Deux circulaires conjointes des ministères de l'Intérieur et de l'Aménagement du territoire national ont été envoyées le même jour aux Walis et Gouverneurs, au Gouverneur directeur générale de l'Agence urbaine de Casablanca et aux Directeurs des agences urbaines. L'objectif est de mettre un peu d'ordre dans ce secteur et en finir avec certaines pratiques qui n'ont aucune base juridique et d'amorcer les chantiers de numérisation et d'implémentation des règles de sécurité et d'efficacité énergétique. L'espace urbain est devenu un chantier de construction à ciel ouvert. Et pour cause, le fort développement démographique et économique du pays se traduit par des besoins à satisfaire. Mais certains dysfonctionnements ont incité les autorités publiques à agir pour mettre fin à certaines pratiques en veillant au respect du cadre réglementaire et à mettre en œuvre dans la même foulée le règlement général de construction. C'est dans ce sens que le ministère de l'Intérieur et celui de l'Aménagement du Territoire national, de l'Urbanisme, de l'Habitat et de la Politique de la ville ont adressé deux circulaires conjointes aux Walis et Gouverneurs, au Gouverneur directeur générale de l'Agence urbaine de Casablanca et aux Directeurs des agences urbaines. La première circulaire datée du 18 juin, concerne les travaux d'équipement de lotissement et de réalisation des groupes d'habitation et les délais de réalisation. Elle rappelle le rôle important des lotissements, groupes d'habitations et morcellements dans le développement urbain, la création de projets d'habitation, et la promotion de différentes activités économiques. Ce qui est de nature à encourager l'investissement, créer des emplois et surtout représente une manne importante de recettes fiscales pour l'Etat et les Collectivités. Mais ce rôle reste tributaire du strict respect du cadre réglementaire, notamment la Loi n° 25-90 relative aux lotissements, groupes d'habitations et morcellements, la Loi n° 12-90 relative à l'urbanisme ainsi que le Dahir n° 1-60-063 du 25 juin 1960 relatif au développement des agglomérations rurales. Plus particulièrement l'autorisation de lotir qui est le premier maillon dans cette chaîne. Cette autorisation, qu'elle soit expresse ou tacite, est périmée si le lotisseur n'a pas terminé les travaux d'équipement avant l'expiration d'un délai de trois ans qui court à partir de la date de la délivrance de l'autorisation ou de celle de l'expiration du délai de trois mois du dépôt de demande, le silence de l'administration valant approbation. La circulaire conjointe explique que l'objectif de fixation de ce délai vise, en plus de réaliser les projets à temps pour répondre aux besoins en habitation face au fort développement démographique et limiter l'expansion de l'habitat illégal, d'éviter que l'espace urbain ne devienne un chantier de construction à ciel ouvert et de barrer la route à la spéculation immobilière. Sans oublier que les projets de lotissements engendrent des investissements pour l'Etat pour la réalisation des infrastructures de base. Des dysfonctionnements à la pelle Ce rappel fait, les ministères de l'Intérieur et de l'Aménagement du territoire semblent résolus à faire un peu d'ordre dans les chantiers des lotissements, groupes d'habitation et morcellement en appelant les autorités à respecter et à faire respecter le cadre réglementaire régissant ces activités. En effet, à la lumière des données analysées par les deux départements ministériels, il s'est avéré que certaines pratiques, sans base légale, sont devenues la règle au fur des années. Notamment la délivrance d'autorisation de lotir avant que les dossiers techniques relatifs aux travaux d'équipement ne soient visés par l'administration et les entités devant assurer le suivi des travaux, la réception du lotissement et sa gestion. Une pratique contraire à la loi mais qui est devenue la règle. L'article 6 de la loi 25-90 stipule que l'autorisation de lotir est délivrée lorsque le lotissement projeté est reconnu satisfaire aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur notamment aux dispositions des plans de zonage et des plans d'aménagement. Ladite autorisation est délivrée sous réserve des autorisations prévues par des législations particulières et après obtention des avis et visas prévus par les réglementations en vigueur. Aussi, a-t-il été relevé entre autres dysfonctionnements, la réception provisoire se fait malgré que les travaux aient dépassé le délai légal de trois ans. Ou encore la délivrance de l'autorisation de modification de projets de lotissements ayant dépassé le délai légal, alors que la loi stipule qu'il faut déposer un nouveau dossier de demande d'autorisation. Pis, le deux ministères ont constaté que les dispositions relatives à la réception définitive des travaux n'ont pas été appliquées des années après la réception provisoire pour un nombre important de lotissement. Et par voie de conséquence, des espaces non bâtis, des routes et différentes infrastructures appartiennent toujours aux lotisseurs, alors qu'ils doivent être annexés aux biens publics des collectivités. Fin du laisser-aller ? Pour dépasser cette situation et en attendant également la réforme du cadre réglementaire dont certaines dispositions sont très contraignantes face à la