Un bilan mitigé a marqué la semaine du 03/05 au 10/05. La première : les rétablissements (2'554 cumulés dont 1'116 nouveaux) continuent à distancer les décès (188 cumulés dont 14 nouveaux). La deuxième : après avoir reculé la semaine précédente (27/4-3/5), le nombre de nouveaux testés positifs marque une hausse inhabituelle de 37% (1'160 face à 838 la semaine du 27/4-03/5) qui a été accentuée par les journées du 6 et du 9 mai. La troisième : du fait de cette forte augmentation du nombre de testés positifs, le nombre de personnes en soin a continué à stagner au lieu de commencer sa décrue. Les sources des données utilisées sont officielles, quoiqu'elles aient été indirectement collectées sur un site encyclopédique[i] quotidiennement tenu à jour avec les chiffres provenant du Ministère de la Santé du Maroc. L'évolution des tests réalisés chaque semaine (bleu clair) ainsi que celle de leur total (bleu roi) sont montrées en Figure 1. Le nombre de nouveaux tests hebdomadaires effectués est passé de 14'713 à 23'812, ceci signifie que les cas « fortement suspects » ont augmenté de 62% en une semaine (alors qu'ils avaient augmenté de 20% la semaine du 27/4-3/5). Sans doute les tests sélectifs permettent-ils d'épargner les ressources humaines et matérielles disponibles et les chiffres illustrent parfaitement le fait que les tests ne sont faits (pour l'instant seulement ?) que sur les cas « fortement suspects« . Nous n'en avons peut-être pas les moyens et sommes encore loin des campagnes de tests massifs réalisés par d'autres pays. Selon diverses déclarations de Mohamed El Youbi, Directeur de l'Epidémiologie au Ministère de la Santé, en plus, des personnes testées, 70% de personnes additionnelles, proches de personnes testées positives précédemment, seraient suivies par les services du Ministère de la Santé. Il semble donc que l'on continue à tester les mêmes profils (symptomatiques ou pas) mais, il y aurait eu, encore une fois, découverte de nouveaux foyers épidémiques qui auraient appelé une augmentation du nombre de tests. La Figure 2 montre l'évolution des tests positifs, des décès des personnes testées positives, des rétablissements et de ceux en soin de chaque semaine (les nouveaux à gauche et le cumul à droite). Avant d'atteindre sa valeur d'aujourd'hui (5 par an pour 1'000 habitants soit près de 3'450 décès par semaine[i]) le taux de mortalité brut du Maroc a mis soixante ans pour ne décroitre que d'un facteur 4, c'est pourquoi ce n'est pas vraiment le nombre de morts qui fait peur mais sa croissance dans le temps qui aurait pu atteindre 3'450 décès par semaine en 6 semaines si la vitesse initiale (15/03 au 12/04) avait été maintenue. Selon diverses déclarations de Mohamed El Youbi, Directeur de l'Epidémiologie au Ministère de la Santé, 80 à 90% des nouveaux cas font partie de l'entourage en contact avec les personnes précédemment testées positives. Même si le nombre de nouveaux testés positifs hebdomadaires a augmenté (1'116 face à 845 la semaine du 27/4-3/5), il semble qu'on ait passé le maximum. L'augmentation est due à la découverte de nouveaux foyers épidémiques qui on fait augmenter le nombre de cas positifs (conjoncturellement j'espère). Sans insister sur les autres chiffres et de leur cumul qui sont eux aussi montrés sur la Figure 2, notons toutefois que le nombre de personnes en soin a encore légèrement augmenté (+30) à 3'321 maintenant la même pression que les deux précédentes semaines sur les structures hospitalières. Nous disions à la fin de la septième semaine[i] que ce nombre a certes dépassé la capacité d'accueil en lits spécifiquement mis en service pour COVID-19 (3'000) mais que, heureusement, une très large majorité des personnes infectées sont asymptomatiques et ne nécessitent qu'un isolement sans hospitalisation (70 à 80% des cas selon diverses déclarations de Mohamed El Youbi, Directeur de l'Epidémiologie au Ministère de la Santé). Ceci fait que la capacité du Maroc en lits dédiés n'a donc pas été atteinte et que nos médecins n'ont encore jamais été mis devant le difficile choix de priorité des patients à traiter. Au stade actuel, la Figure 3 combinée aux autres informations enseignent les choses suivantes : * Les statistiques actuelles du Maroc indiquent que les porteurs de COVID-19 ont une chance sur 32 d'en mourir (3.1%), en moyenne et abstraction faite de toute faiblesse qui causerait une aggravation de ce risque. Toutefois, ce taux de décès de tous les testés positifs décroît de façon monotone depuis trois semaines même à l'échelle journalière, comme montré par la courbe rouge du graphique de droite de la Figure 3. * Dès lors que vous avez suffisamment de symptômes pour que les protocoles hospitaliers vous considèrent comme « fortement suspect« , vous avez : o environ 1 chance sur 11 d'être porteur de COVID-19 (9.2%), mais ce chiffre hebdomadaire décroît lui aussi régulièrement depuis la première semaine d'avril (de 21.1 à 9.2%), et il semble, comme nous le montrerons dans un autre rapport, directement corrélé au total du nombre de tests effectués comme montré par