L'exercice budgétaire 2019 a connu le parachèvement de la mise en œuvre de certaines dispositions de la LOF, notamment celles relatives à la mise en place de la programmation budgétaire triennale. La Cour des comptes révèle dans son rapport 2019-2020 les obstacles dont pâtit encore le projet. « En plus, cette année a été caractérisée par la poursuite des efforts entrepris pour l'introduction de la comptabilité générale de l'Etat et simultanément l'élaboration des états de synthèse au titre de l'exercice 2020 », rappelle la Cour des comptes dans son rapport 2019-2020. Depuis la publication de la LOF, la Cour a entrepris des travaux et des missions de contrôle dont l'objectif est le suivi de l'implémentation des dispositions de ladite loi organique. Ces missions ont permis de relever des observations et de formuler des recommandations dont les plus importantes sont présentées dans les développements qui suivent. Elles concernent la mise en œuvre de la LOF, les résultats de l'exécution de la loi des finances au titre de l'exercice 2019 et l'état d'avancement de la comptabilité générale. Concernant la mise en œuvre des dispositions relatives à la démarche de performance, la Cour a noté que la gestion des finances publiques a enregistré un progrès important dans la mise en œuvre de la démarche de performance. Toutefois, cette dynamique reste contrainte par certaines insuffisances qui limitent les résultats et les acquis escomptés, dont notamment la cohérence relative entre les stratégies sectorielles et certains programmes budgétaires, l'adoption d'un grand nombre d'objectifs et d'indicateurs rendant difficile le suivi de la performance, l'absence de systèmes d'information de suivi de la performance et le retard enregistré dans la discussion des rapports annuels de la performance au niveau du parlement. S'agissant du déficit budgétaire, l'année 2019 a enregistré un déficit budgétaire de 41.517 MDH (3,6% du PIB), soit une augmentation de 8% par rapport aux prévisions (38.384 MDH). En effet, l'ampleur de la hausse des recettes ordinaires (plus 6.875 MDH) n'a pas pu couvrir l'importante hausse des dépenses d'investissement (plus 14.659 MDH) et la baisse du solde des comptes spéciaux du Trésor (- 3,712 MDH). Par rapport à 2018, le déficit budgétaire de 2019 a été relativement stable, enregistrant une légère baisse de 141 MDH. Les recettes du budget l'Etat au titre de l'exercice 2019, se sont élevées à 475,7 Mds de DH, dont 365,9 Mds de DH au titre du budget général, 101,4 Mds de DH des comptes spéciaux du Trésor et 8,4 Mds de DH des services de l'Etat gérés de manière autonome. Les recettes du budget général de l'Etat se composent de 260,8 Mds de DH de recettes ordinaires et 105,1 Mds de DH de recettes d'emprunt. Les recettes fiscales ont enregistré au titre de 2019, un montant de 220,5 Mds de DH, soit le même niveau que pour 2018. L'administration fiscale a déployé des efforts importants, notamment en ce qui concerne l'incitation des contribuables à respecter leurs engagements fiscaux, la transformation digitale et son ouverture vis-à-vis d'autres acteurs publics et privés qui lui ont permis l'accès à diverses bases de données en vue de mieux appréhender le potentiel fiscal. Toutefois, en dépit de ces efforts, l'adhésion de certains contribuables à l'impôt demeure insuffisante. Les indicateurs ci-après reflètent cette situation : Globalement, l'analyse de la structure des recettes encaissées montre que 90% des encaissements proviennent de 8% des contribuables. Sur une population fiscale de 2,2 millions de contribuables recensés, les actifs ne dépassent pas les 50%. En matière d'IS, sur une population fiscale de 493.617 contribuables recensés, l'effectif des contribuables ayant déposé une déclaration durant le dernier exercice n'est que de 241.776, de surcroît, la part des déclarations bénéficiaires est à peine de l'ordre de 32% des dites déclarations. Concernant la TVA, cette taxe compte une population d'assujettis de 833.181 contre une population active qui ne dépasse pas 281.793 contribuables. Concernant les dépenses globales, elles se sont établies à 459,8 Mds de DH, dont 365,7 Mds de DH au titre du budget général, 90,9 Mds de DH au titre des comptes spéciaux de Trésor et 3,3 MMDH comme dépenses des services de l'Etat gérés de manière autonome. Pour le budget général de l'Etat, les dépenses sont réparties en 215,6 Mds de DH de dépenses de fonctionnement, 70,6 Mds de DH de dépenses d'investissement et 79,5 Mds de DH de dépenses liées à la dette publique. En 2019, les dépenses du personnel se sont établies à 111,8 Mds de DH (37,9% des dépenses globales), soit une augmentation de 5,5 Mds DH par rapport à 2018. Ces dépenses ont progressé principalement