Le bilan de la semaine du 11/05 au 17/05 est plutôt riche en bonnes nouvelles. La première : le nombre de décès est de plus en plus faible (192 cumulés dont 4 nouveaux cette semaine) par rapport aux rétablissements (3'660 cumulés dont 1'106 nouveaux rien que cette semaine). La deuxième : ce même nombre total des rétablissements (3'660) a même dépassé le nombre de personnes en cours de soin (3'018). La troisième : après avoir augmenté la semaine précédente, le nombre de nouveaux testés positifs marque une baisse de 353 cas hebdomadaires (soit 30% de moins). La quatrième : du fait de cette baisse du nombre de cas positifs, le nombre de personnes en soin a pu, lui aussi, diminuer de 303 en passant à 3'018. Si l'allocution du Chef de gouvernement du lundi 18 mai 2020 venait assouplir les mesures de confinement, les conditions de propagation du virus en seraient sans doute facilitées et il est ugé utile que le rapport de cette onzième semaine dresse aussi « l'horizon sanitaire » qui se profilerait avec les conditions du confinement maintenues, devenue situation de référence maintenant. Toutes les données ont été quotidiennement mises à jour auprès du site du Ministère de la Santé du Maroc[i]. LES TESTS ET LEURS RESULTATS Détails de l'actualité hebdomadaire Il semble que le Maroc continue à ne tester que les cas « fortement suspects« . L'évolution des tests réalisés chaque semaine (bleu clair) ainsi que celle de leur total (bleu roi) sont montrées en Figure 1. Le nombre de nouveaux tests hebdomadaires effectués s'est maintenu en passant de 23'812 à 24'099, ceci signifie que le nombre de cas « fortement suspects » a stagné (alors qu'il avait augmenté de 62% la semaine du 4-10/5). Selon diverses déclarations du Directeur de l'Epidémiologie au Ministère de la Santé, en plus, des personnes testées, 70% de personnes additionnelles, proches de personnes testées positives précédemment, seraient suivies par les services du Ministère de la Santé. Si ce sont toujours les mêmes profils que l'on teste, ce seraient encore les nouveaux foyers épidémiques qui continueraient à maintenir le nombre de tests. Le graphique de gauche de la Figure 2 montre l'évolution historique et prospective du nombre de tests et de leurs résultats alors que le graphique de droite montre la structure des résultats. Dans le graphique de gauche, les données au-delà du 17 mai 2020 sont nos estimations. Le graphique de droite montre aussi l'évolution du pourcentage de la population marocaine testée (échelle de droite). Si l'on avait pu maintenir le confinement jusqu'au terme de l'épidémie, nos prévisions nous portent à croire que l'on cumulerait environ 130'000 tests de personnes « fortement suspectes ». Dans les conditions actuelles de ce que l'on considère comme « personnes à suspectes à tester », le besoin maximum en tests aurait sans doute été passé au voisinage du 08 mai 2020. Dans le graphique de gauche, les valeurs au-delà du 17 mai 2020 sont nos estimations. LA SITUATION DES CAS TESTES POSITIFS Détails de l'actualité hebdomadaire La Figure 3 montre l'évolution hebdomadaire du nombre de tests positifs, de décès de personnes infectées, de patients rétablis et de ceux en soin (les nouveaux dans le graphique de gauche et le cumul à droite). Selon diverses déclarations du Directeur de l'Epidémiologie au Ministère de la Santé, 80 à 90% des nouveaux cas font partie de l'entourage en contact avec les personnes précédemment testées positives. Tout tend à montrer que nous avons déjà passé le maximum du nombre d'infectés et cette semaine, cela est étayé par un nombre de nouveaux testés positifs hebdomadaires qui a diminué (807 face à 1'116 la semaine du 4-10/5) après avoir légèrement augmenté la semaine précédente, sans doute de façon conjoncturelle. Le nombre de personnes en soin a diminué (-303) à 3'018 commençant enfin à libérer un peu la pression sur les soignants et les infrastructures de soin. Ce nombre avait dépassé la capacité d'accueil en lits mis en service pour COVID-19 (3'000) dès la fin de la septième semaine[i] mais une très large majorité des personnes infectées sont asymptomatiques et ne nécessitent qu'un isolement sans hospitalisation (70 à 80% des cas selon les déclarations du Directeur de l'Epidémiologie au Ministère de la Santé). Ceci fait que la capacité du Maroc