Dans un contexte marqué par un rappel à l'ordre royal, des scandales à répétition, des tentatives de suicide de citoyens victimes du phénomène de spoliation foncière et par des meurtres, le gouvernement s'engage à mettre les bouchées doubles pour s'attaquer aux maux dont souffre le secteur foncier. Ainsi, il prévoit de «mettre en œuvre une réforme globale du secteur foncier». C'est trop ambitieux, vu la complexité des problèmes en présence mais il devient urgent de neutraliser ce «monstre» qui, non seulement gène le développement économique du pays mais, de plus, il menace sa stabilité sociale. De nombreuses études ont démontré que le régime foncier est une contrainte à la croissance économique ; la dernière est celle qui a été menée en 2014, conjointement par les services de la Présidence du Gouvernement, la Banque Africaine de Développement et Millenium Challenge corporation. Comment le gouvernement compte-t-il opérer et quelles sont les principales mesures prévues par son programme ? En gros, elles s'articulent autour de deux axes ; le premier a trait à l'amélioration de la gouvernance du secteur et le second à la mobilisation du foncier pour en faire un levier du développement économique et social. Concernant le premier axe, il est prévu d'«ouvrir le chantier de la mise à jour, de la modernisation et de la révision de l'arsenal juridique encadrant le foncier selon une vision globale». En effet, il est grand temps de refondre en profondeur le régime juridique du foncier qui se caractérise par une sorte d'opacité générée par la diversité des statuts et par le nombre élevé des intervenants dans le secteur. Pour sortir de cette situation qui est très préjudiciable à la sécurité de la propriété foncière, il n'y a pas trente six solutions; la seule issue est d'unifier le régime foncier en généralisant l'immatriculation foncière. Le statut Melk et les statuts coutumiers sont devenus obsolètes ; ils ne répondent plus aux exigences du monde moderne. Quant on voit les superficies qu'ils couvrent, on s'aperçoit de l'ampleur des dommages qu'ils occasionnent à l'économie nationale et à la paix sociale. Débarrassons-nous de ces statuts, ils ne servent plus à rien. Plus grave, ils gênent la marche du pays. Et ce ne sont pas les moyens financiers qui manquent. Loin de là, l'Agence nationale de la conservation foncière dégage chaque année des excédents financiers en milliards de dirhams. Seulement, au lieu d'être affectés à la généralisation de l'immatriculation qui piétine depuis plus d'un siècle, ils sont reversés au budget général de l'Etat. Conscient du retard pris par l'immatriculation, le gouvernement prévoit d'«accélérer le rythme de généralisation de l'immatriculation à travers notamment les opérations d'immatriculation d'ensemble ». Dans le cadre du même axe, le gouvernement, ambitionne de mettre en place un plan doté de moyens budgétaires pour s'attaquer à deux problématiques qui ont fait couler beaucoup d'encre ces dernières années, à savoir la non exécution par l'Etat des décisions judiciaires prononcées à son encontre et le retard dans le traitement de l'indemnisation des propriétaires dont les biens font l'objet d'expropriation pour cause d'utilité publique. Concernant le second axe, celui de la mobilisation du foncier pour en faire un levier du développement économique et social, plusieurs actions sont retenues. Tout d'abord, le gouvernement annonce sa volonté d'accélérer le rythme de «mélkisation» des terres agricoles situées dans les périmètres irrigués. D'un autre côté, le programme prévoit la révision du dispositif juridique régissant l'expropriation dans le but de renforcer les droits des propriétaires et de leur garantir une indemnisation équitable. Un autre point et pas des moindres, il consiste en l'adoption de critères précis concernant les opérations de cession et de location des immeubles publics dans un cadre transparent garantissant l'égalité des chances et ce, à travers la mise à la disposition des investisseurs des informations au sujet de la réserve foncière publique et les possibilité de sa mobilisation. Toujours dans le but de favoriser l'investissement, le nouveau gouvernement prévoit entre autres, la mise en place de mécanismes en vue de maîtriser le marché foncier et de réduire la spéculation foncière et l'adoption d'une stratégie nationale, globale et intégrée dans le domaine de l'habitat avec la mobilisation du foncier qui lui est nécessaire.