en raison de l'augmentation générale des salaires décidée dans l'accord tripartite (gouvernement, patronat, syndicats) du 25 avril 2019, suite au processus du dialogue social. Quant aux charges sociales, elles ont atteint 19,9 Mds de DH, enregistrant des augmentations des cotisations de 1,2 Md de DH à la Caisse marocaine des retraites (CMR) et 97 MDH au profit de la Caisse nationale des organismes de prévoyance sociale (CNOPS). En intégrant les charges sociales, les dépenses du personnel s'élèvent à 131,6 Mds de DH comparativement à 124,8 Mds de DH une année auparavant, soit une progression de 6,8 Mds de DH. Ainsi en 2019, elles représentent 11,4% du PIB. Pour les dépenses de matériel et dépenses diverses (MDD), elles se sont élevées, au titre de l'exercice 2019, à 47,6 Mds de DH, dépassant celles exécutées en 2018 de 4,2 Mds de DH, soit une hausse de 9,6%. En ce qui concerne les dépenses d'investissement au titre du budget général de l'Etat de l'exercice 2019, elles ont atteint 70,6 Mds de DH enregistrant ainsi une augmentation de 4,1% par rapport à 2018. Par ailleurs, la part des charges communes dédiées aux investissements dans l'ensemble des dépenses d'investissement au cours de 2019 est située au même niveau enregistré en 2018 (28%). Par conséquent, l'effort de réduction de l'enveloppe dédiée au chapitre des charges communes d'investissement censé contenir uniquement les dépenses non rattachables aux chapitres d'investissement des ministères, demeure insuffisant. Par ailleurs, la loi de finances pour l'année 2020 a été exécutée dans un contexte exceptionnel caractérisé par la pandémie du Covid-19 conjuguée à une année de sécheresse avec des effets qui ont lourdement impacté l'économie nationale. A l'instar de la quasi-totalité des pays du monde, un arsenal de mesures budgétaires a été adopté pour amortir les conséquences économiques et sociales de la crise sanitaire, réduire les impacts sur la stabilité économique, maitriser les sources d'approvisionnement et soutenir les couches sociales vulnérables et les secteurs affectés par la crise. Malgré les efforts entrepris et les mesures instaurées, les conséquences économiques et sociales de la crise ont conduit à des déséquilibres importants au niveau des finances publiques en comparaison avec la tendance prévue. A cet effet, les hypothèses ayant présidé l'élaboration de la loi de finances pour l'année 2020 ont été fortement compromises poussant le gouvernement à procéder à la préparation d'un projet de loi des finances rectificative qui a revu le taux de croissance à -5% contre 3,7% prévu par la loi de finances initiale et un déficit budgétaire de 7,5% du PIB contre 3,5% prévu. Le creusement du déficit budgétaire en 2020 suite à la crise sanitaire provient principalement de la diminution des recettes et l'augmentation des dépenses d'investissement. En outre, dans le cadre de la préparation de la mise en œuvre de la certification des comptes de l'Etat à partir du 1er janvier 2020, la Cour des comptes a entamé en 2019 deux missions visant à évaluer le dispositif de contrôle interne et la fonction d'audit interne au sein de l'administration et à apprécier les systèmes d'information au sein des directions du ministère de l'économie et des finances. En outre, la Cour a mené, en 2020, une mission exploratoire pour évaluer l'état d'avancement de la mise en place des diligences prises pour la mise en œuvre des dispositions relatives à l'institution de la comptabilité générale par la trésorerie générale du Royaume en sa qualité d'organe habilité à élaborer les comptes annuels de l'Etat. De même, la Cour a initié, dans le cadre de sa coopération avec certaines institutions supérieures de contrôle paires, une série de mesures portant sur la prise en compte des bonnes pratiques internationales en la matière, le renforcement des compétences professionnelles en relation avec l'exercice de l'attribution de certification ainsi que leur dissémination au sein de ses structures. « Toutefois, en dépit des avancées significatives dans la mise en place de la LOF concernant la comptabilité générale et l'élaboration des états financiers de l'exercice 2020, ce projet pâtit encore de certains obstacles liés essentiellement à l'absence d'une stratégie claire sur la réforme et son importance et à la non implication de tous les intervenants. Pratiquement, certaines actions restent planifiées sur le moyen, voire le long terme sans échéancier », annonce la Cour des comptes. Il s'agit particulièrement du recensement et de la valorisation exhaustive des immobilisations et des stocks, du recensement de la dette spécialement les contrats d'emprunt et les engagements en hors bilan et des restes à recouvrer de l'Etat.