dynamique démographique actuelle, la circulaire conjointe énumère des dispositions à mettre en œuvre par les autorités. Notamment de faire une lecture intégrée des articles 11 et 23 de la loi 25-90 et l'article 42 (sur les exonérations totales temporaires) de la loi 47-06 relative à la fiscalité locale. Aussi, est-il préconisé de ne pas comptabiliser dans le délai légal de trois ans tout arrêt des travaux d'équipement, notamment les cas prévus dans la loi comme le cas de force majeure ou encore tout changement dans la situation juridique du lotisseur ou dans la relation contractuelle relative au projet de lotissement ou de groupe d'habitation, entre autres cas. Les Walis et les gouverneurs sont invités à suivre et accompagner les dossiers relatifs à cette problématique de péremption des délais légaux dans le cadre d'une commission préfectorale qui sera créée et composée de directeurs des agences urbaines, des présidents des collectivités concernées ou leurs représentants en charge du secteur de l'urbanisme et de la construction et toute personne physique ou morale dont la présence s'avère nécessaire. Et justifier l'avis de la commission dans un procès verbal bien documenté. Concernant les projets en cours, les autorités devront sensibiliser les détenteurs d'autorisation de lotissement sur les délais légaux de l'équipement des lotissements et les inciter à accélérer le rythme de travail pour les livrer dans le délai imparti. Dans ce contexte du Covid-19 qui a eu de lourdes répercussions sur le secteur, la commission préfectorale sera amenée à statuer sur les demandes d'arrêt ou de reprise des travaux et à élaborer des PV de sa décision bien argumentée qu'elle adressera au président de la collectivité concernée. Pour les projets en cours d'étude, la circulaire conjointe insiste sur le strict respect du cadre réglementaire et le bannissement des pratiques sans fondement juridique en spécifiant dans les cahiers des charges les dispositions relatives au délai légal d'exécution contenues dans l'article 11 de la loi 25-90 ou de l'article 12 du Dahir du 25 juin 1960. Expiré ce délai, les lotisseurs devront déposer une nouvelle demande de lotir. La commission préfectorale devra recenser tous les lotissements et groupes d'habitations autorisés pour identifier les projets qui manifestent un retard dans les travaux d'équipement. Les présidents des collectivités concernées sont sommés d'accélérer le règlement de la situation juridique des lots notamment des routes et voies pour les annexer aux biens publics de la collectivité en coordination avec les lotisseurs concernés. Désormais, la circulaire conjointe du 18 juin 2020 prévoit l'élaboration d'un rapport annuel qui sera remis à la fin du mois de février de chaque année à la commission centrale conjointe (ministères de l'Intérieur et celui de l'Aménagement). Lequel rapport fait l'inventaire des projets de lotissement et de groupes d'habitation avec toutes les contraintes rencontrées sur le terrain assorties de recommandations pour les dépasser. Entrée en vigueur du Règlement général de construction La deuxième circulaire, également en date du 18 juin et adressée aux Walis, gouverneurs et directeurs des agences urbaines concerne la mise en œuvre du décret 2.18.577 du 12 juin 2019 portant approbation du règlement général de construction fixant la forme et les conditions de délivrance des autorisations et des pièces exigibles, en application de la législation relative à l'urbanisme et aux lotissements, groupes d'habitations et morcellements. En annexe de cette circulaire figure le modèle de la fiche à renseigner pour le calcul des taxes, redevances et rémunérations pour services rendus qu'il s'agisse de demande de permis de construire, de demande d'autorisation de lotir ou de demande d'autorisation d'un groupe d'habitation. Cette circulaire rappelle les dispositions de l'arrêté conjoint n°337.20 de la ministre de l'Aménagement du territoire national, de l'Urbanisme, de l'Habitat et de la Politique de la ville et du ministre de l'Intérieur, en vertu duquel les pièces requises pour les demandes d'autorisation seront déterminées conformément à la réglementation en vigueur. En attendant l'adoption du projet de loi sur la fiscalité des collectivités territoires, les autorités doivent étudier les dossiers de demande d'autorisation de restaurations de toute nature et liquider les taxes y afférent selon les dispositions de la loi 47-06. La circulaire donne également le top départ à la mise en œuvre des procédures de gestion immatérielle relatives au dépôt et à l'examen des demandes d'autorisation, des permis d'habiter et des certificats de conformité et de leur délivrance, telles que prévues dans l'arrêté 338.20, qui prévoit la création d'une plateforme numérique unifiée. Les autorités concernées sont appelées à organiser des séances de formation et de sensibilisation au profit des présidents de conseils communaux et de conseils d'arrondissement, particulièrement aux règles de sécurité et d'efficacité énergétique. Les autorités sont tenues de rendre compte dans des rapports réguliers à la Commission centrale de l'état d'avancement de la mise en œuvre des nouvelles dispositions. Circulaire sur des dispositions de la loi 25-90 Circulaire relative au Règlement général de construction