La Contribution de l'Alliance des Economistes Istiqlaliens aux troisièmes Assises de la fiscalité est enfin tombée. Défendant la stabilité su système, son efficience, son caractère solidaire et simplifié, l'Alliance a choisi de décliner sa contribution en quatre principales thématiques. Il faut d'abord souligner que l'Alliance, considérant que la politique budgétaire de l'Etat (dont la fiscalité est une partie importante) constitue un des principaux leviers de la politique économique et sociale du Pays, a formulé le souhait ces troisièmes assises soient consacrées aux finances publiques dans leur ensemble et non seulement à la fiscalité. Aussi, toute réflexion de réforme du cadre fiscal devrait-elle privilégier un élargissement de l'assiette et une réduction des taux dans le cadre d'un système fiscal légitimé et équitable aux yeux des contribuables ; économiquement incitatif, transparent, simple, clair, efficient, stable sur le moyen terme, solidaire, juste et ne laissant pas d'espace à l'arbitraire. Pour fixer les axes de sa contribution, l'Alliance a basé son travail sur les axes retenus par la note de cadrage établie par le Comité Scientifique des Assises. La première famille de réformes proposées a trait au consentement à l'impôt, l'équité et la transparence du système fiscal. Le constat fait est que les activités informelles livrent une concurrence déloyale aux activités formelles, notamment celles s'adressant au marché national, et plus particulièrement les productions des PME. Les écarts de marges entre ces deux types d'activités engendrent un effet d'éviction sur les investissements structurés et les entreprises citoyennes, nous apprend le livrable de l'Alliance. Pour autant l'Alliance propose d'identifier l'informel « vivrier », mais stabilisateur social, et proposer un plan d'intégration sur 5 ans, accompagné de formation, d'accès à la couverture médicale, à la retraite et au financement. Pour une meilleure adhésion et consentement à l'impôt, l'Alliance préconise de tenir compte de la capacité contributive des agents économiques et instituer une progressivité de l'impôt. Elle appelle au renforcement de la transparence en communicant régulièrement sur les principaux emplois qui sont faits des recettes fiscales, notamment ceux qui affectent directement le contribuable. L'une des propositions phares de cette première famille de mesure est la mise en place un Observatoire national de la fiscalité chargée de veiller sur la stratégie fiscale et d'évaluer les politiques fiscales et leur conformité aux objectifs fixés en matière d'équilibre des finances publiques, d'efficience économique et d'équité fiscale. Si les propositions versent vers la protection du contribuable contre le pouvoir interprétatif de l'administration fiscale en mettant en place une Direction de la Législation Fiscale, indépendante de la Direction Générale des Impôts, en charge de l'interprétation de la doctrine fiscale ; L'Alliance appelle à renforcer le dispositif des sanctions à l'encontre des agents économiques qui se soustraient aux obligations et au paiement de leurs impôts. Il est bien entendu, les sanctions fiscales doivent être motivées, précise l'Alliance. Priorité au pouvoir d'achat et à la promotion de la classe moyenne Sujet fétiche du parti de l'Istiqlal, qui n'a pas hésité, en mai dernier de mettre l'Exécutif au pied du mur avec son mémorandum portant Loi de Finances rectificatives avec une série de mesures à caractère social. L'Alliance ne déroge pas à cette ligne directrice en insistant que le système fiscal actuel génère une pression fiscale « mal répartie » du fait de la concentration de certains impôts sur une catégorie d'agents économiques (2% des sociétés paient 80% des recettes fiscales au titre de l'IS et de la TVA). Alors qu'une grande partie de contribuables (personnes physiques ou morales) continuent d'évoluer en dehors du circuit économique « fiscalisé ». Aussi, la TVA qui frappe les produits nécessaires pèse-t-elle plus lourdement sur les contribuables à faible revenu que ceux qui disposent de revenus élevés. D'où la recommandation d'instaurer l'utilisation d'une quote-part de la recette de la TVA pour financer des programmes de solidarité ; une manière de redistribution équitable et une baisse de la pression fiscale « indirecte ». « La réforme de cet impôt s'impose aux niveaux de la simplification de la structure des taux, la généralisation de son champ d'application ; la généralisation du droit à déduction ; l'évaluation des régimes dérogatoires en vigueur, l'homogénéisation du fait générateur (régime encaissement ou régime débit) et la généralisation du remboursement systématique des crédits de TVA dans les délais », préconise l'Alliance. En matière d'IR, l'Alliance propose une homogénéisation de l'imposition de l'ensemble des catégories de revenus, en adoptant une imposition progressive. Une revue des tranches du barème progressif actuel de l'IR et instauration d'une indexation triennale des tranches sur le taux d'inflation pour être en phase avec la réalité économique, s'impose également. Pour rehausser le pouvoir d'achat de la classe moyenne, on appelle à un relèvement de la première tranche à 36.000 DH, l'aménagement des tranches intermédiaires et le relèvement de la tranche supérieure à 240.000 DH. L'un des points défendus par le parti et que l'on retrouve dans les propositions de l'Alliance est l'introduction de déductions à caractère social pour couvrir les dépenses supportées par certains ménages, principalement une déduction pour frais