Le dernier rapport de la Banque mondiale sur la région MENA souligne les faiblesses structurelles du secteur privé marocain, qui freinent sa contribution à la croissance. Si certains gains d'efficacité technique sont notables, la domination de l'informel et l'absence de dynamisme limitent son potentiel transformateur. Le secteur privé au Maroc incarne nombre des faiblesses structurelles qui affectent les économies de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA). Dans son Bulletin d'information économique publié en avril 2025, la Banque mondiale dresse un constat sans appel : le secteur privé marocain demeure peu compétitif, dominé par l'informalité et incapable de capter des gains de productivité suffisants pour stimuler durablement la croissance. Alors que les économies de la région peinent à sortir d'un cycle de croissance molle, l'institution de Bretton Woods insiste sur la nécessité de transformer le secteur privé en véritable moteur de développement. Le Maroc, en particulier, fait face à un double paradoxe. D'un côté, les entreprises les plus productives n'arrivent pas à se développer au point de gagner des parts de marché significatives. De l'autre, l'amélioration de l'efficacité technique — c'est-à-dire la capacité à mieux utiliser les facteurs de production — a néanmoins contribué positivement à la croissance de la productivité du travail. Une informalité écrasante et un manque d'ampleur Le rapport révèle que 83 % des entreprises marocaines opèrent dans l'informalité, un chiffre qui place le Royaume en tête des pays de la région MENA en la matière. Cette forte prédominance du secteur informel contribue à fragmenter le tissu économique national, à limiter l'accès au financement et à affaiblir les capacités d'investissement des entreprises. Ce phénomène, couplé à la rareté des données sur les structures informelles, complique la mise en œuvre de politiques ciblées et efficaces. En dépit de ces contraintes, les données longitudinales disponibles au Maroc permettent d'observer certaines dynamiques internes. Contrairement à la Tunisie, où les entreprises les plus productives accaparent davantage de parts de marché au détriment de l'efficacité technique, le cas marocain montre une situation inverse. Toutefois, cette dynamique demeure insuffisante pour enclencher un changement d'échelle capable de soutenir une croissance soutenue et inclusive. La Banque mondiale note également que la faiblesse du tissu productif marocain limite la capacité des entreprises à absorber les chocs économiques et climatiques. Dans un environnement global incertain, marqué par les conflits régionaux, les perturbations climatiques et les fluctuations des marchés internationaux, cette vulnérabilité constitue un risque structurel majeur. Une réforme structurelle incontournable Le rapport insiste sur l'importance de collecter davantage de données désagrégées au niveau des entreprises, notamment informelles, afin de mieux comprendre leurs pratiques et contraintes. Ce besoin est d'autant plus pressant que les politiques publiques pourraient, à l'avenir, cibler des profils d'entreprises très différents au sein même du secteur informel. En somme, la situation du Maroc met en lumière l'urgence de réformes profondes visant à stimuler l'innovation, renforcer les capacités de gestion et faciliter l'émergence d'un secteur privé plus inclusif. Pour la Banque mondiale, l'avenir économique du pays dépendra largement de sa capacité à libérer le potentiel inexploité de son tissu entrepreneurial.