D'année en année, les besoins de financement de l'économie nationale s'aggravent, soit 4,5 % du PIB en 2018 contre 3,7% en 2017. Les investissements sont financés en grande partie par la dette extérieure publique. La configuration actuelle de l'investissement montre que l'intensité capitalistique (capital par personne active) reste faible par rapport à celui des pays à développement comparable. Avec un indice ICOR (rendement de l'investissement) très faible étant donné qu'une grande partie des investissements est orientée vers l'infrastructure. La poursuite de la dynamique de l'investissement questionne sur comment l'orienter et surtout comment la financer. Une question qui taraude l'esprit des analystes et sur laquelle s'est arrêtée longuement Ahmed Lahlimi à l'occasion de la présentation des réalisations de l'année 2018 et les perspectives pour 2019. Continuerons-nous à financer l'investissement par la dette extérieure publique dont l'encours ne cesse de progresser ? Dans l'encours de la dette publique, une part importante revient aux Entreprises et établissements publics. La dette extérieure des établissements et entreprises publiques garantie par l'Etat aurait atteint près de 16,4% du PIB en 2018 au lieu de 13,6% entre 2010 et 2017, dépassant largement, depuis l'année 2015, la dette extérieure du trésor. Dans ces conditions, le taux d'endettement public global aurait atteint 82,2% du PIB en 2018 au lieu de 82% en 2017. Face à ces chiffres inquiétants, le Haut commissaire au plan pousse la réflexion plus loin et s'interroge sur les critères à remplir par les EEP pour bénéficier des financements. Aussi, est-il nécessaire de procéder à l'évaluation des projets d'investissements pour statuer sur leur faisabilité, dans l'objectif d'éviter la déperdition financière. Autre point important à signaler est le décalage entre l'investissement dans l'infrastructure et celui dans les activités économiques créatrices de richesses et d'emplois. Un décalage à ne pas perdre de vue pour améliorer un tant soit peu la rentabilité de la formation brute du capital fixe et, par ricochet, sa contribution dans la croissance économique du pays. «En matière de programmation des projets d'investissements, il s'avère également important de mettre en place des indicateurs permettant d'opter pour un secteur au lieu d'un autre», avise le Haut commissaire au plan. Les sources de l'épargne… L'épargne nationale aurait pu remédier à la problématique du besoin de financement, mais force est de constater que le taux d'épargne intérieure est passé à 28% en 2018 loin des 32% d'il y a quelques années. Il regrette par ailleurs que la politique actuelle des contrats programmes n'obéit pas à une convergence globale, à une harmonie de moyens et d'objectifs en cohérence avec le cadre de la politique macroéconomique. Encore faut-il que les PME participent convenablement à l'élaboration desdits contrats-programmes parce qu'elles représentent 95% du tissu économique national. Il corrobore ses propos par des chiffres : les PME s'autofinancent à hauteur de 80%, contribuent à 4,7% de l'investissement et à 50% de l'épargne nationale. Les PME peuvent contribuer davantage à l'épargne intérieure. Leur participation peut être encore plus conséquente si des efforts sont déployés. Il rappelle à juste titre que seuls 11% des entreprises (les plus grandes) contribuent à l'investissement avec un accès privilégié au crédit. La deuxième source de l'épargne est les ménages qui y contribuent à hauteur de 35%. Mais les revenus des ménages ont tendance à ralentir. La principale source des revenus des ménages est les salaires, soit 42%. Le salaire brut évolue faiblement de 0,2% avec une structure inégalitaire. Pis encore, les salaires ont tendance à baisser si l'on prend en considération le coût de la vie. Ajoutons aux salaires, les transferts des MRE qui représentent une autre source de l'épargne. Inutile de rappeler la corrélation qui existe entre l'épargne et le revenu : l'épargne augmente deux fois plus que le revenu. Autre composante importante dans le financement de l'économie qui fait défaut est les crédits à l'économie. Or, au cours des dernières années, les crédits distribués par les banques aux différents agents économiques ont évolué à un rythme insuffisant pour impulser une dynamique particulière à l'investissement. Les crédits bancaires, après l'évolution positive à deux chiffres enregistrée durant la période 2008-2012, ils auraient entamé une série de décélérations. Leur rythme d'accroissement, qui est passé à 3,2% entre 2013 et 2017, n'aurait pas dépassé 2% en 2018. Cette évolution aurait été attribuable à une amélioration timide des principales composantes des crédits, notamment ceux destinés à l'équipement et à l'immobilier. Donc s'il y a des efforts à fournir pour financer l'économie, c'est bien au niveau de ces composantes. Lire également : L'HEURE DE REPENSER LE PARADIGME DE L'EPARGNE A SONNE