en lits dédiés est restée loin d'être saturée jusqu'à présent et que nos médecins n'ont encore jamais été mis devant le difficile choix de priorité des patients à traiter. Le pourcentage des personnes rétablies (53.3%) a enfin dépassé le pourcentage des personnes en soin (43.9%). Au stade actuel, la Figure 4 combinée aux autres informations enseignent les choses suivantes : * Les statistiques actuelles indiquent que les porteurs de COVID-19 du Maroc ont une chance sur 36 d'en mourir (2.8%), en moyenne et abstraction faite de toute faiblesse qui causerait une aggravation de ce risque. Toutefois, ce taux de décès de tous les testés positifs décroît de façon lente mais monotone depuis pratiquement six semaines même à l'échelle journalière, comme montré par la courbe rouge du graphique de droite de la Figure 4. * Dès lors que vous avez suffisamment de symptômes pour que les protocoles hospitaliers vous considèrent comme « fortement suspect« , vous avez : o environ 1 chance sur 13 d'être porteur de COVID-19 (7.6%), mais ce chiffre hebdomadaire décroît lui aussi régulièrement depuis la première semaine d'avril (de 21.1 à 7.6%), et il est directement corrélé au nombre total de personnes testées[i] comme montré par la courbe verte dans le graphique de droite de la Figure 4, o environ 1 chance sur 340 d'en mourir (0.29%), ce chiffre aurait, lui aussi, une tendance à baisser depuis la première semaine d'avril (de 1.44 à 0.21%). Cette forte baisse de la mortalité est sans doute due à un certain succès des protocoles de soin. Tout en ayant une hausse tendancielle du nombre de tests journaliers, le pourcentage des personnes testées positives chaque jour a une évolution tendanciellement baissière depuis fin mars, comme montré par la courbe bleue du graphique de gauche de la Figure 5. L'extrapolation linéaire du taux depuis le 26/03 mènerait à un taux de positivité théoriquement nul aux environs du 18 mai 2020, valeur très proche de celle que nous annoncions déjà il y a deux semaines[ii]. – Le graphique de droite de la Figure 5 montre le taux de reproduction du virus qui permettrait, théoriquement, de connaître le nombre moyen de personnes qu'un porteur contagieux pourrait infecter. Ce taux se calcule par le ratio des nouveaux infectés des 7 derniers jours à ceux des 7 jours glissés un jour avant. Ce taux dépend des conditions « offertes » à la propagation de l'épidémie durant la dernière semaine : lorsque le plus probable passe en-dessous de 1, on dit qu'il devient probable que l'infection soit en train de reculer mais dès que la partie haute de l'intervalle de confiance passe en-dessous de 1, on a alors 98% de chance pour que l'infection soit en train de reculer. Le HCP3, a estimé que nous serions passés en dessous de l'unité début Mai 2020 mais sans intervalle de confiance. Pour ce qui nous concerne, nous anticipions déjà[i] que ceci devait probablement commencer durant la semaine du 11/05 et s'installer durablement durant la semaine du 18/05. Il convient toutefois de relativiser l'usage du taux de reproduction en vertu de ce qu'en dit l'Encyclopédie Wikipédia[ii]: « La relation entre le taux de reproduction et le seuil d'immunité collective repose sur un calcul qui n'est valide que dans une population bien mélangée. En revanche, les relations au sein de populations importantes sont mieux décrites par des « clusters », dans lesquels la maladie ne peut se transmettre qu'entre pairs et voisins. » C'est ce comportement en « cluster » de COVID19 qui impose le suivi de dizaines de milliers de personnes qui ont été en contact avec les sujets infectés. En effet, Le Directeur de l'Epidémiologie, annonçait le 25 avril[iii] : qu'un cumul de 17'843 proches des cas positifs au COVID-19, soit près de 5 fois le total des infectés de la veille (3'758), avaient été suivis par les services du Ministère de la Santé, sans doute aidés par la Direction Générale de la Sûreté Nationale... pour vaincre les résistances inciviques. Au même moment, 7'048 d'entre eux étaient encore suivies, soit plus de 2 fois le nombre de personnes en cours de soin (3'114), il y en a donc sans doute autour de 6'000 aujourd'hui. Evolution globale et prévisions avec maintien des conditions de confinement Le graphique de gauche de la Figure 6 montre l'évolution historique et prospective