la courbe verte dans le graphique de droite de la Figure 3, o environ 1 chance sur 340 d'en mourir (0.29%), ce chiffre aurait, lui aussi, une tendance à baisser depuis la première semaine d'avril (de 1.44 à 0.21%). Cette forte baisse de la mortalité serait sans doute due à un certain succès des protocoles de soin. Le pourcentage des personnes testées positives chaque jour a une évolution certes erratique mais aussi tendanciellement baissière depuis fin mars, comme montré par la courbe bleue du graphique de gauche de la Figure 4. Ceci, tout en ayant une hausse tendancielle du nombre de tests journaliers. Une extrapolation linéaire du taux depuis le 26/03 mènerait à un taux de positivité théoriquement nul aux environs du 15 mai 2020, que nous annoncions déjà la semaine dernière[i] et que nous retrouvons ici. * Le graphique de droite de la Figure 4 montre le taux de reproduction du virus qui permet de connaître le nombre moyen de personnes qu'un porteur contagieux pourrait infecter. Ce taux se calcule par le ratio des nouveaux infectés des 7 derniers jours à ceux des 7 jours glissés un jour avant. Dépendant fortement des conditions « offertes » à la propagation de l'épidémie : o Lorsque le plus probable passe en-dessous de 1, on peut dire qu'il est probable que l'infection soit en train de reculer. Nous en étions là la semaine dernière et cette semaine, nous finissons sur une baisse. o Lorsque la partie haute de l'intervalle de confiance passe elle-même en-dessous de 1, on pourra dire qu'on il y aura 98% de chance pour que l'infection soit en train de reculer. Pour l'instant nous confirmons nos estimations de la semaine dernière5: ceci devrait probablement commencer durant la semaine du 11/05 et s'installer durablement durant la semaine du 18/05, confirmant du même coup la date d'annulation théorique du taux de positivité du graphique de gauche de la même Figure 4. Il est vrai qu'avec encore 150 nouveaux cas par jour, de telles estimations semblent très difficiles à imaginer. Les taux de reproduction pour l'Allemagne et la Turquie montrés en Figure 5, qui sont déjà descendus en dessous de l'unité, ont été calculés dans les mêmes conditions que pour le Maroc (Figure 4) et nous enseignent qu'une hirondelle ne fait pas le printemps puisque l'on peut passer en dessous de l'unité tout en ayant encore 1'000 (D) ou 1'800 (TR) nouveaux cas et 62 (TR) ou 100 (D) décès par jour. Les intervalles de confiance sont plus restreints que ceux du Maroc à cause des plus grands nombres. Doit-on rappeler qu'on peut être porteur asymptomatique du COVID-19 (sans aucun symptôme) et le transmettre à toutes les personnes approchées sans précautions, or, à l'instar de beaucoup d'autres pays, le Maroc n'a aucune connaissance du nombre réel de personnes infectées. Les chiffres bas du Maroc de cette dixième semaine après le début de l'infection ne sont là que parce les huit semaines de confinement ont fortement ralenti la transmission du virus. Les chercheurs nous répètent que la peau de ce virus est faite d'une huile qui est diluée par les savons, qu'il se transmet à la bouche, au nez et aux yeux par la salive ou les postillons qui, sans projection (toux), se projettent à moins d'un mètre tout en sachant qu'il ne dure pas plus de quelques heures sur une surface inerte. En comprenant bien ceci, on saura ce qu'il reste à faire si l'on veut éviter de s'exposer et surtout exposer autrui au risque de mortalité et on passera sereinement cette période de confinement. Maintenant, « sortir du hammam (du confinement) n'est pas aussi simple que d'y rentrer » dit le dicton marocain mais on trouvera bien comment nous en sortir puisque le proverbe ne dit pas que c'est impossible ! Dans le concert des Nations, les chiffres marocains sont souvent à la traîne et nous voudrions ne pas changer nos habitudes en ayant les chiffres les plus faibles de cas positifs et de décès par million d'habitant. Ainsi, nous pourrons pour une fois, une fois seulement, paraphraser Jacques Brel : « Être une heure, une heure seulement Être une heure, une heure quelquefois Être une heure, rien qu'une heure durant Beau, beau, beau et con à la fois !« Par Amin BENNOUNA [email protected] [1] Wikipédia, L'encyclopédie libre, « Pandémie de maladie à coronavirus de 2020 au Maroc« , https://fr.wikipedia.org/wiki/Pand%C3%A9mie_de_maladie_%C3%A0_coronavirus_de_2020_au_Maroc [1] Université de Sherbrooke, Ecole de Politique Appliquée, « Perspective monde« , http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/tend/MAR/fr/SP.DYN.CDRT.IN.html [1] Amin BENNOUNA, « Comparaison de l'évolution de l'épidémie COVID19 au Maroc avec l'Italie, l'Espagne et la France« , https://www.researchgate.net/publication/340574900_Comparaison_de_l'evolution_de_l'epidemie_COVID19_au_Maroc_avec_l'Italie_l'Espagne_et_la_France [1] Amin BENNOUNA, « Sept semaines de COVID-19 au Maroc », Ecoatcu, 20 Avril 2020, https://www.ecoactu.ma/sept-semaines-de-covid-19/ [1] Amin BENNOUNA, « Neuf semaines de COVID-19 au Maroc », Ecoatcu, 03 Avril 2020, https://www.ecoactu.ma/neuf-semaines-de-covid-19/