de scolarité ; des frais d'éducation, de formation et de formation continue, pour ses enfants et pour soi-même, stimulerait l'éducation et l'actualisation des connaissances, constituant ainsi un élément d'amélioration et de promotion sociales. Hormis les particuliers, l'Alliance propose la mise en place d'une fiscalité adaptée aux activités à vocation non commerciale (médecins, pharmaciens, avocats, architectes, notaires.....) tout en leur permettant de déduire leur couverture médicale, et celle de leur conjoint et enfants ; leur cotisation aux caisses de retraites dans la limite de 50% de leur revenu... Une autre catégorie de citoyens figure dans la ligne de mire de l'Alliance qu'il faut réhabiliter : les handicapés. Ainsi l'on appelle à exonérer les emplois des handicapés de tout prélèvement fiscal... La liste des propositions pour cette catégorie d'allonge et va vers plus d'équité fiscale. Une fiscalité au service de l'investissement et de la création d'emplois Dans la troisième famille de proposition, l'Alliance se focalise dans une premier temps sur les PME qu'elle qualifie de porteuses de projets d'investissements à petite ou moyenne dimension financières, et souvent plus « labour intensives » et qui doivent bénéficier au moins de la même attention et de plus d'avantages fiscaux et sociaux que les grands projets capitalistiques et souvent générateurs de moins d'emplois. « L'accent doit être mis sur la mise en place simultanément d'incitations fiscales et sociales pour favoriser les jeunes entreprises ou « entreprises émergentes » ainsi que la reprise et la restructuration des entreprises en difficulté », soutient l'Alliance. Pour ce faire, il est préconisé de supprimer la cotisation minimale qui, selon l'Alliance, ne repose sur aucun fondement économique. On appelle également à poursuivre la baisse du taux d'IS adoptée par la majorité des pays et viser un taux d'IS ne dépassant pas 25%. Dans une logique de solidarité (aussi bien territoriale que sociale), les économistes Istiqlaliens défendent l'instauration d'une contribution à la charge des activités protégées par des agréments, licences ou monopole de l'Etat. « Il est un fait que le bénéfice de ces sociétés comprend une part liée aux avantages générés par le monopole, les agréments ou les licences », révèle-t-on. Et pour encourager l'investissement dans les régions reculées, l'Alliance appelle à la mise en place d'une exonération d'IS pendant 10 ans pour les entreprises installées dans ces zones reculées définies par disposition réglementaire. Cette mesure s'appliquerait à des territoires à définir par décision gouvernementale. Sur un autre registre, l'une des mesures proposes appelle à faire bénéficier les entreprises en difficulté des mêmes avantages que les créations. Ces avantages s'appliqueraient aux entreprises en difficulté pour lesquelles le repreneur s'engage sur un plan de redressement qui préserve les emplois et met en place un plan de développement de l'entreprise en question... La fiscalité à l'épreuve de la régionalisation avancée La dernière famille de mesures concoctées par l'Alliance concerne l'adaptation de la fiscalité aux spécificités et objectifs de développement des Régions et territoires. « La mise en œuvre de la régionalisation avancée devra être l'occasion de veiller à une répartition rationnelle et complémentaire des attributions et prérogatives entre les niveaux central, régional et local. Elle peut permettre une vraie responsabilisation des structures élues et une compétition économique et sociale entre les Régions », rappelle l'Alliance. En attendant, la fiscalité locale souffre de nombreux dysfonctionnements et d'un faible rendement avec une recettereprésentant à peine 1% du PIB. « Nous proposons de privilégier la mise en place d'une imposition simplifiée, basée sur une taxation des propriétés et transactions immobilières (actifs immobiliers au sens juridique du terme) rattachés au territoire et sur une taxation partielle de l'activité économique qui y est générée. Pour une meilleure cohérence avec la fiscalité d'Etat, il est impératif d'adopter les mêmes bases d'imposition pour l'ensemble des impôts de même nature tant à l'échelle nationale que régionale », souligne-t-on. De même qu'il est privilégié d'innover à travers la création de « Zones à fiscalité allégée » (qui sont des Zones à inclusion prioritaire) dans les Régions et Communes où l'investissement est, à priori, moins attrayant, précise-t-on. Ces zones peuvent être exonérées totalement ou imposées symboliquement en termes d'impôts à portée nationale pendant 15 ans. En revanche, les taxes locales seront maintenues pour contribuer au financement des efforts locaux de développement, suggère l'Alliance. Par ailleurs, sur la base de contrat-programme Etat-Région, ou de conventions fiscales avec certaines régions, l'Alliance propose de défiscaliser, totalement ou en grande partie, sur la même période, certaines activités pouvant améliorer la création de richesses et l'amélioration de l'attractivité et du cadre de vie de ces Régions. Ces avantages peuvent inclure les activités de mise ne valeur des ressources locales ; ainsi que les secteurs privés de l'enseignement et de la santé. Aussi, les économistes Istiqlaliens appellent à l'exploitation optimale des ressources des Régions au profit des populations locale en priorité (intégrant la gestion et la répartition des ressources naturelles selon les règles de la durabilité et de l'équité) permettrait d'accompagner une évolution vers plus d'équité territoriale.