La mort de Mohamed Benaïssa, ancien ministre des affaires étrangères et homme de culture    Décès de Mohamed Benaïssa, ancien ministre marocain des Affaires étrangères    Entrée en vigueur de l'Accord sur l'exemption de visa entre le Maroc et le Kazakhstan    Sanlam Maroc investit 150 millions de Dirhams dans Dislog Group    Le Trésor devrait maîtriser son déficit à 58,2 MMDH en 2025 (AGR)    Le Vice-Premier ministre, ministre des AE kazakh salue le leadership visionnaire de Sa Majesté le Roi    Coupe du Trône: Le tirage au sort des phases finales le 4 mars    L'ambassade du Maroc à Amman célèbre les enfants palestiniens bénéficiaires du 3ème Programme « Unis, on s'entend mieux »    Concentrix et la Fondation JADARA unissent leurs forces pour l'éducation et l'insertion des Jeunes dans les technologies    Transport aérien : Un record de 32,7 millions de passagers à fin 2024    HCP : hausse de 0,1% de l'IPP des industries manufacturières    Après l'éviction de Abkari, Idriss Aarabi nommé DG de "Tanger Med"    Sahara : Le Kazakhstan soutient l'intégrité territoriale du Maroc    Dimanche premier jour du mois de Ramadan au Maroc    Samedi premier jour du mois sacré aux Emirats arabes unis    Crise France-Algérie: Vers une rupture des relations diplomatiques?    UA : Le Maroc préside le CPS pour le mois de mars et plaide pour une Afrique pacifique, stable et prospère    Info en images. Une liaison aérienne directe Marrakech-Atlanta dès octobre 2025    Botola : La Renaissance de Berkane et le Wydad de Casablanca se neutralisent    Boujdour : le stade de l'Intégrité-territoriale rénové et remis aux équipes régionales    Haier devient sponsor majeur de la Fédération royale marocaine de football    Suspendu pour dopage, Jannik Sinner écarté des nominations Laureus    Maroc-Egypte : un « Fast Track » pour faciliter et accélérer l'accès des exportations marocaines    Investissements : le Premier ministre tchadien rencontre une délégation du fonds d'investissement marocain Al Mada    Suspension de l'aide américaine : quel impact pour le Royaume ?    Santé : l'OMS maintient le plus haut niveau d'alerte pour l'épidémie de mpox    Villa Carl Ficke : Le passé recomposé, l'avenir exposé    Soutien aux projets culturels 2025 : Le ministère de la Culture lance l'appel à candidatures    La nouvelle commission de soutien à la production cinématographique dévoilée    Festival : Jazzablanca fait peau neuve    Littérature : Mohammed Serifi-Villar sous "Le Ciel carré"    Accès à la culture et attractivité du Français : A bâtons rompus avec la DG de l'IFM    Meydene dévoile une programmation exceptionnelle pour le Ramadan 2025    Le Maroc envisagerait d'acquérir deux sous-marins militaires    Le Comex de l'Istiqlal salue la décision Royale et appelle à un programme d'urgence pour développer le cheptel national    En 2002, Washington a proposé à Madrid de restituer au Maroc les Îles Zaffarines et d'autres territoires, selon de nouvelles révélations inédites    Mobilité durable et sécurité routière : l'Alliance des ingénieurs istiqlaliens trace la voie pour l'avenir    Le médiateur du Royaume défend la promotion de la participation citoyenne dans la protection des droits environnementaux    Nouvelles informations sur le démantèlement de la cellule terroriste liée au groupe Etat islamique, le silence du gouvernement d'Aziz Akhannouch interpelle    Les prévisions du vendredi 28 février    Le Maroc participe aux célébrations du 60e anniversaire de l'indépendance de la Gambie avec une délégation militaire de haut niveau    Cosumar: un CA consolidé de 10,23 MMDH en 2024    Agadir accueille la réunion finale de planification des manœuvres "African Lion 2025"    L'Agence Bayt Mal Al-Qods inaugure les nouvelles cours du campus de l'Université d'Al-Qods à Beit Hanina    Le Chef du gouvernement préside une réunion du comité de pilotage du suivi des projets de stades sportifs pour la CAN 2025 et la Coupe du monde 2030    Botola D1/J23: RSB-WAC , la grande affiche de ce vendredi !    Zelensky à Washington : un accord au cœur de la rencontre avec Trump    À Fès, le musée Al Batha des arts islamiques inauguré après sa restauration    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La ville marocaine : une urgence à traiter
Publié dans Challenge le 03 - 12 - 2014

Nizar Baraka, Président du Conseil économique, social et environnemental (CESE).