numérique des testés positifs et de leur segmentation en décès, rétablis et en cours de soin alors que le graphique de droite montre l'évolution de la segmentation des ces testés positifs. Dans le graphique de gauche, les données au-delà du 17 mai 2020 sont nos estimations. Le graphique de droite montre aussi l'évolution du pourcentage des tests positifs (échelle de droite). Si l'on avait pu maintenir le confinement jusqu'au terme de l'épidémie, nos prévisions nous portent à croire que l'on cumulerait environ à 7'400 cas d'infection (7'831 selon le dernier rapport du HCP[i]) et 192 décès. Dans le graphique de gauche, les valeurs au-delà du 17 mai 2020 sont nos estimations. Le maximum calculé des rétablissements aurait été passé le 16 mai 2020 et celui des infections trois semaines avant, le 24 avril. La curiosité réside dans un maximum des décès qui, le 10 avril, aurait précédé celui des infections mais cela pourrait s'expliquer par un agenda particulier de mise en œuvre de protocoles de traitement. Les graphiques de simulation des nombres journaliers sont montrés dans la Figure 7. Il ne faut pas se leurrer car les trop fortes fluctuations nous enseignent que hélas, une hirondelle ne fait pas le printemps et les évolutions relatives nous enseignent que l'on peut avoir un taux de reproduction en-dessous de l'unité tout en ayant encore des centaines ou même des milliers de nouveaux cas par jour. Doit-on rappeler qu'on peut être porteur asymptomatique du COVID-19 (sans aucun symptôme) et le transmettre à toutes les personnes approchées sans précautions, or, à l'instar de beaucoup d'autres pays, le Maroc n'a aucune connaissance du nombre réel de personnes infectées. Les bons chiffres du Maroc de cette onzième semaine après le début de l'infection ne sont là que parce les neuf semaines de confinement ont fortement ralenti la transmission du virus. Les chercheurs nous répètent que la peau de ce virus est faite d'une huile qui est diluée par les savons, qu'il se transmet à la bouche, au nez et aux yeux par la salive ou les postillons qui, sans projection (toux), se projettent à moins d'un mètre tout en sachant qu'il ne dure pas plus de quelques heures sur une surface inerte. En comprenant bien ceci, on saura ce qu'il reste à faire si l'on veut éviter de s'exposer et surtout exposer autrui au risque de mortalité et on passera sereinement cette période de confinement. Maintenant, « sortir du hammam (du confinement) n'est pas aussi simple que d'y rentrer » dit le dicton marocain mais on trouvera bien comment nous en sortir puisque le proverbe ne dit pas que c'est impossible ! Dans le concert des Nations, les chiffres marocains sont souvent à la traîne et nous voudrions ne pas changer nos habitudes en nous en sortant avec de plus faibles de cas positifs et de décès par million d'habitant. Ainsi, nous pourrons pour une fois, une fois seulement, paraphraser Jacques Brel : « Être une heure, rien qu'une heure durant, Beau, beau, beau et con à la fois !« . Par Amin BENNOUNA [email protected] [1] Ministère de la Santé, Portail Officiel du Coronavirus au Maroc, http://www.covidmaroc.ma/Pages/AccueilAR.aspx [2] Amin BENNOUNA, "Sept semaines de COVID-19 au Maroc", Ecoatcu, 20 Avril 2020, https://www.ecoactu.ma/sept-semaines-de-covid-19/ [3] Amin BENNOUNA, "Mi-mai 2020, l'augmentation du nombre de cas positifs serait 'normale' au Maroc", Ecoatcu, 14 Mai 2020, https://www.ecoactu.ma/covid-19-augmentation-des-cas-mi-mai/ [4] Amin BENNOUNA, "Neuf semaines de COVID-19 au Maroc", Ecoatcu, 03 Avril 2020, https://www.ecoactu.ma/neuf-semaines-de-covid-19/ [5] Amin BENNOUNA, "Dix semaines de COVID-19 au Maroc", Ecoatcu, 10 Avril 2020, https://www.ecoactu.ma/covid-19-2/ [6] Les taux communément indiqués pour atteindre une immunité collective (ou grégaire) dépassent allégrement les 50%, voir https://fr.wikipedia.org/wiki/Immunit%C3%A9_gr%C3%A9gaire [7] Yasmine Salih, "Coronavirus : Prépondérance de cas parmi l'entourage des patients, soit 85%", Webmagazine Hespress, 25 avril 2020, https://fr.hespress.com/141938-coronavirus-preponderance-de-cas-parmi-lentourage-des-patients-soit-85.html [8] Haut Commissariat au Plan, "Pandémie COVID19 dans le contexte national", 9 Mai 2020, https://www.hcp.ma/Pandemie-COVID-19-dans-le-contexte-national-Situation-et-scenarios_a2504.html