces dernières se retrouvent sur la ligne de front pour affronter et faire face à la pandémie avec des mesures de sécurité minimale. C'est pour dire que la situation des femmes interroge avec acuité les systèmes économiques et politiques. En dépit de l'amélioration des textes législatifs, les schémas négatifs sur la situation de la femme restent largement véhiculés essentiellement dans le milieu rural dans les pays africains. 80% de la production vivrière est produite par les femmes dans des conditions exacerbées par le réchauffement climatique voire des problèmes liés à l'environnement. En matière des défis majeurs liés aux ODD, 500 millions de femmes vivent au-dessous du seuil de pauvreté. Tous ces problèmes économiques ou environnementaux se traduisent par l'exode rural et le travail de plus en plus accru des femmes dans l'informel et dans des conditions précaires. L'éducation n'est pas en reste. Selon l'UNESCO, plus de 330 millions d'apprenants africains sont scolarisés et n'ont pas pu avoir accès à l'éducation en ces temps de pandémie. Et pour cause, la couverture limitée d'internet, le coût élevé pour une population qui peine à couvrir ses charges quotidiennes. A toutes ces formes multiples de vulnérabilité et de discrimination intersectionnelles, les femmes sont aux premières loges. En quoi est ce que la ZLECAF peut constituer une opportunité pour remédier à ces formes multiples et intersectionnelles de discrimination à l'encontre des femmes ? Quelles mesures concrètes pour combattre ces inégalités dans le cadre des ODD ? « La ZLECAF peut constituer une opportunité pour corriger ces inégalités et instaurer une nouvelle gouvernance en faveur de l'égalité homme-femme », explique N. Chekrouni. Ceci passe deux niveaux : Au niveau continental et africain, une approche coordonnée et centrée sur l'élément humain est absolument nécessaire. Il faut des mesures audacieuses pour que la question du genre soit centrale pour les différents pays africains. Au niveau de chaque pays, l'accompagnement des femmes est déterminant comme souligné par l'article 27 de la ZLECAF qui stipule le renforcement des capacités et la formation dans les domaines du commerce et des services. La Covid19 nous interpelle et nous rappelle des objectifs des ODD qui sont tellement cruciaux et la nécessité de réinventer l'avenir. Ces objectifs concernent aussi bien l'autosuffisance alimentaire, la santé, l'éducation et l'égalité entre les sexes. Ils ne sont pas exhaustifs, mais impératifs. Et pour conclure Chekrouni rappelle que l'Afrique a besoin de solutions innovantes concrètes et d'ici à 2030 nous devrions progresser de façon significative sur des questions liées à la violence, la discrimination, l'accès aux postes de décision, la réduction du gap numérique, l'encouragement de l'emploi, le renforcement des femmes entrepreneurs.