De l'avis de beaucoup de citoyens et même de beaucoup d'élus, nos villes vont mal. Les citoyens sont fâchés avec la gestion municipale et ne portent pas un jugement positif sur le cadre de vie qu'offre la ville. Depuis quelques années, on nous propose un nouveau concept : la politique de la ville. Les tâtonnements dans la recherche d'un contenu concret à ce concept continuent et nos problèmes urbains aussi. Le CESE s'est penché sur la question de la ville, son diagnostic est connu et les citoyens marocains l'ont déjà fait. par S.ALATTAR
Selon le rapport du CESE, les villes sont appelées non seulement à satisfaire les besoins en emplois pour le million de chômeurs urbains actuels, mais aussi à se préparer aux effets engendrés par la transition démographique. Selon les projections du Haut-Commissariat au Plan, la population en âge d'activité, celle dont l'âge se situe entre 15 et 59 ans, continuerait de s'accroître jusqu'en 2020. Alors qu'elle représentait 55.9% en 1994, elle est passée à 60.7% en 2004 et atteindrait son point culminant, à savoir 65% entre 2010 et 2020. Son impact sur le marché du travail sera donc important et ira en grandissant dans les années à venir. Les villes devraient, durant les 15 prochaines années créer annuellement plus de 250.000 emplois, au minimum, contre seulement 150.000 aujourd'hui.
Des villes faiblement inclusives et donc inadaptées
Le CESE évalue le déficit en matière de logements au niveau urbain à plus d'un million d'unités, soit le tiers du parc logement actuel. Ce déficit qui se manifeste sous forme de bidonvilles et d'habitat sous équipé ou insalubre s'explique par le déséquilibre permanent entre l'offre et la demande de logements abordables pour les ménages à faible revenu. D'où un déplacement de la demande insolvable vers les périphéries urbaines et une partie de l'espace rural. Ainsi, plus de 30% des constructions réalisées annuellement au niveau urbain se font sur des terrains agricoles périphériques en dehors de toute planification. Ce phénomène d'étalement urbain classique est aggravé à partir de ces dix dernières années par l'émergence de grands projets d'habitat social qui deviennent des foyers d'insécurité et de tensions sociales grandissants. Ces grands projets d'habitat, notamment à Casablanca (Errahma, Lahraouiyne etc..), en recevant, d'une façon massive, des ménages issus des bidonvilles de diverses communes du grand Casablanca créent une situation sociale et spatiale inédite : La reconstitution sur place par des ménages issus d'un même bidonville des communautés qui font face à d'autres ménages issus d'autres bidonvilles et ayant un comportement similaire. D'où des conflits et des heurts renforcés par le taux de chômage élevé des jeunes de ces quartiers. Selon le CESE, ce climat d'insécurité dans les périphéries de Casablanca présage des lendemains difficiles pour la capitale économique.
Des outils de planification faibles et loin de la performance
Le Maroc fêtera le centenaire de la mise en place d'une législation moderne d'urbanisme. Il est indéniable que cette législation a permis un aménagement urbain relativement acceptable. Néanmoins, cette législation d'urbanisme qui, malgré les améliorations qu'elle a connues, reste en retard par rapport à l'évolution de la ville et de la société marocaine en général. Pour le CESE, l'urbanisme reste encore très centralisé ce qui crée des tensions permanentes avec les acteurs locaux. Pour les communes, ce sont des documents «imposés», «inadaptés» qui limitent les champs d'action d'un conseil qui hérite un PA auquel il n'a pas contribué. Quant aux services extérieurs, ils ne se sentent même pas concernés par les dispositions de ces documents lors de l'élaboration de leurs programmes ou de leurs cartes (scolaires ou sanitaires par exemple). Face aux « rigidités» des documents d'urbanisme, renforcées par l'absence d'outils d'urbanisme opérationnel, les demandes de plus en plus pressantes et insatisfaites fusent. L'urbanisme se trouve en situation « d'exception permanente » surtout depuis la mise en place du système d'urbanisme dérogatoire au début des années 2000.
Ainsi, pour le CESE, la problématique de la planification urbaine se pose à deux niveaux : Le mode de conception des documents d'urbanisme et leur mise en œuvre ou leur opérationnalisation.
Voici les principaux reproches que fait le CESE aux instruments de la planification urbaine :
- Lenteur dans la réalisation et l'homologation des documents d'urbanisme, que ce soit les Schémas Directeurs ou les Plans d'Aménagement
- Inadéquation des dispositions des documents d'urbanisme avec les réalités spécifiques sur le terrain. Les documents d'urbanisme sont conçus de façon standardisée sans tenir compte des spécificités locales.
- Rigidité des documents par rapport à la dynamique de l'expansion urbaine. Leurs révisions ou actualisations obéissent aux mêmes règles de procédure qu'un nouveau document d'urbanisme.
- Un système de contrôle marqué par une pluralité des intervenants, une confusion dans la répartition des compétences, une absence de détermination des responsabilités. Le système actuel se réduit à la formule suivante : Tout le monde est compétent et personne n'est responsable.
