La pandémie de la Covid-19 a provoqué un usage accru des nouvelles technologies et a dévoilé par ricochet les freins à l'émergence d'un écosystème numérique fort au Maroc. Chakib Achour, Directeur marketing et stratégies d'Huawei Technologies au Maroc revient sur les principaux faits marquants de ces derniers mois. EcoActu.ma : La crise sanitaire a donné un coup d'accélérateur à l'usage des nouvelles technologies partout dans le monde. Comment cela s'est répercuté sur l'activité d'Huawei au Maroc ? Chakib Achour : Pendant cette crise de la Covid-19, la première chose que nous avons constatée est évidemment le changement de notre vie quotidienne. Le citoyen marocain était confiné chez lui ce qui a provoqué une augmentation de la connectivité par rapport au passé : les élèves et étudiants devaient suivre leurs cours à distance et même l'activité économique devait juguler cette absence de mobilité physique par une présence numérique. Nos partenaires et clients opérateurs télécoms étaient donc confrontés à des problèmes très graves face à cette connectivité intense et supérieure à la normale. Sous d'autres cieux, l'augmentation de l'usage d'Internet dépassait 60% donc l'usage du réseau était intense. Le problème est que la qualité a été impactée. Il fallait donc mobiliser en urgence beaucoup de ressources pour accompagner les opérateurs télécoms. Et la première mesure que nous avions mise en place c'est d'accompagner les trois opérateurs télécoms à stabiliser la qualité du réseau. C'était un travail très dur mais accompli en quelques semaines grâce à la mise en place d'une équipe dédiée. Lire également : SOUVERAINETE NUMERIQUE : LE MAROC HORS COURSE ? Aujourd'hui l'acteur technologique est devenu un maillon important voire incontournable de la chaîne quel que soit le secteur d'activité. Comment cela s'est-il concrétisé au Maroc surtout face aux effets de la crise ? La responsabilité sociale d'Huawei s'est concrétisée suite à un rendez-vous avec le Chef de gouvernement par la donation d'une solution de visioconférence qui permet la continuité du travail et des activités. D'ailleurs, nous avons reçu une lettre de remerciement de la chefferie du gouvernement mais cela découle de notre devoir envers le pays. Cette collaboration s'est également déclinée par la mise en place de solution de diagnostic en cette période de Covid, en accompagnant le ministère de la Santé plus particulièrement le CHU de Casablanca. Il s'agit du AI Assistant The Diagnosis Of COVID-19 qui aide à faire face à la pénurie de radiologues puisque avec des algorithmes basés sur l'intelligence artificielle, cet assistant génère, une fois le scanner d'un patient effectué, un fichier téléchargé dans le cloud et les algorithmes génèrent par la suite un diagnostic rapide quasi instantané. Quelques jours après la mise en place de cette solution, le résultat était impressionnant puisque l'assistant livre son diagnostic au bout de 30 à 40 secondes avec une précision de 85 % à 90%. La communauté médicale est preneuse de ce type de solutions qui sont en fait des outils d'aide à une meilleure productivité et un meilleur diagnostic et c'est toujours le médecin qui reste maître de sa décision. C'était une expérience extraordinaire que nous avons menée avec le CHU de Casablanca. Le secteur de l'Education nationale et de l'Enseignement supérieur a été très perturbé par la pandémie donnant lieu à la fermeture des établissements et à ce jour les Universités n'ont pas encore repris les cours en présentiel. Est-ce de nature à booster le e-learning ? Effectivement, cette période de pandémie a été également marquée par le lancement du Morocco go digital qui est une plateforme qui propose des cours en ligne. Des milliers d'étudiants y étaient connectés tous les jours avec une disponibilité des cours 24h sur 24. Les résultats étaient impressionnants à telle enseigne que nous avons été reçus par le ministre de l'Education nationale pour nous féliciter. Par ailleurs, Huawei a lancé l'ICT Competition qui est une compétition mondiale qui a été marquée par le classement des étudiants marocains certifiés sur le Cloud Computing à la première place mondialement. Cela nous a permis d'approfondir les discussions avec le ministère de l'Education et surtout susciter l'intérêt des Universités pour un nouveau cursus qui intègrent nos cours sur la partie digitale. Avec le soutien d'Huawei Technologies, les sociétés de conseil en stratégie Guepard et ThinkONE, ont élaboré un rapport sur le GAP entre les compétences numériques et le marché du travail au Maroc. En attendant que les recommandations de ce rapport ne soient prises en ligne de compte dans la politique publique du secteur, comment le secteur privé peut tirer profit de la Data collectée ? Notre malheur au Maroc est qu'on ne fait pas de l'innovation parce qu'on ne stocke pas de données sur le sol marocain. Les opérateurs pour la plupart stockent les données à l'étranger. Donc, dans un premier temps, il y a besoin d'un Datacenter où l'on puisse stocker les données ici au Maroc. Certes il y a des initiatives, nous avons-nous-mêmes lancé un Cloud souverain avec l'un des opérateurs télécoms marocains. Ce qui nous manque c'est une initiative dans laquelle s'inscrit le gouvernement pour la mise en place d'un national Datacenter. Si nous avons ce Datacenter national avec un cloud souverain sous la responsabilité de l'Agence de développement digital par exemple, on va pouvoir donner libre accès à la data pour les startups pour innover. Nous avons pris part à un projet européen Copernicus qui exploite les données satellitaires en faveur de plusieurs activités. Ces données sont stockées dans un cloud et sont exploitées par des sociétés spécialisées que ce soit pour le climat, la navigation, la détection de la sécheresse... Aujourd'hui au Maroc on parle de plus en plus de villes intelligentes ou smart cities, si on capte les données par exemple du transport public et de la mobilité, des sociétés spécialisées peuvent les exploiter pour de nouvelles solutions innovantes. Le cas aussi de la télémédecine, notamment des professeurs de l'hôpital Cheikh Khalifa qui travaillent sur des projets de télémédecine... c'est dire que le digital est cœur de tous les écosystèmes que ce soit l'éducation, la santé... et il permet de lisser les disparités territoriales et donner libre accès à ces différents services. Voir également : AITEX 2019 : Chakib Achour, Head of marketing & business Development Huawei