Selon le rapport du CESE, Il ne suffit pas qu'un document d'urbanisme (Plan d'Aménagement) soit homologué et publié dans le Bulletin Officiel pour qu'il soit applicable sur le terrain, notamment pour les zones nouvelles ouvertes à l'urbanisation. Pour ces zones, particulièrement, leur urbanisation effective nécessite, au préalable, la réalisation des équipements hors site (branchement de la zone aux réseaux d'eau, d'électricité et d'assainissement, ainsi que l'ouverture des voies structurantes de circulation). Naturellement, ces équipements se font sur des zones de plusieurs dizaines d'hectares. Or, la réalisation de ces aménagements nécessite des investissements lourds dont la récupération des coûts s'échelonne dans le temps et impose le recours à un préfinancement. La maîtrise des opérations d'aménagement requiert le recours à une maîtrise d'ouvrage spécialisée capable de conduire le processus d'aménagement en mobilisant le préfinancement et le financement du hors site.
En dehors des opérations de lotissements de grande envergure réalisées par des opérateurs publics qui peuvent supporter le coût du financement du hors site, il n'y a aucun mode opératoire permettant à des maîtres d'ouvrage publics ou privés de mener des opérations d'aménagement sans supporter l'intégralité des coûts du hors site. Ce constat conduit à geler des emprises importantes à la périphérie des villes, livrées parfois à des zones d'habitat non réglementaires ou à des lotissements équipés, mais non reliés aux réseaux d'équipements.
On peut donc résumer ainsi, les conséquences de cette politique : Une offre effective de terrains sur le marché qui reste réduite, quel que soit le volume des superficies ouvertes à l'urbanisation. Pour le CESE, il existe un décalage important entre l'offre potentielle de terrains urbanisables figurant sur les PA et l'offre réelle sur le marché. La mobilisation du foncier en dehors des tissus urbains plus ou moins denses nécessite des investissements lourds que seuls les promoteurs de grande envergure peuvent supporter. Etant donné, également, que le « stockage» du foncier urbain dans les villes marocaines est gratuit, associé à une valorisation certaine, rien ne presse les propriétaires d'équiper leurs terrains pour les mettre sur le marché. Ainsi, on est face à des collectivités locales passives et déresponsabilisées qui se comportent comme n'importe quel acteur urbain vis-à-vis de la question des extensions urbaines . Pour sortir de cette impasse, le CESE recommande le recours à la planification urbaine stratégique qui est une nouvelle approche pour penser et planifier le développement urbain. Elle vise à conduire les villes vers un développement stratégique durable en mobilisant leur potentiel et ressources dans le cadre d'une vision concertée et ambitieuse. Le Maroc a expérimenté, ces dernières années cette approche, et le rapport CESE cite à titre d'exemple : l'expérimentation de l'approche stratégie de développement urbain dans le cadre des villes de Settat et El Jadida en 2008. Sur ce plan, le CESE recommande la généralisation de cette approche dans le cadre d'une politique de développement urbain intégré.
Une gestion des services publics urbains non efficiente
Selon le rapport du CESE, les services publics urbains, notamment dans les grandes villes, sont assurés dans un contexte souvent difficile et avec des moyens qui n'évoluent pas en fonction des besoins. Deux exemples sont révélateurs de ces difficultés : le transport urbain et le secteur de l'assainissement (solide et liquide). Pour le CESE, le transport urbain souffre de plusieurs maux, notamment le transport collectif qui se caractérise par son insuffisance et par son inadéquation avec la demande de déplacements des citadins. Cette situation a des conséquences sur l'accès des populations aux services et aux activités économiques qui se retrouve réduit. En tenant compte des «déséconomies» engendrées par le dysfonctionnement du secteur, en plus de la pollution et des autres nuisances, le Plan de Déplacements Urbains (PDU) de Casablanca estime le coût pour la collectivité pour le sous-investissement récurrent dans le secteur de déplacement urbain à 127 milliards de DH pour la période 2004-2019. Au niveau de la gestion des déchets solides,chaque année, plus de 95%, soit environ 8 millions de tonnes de déchets solides ne sont pas traités. De même, les services publics locaux occupent une place importante dans les compétences des Communes urbaines. Ils constituent l'instrument de satisfaction des besoins quotidiens des citoyens dans des secteurs vitaux tels que l'eau potable, l'assainissement, l'électricité, le transport urbain et l'évacuation des déchets solides. La charte communale a attribué à la Commune une compétence générale en matière de services de proximité. De ce fait, la responsabilité des collectivités locales est essentielle, dans la mesure où elles ont pour mission de créer, d'organiser et de gérer ces services.
De multiples données montrent que les défaillances au niveau de la gestion des services publics locaux a un impact sur les conditions de vie des ménages urbains et sur leur environnement. Le modèle de croissance urbain « Croitre en salissant et nettoyer après » est chèrement payé; l'impact de la pollution des eaux sur l'économie du pays est estimé actuellement à plus de 4,3 milliards de dirhams par an. Notre modèle doit affronter deux défis majeurs, celui de la faiblesse des compétences humaines en matière de gestion et celui lié à la bataille pour des villes durables. Selon le CESE, une gestion durable des SPL, qui reste pour le moment un souhait, va permettre aux villes marocaines, de rompre progressivement, avec le modèle actuel de métabolisme linéaire qui accentue la pression sur les ressources et réduit le coût de l'inaction qui est estimé en 2011 à 32.1 milliards de DH. Ce coût risque d'exploser à l'horizon 2025 si rien n'est fait.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.