Le deuxième opérateur mobile est en train de subir des pressions de toutes parts. D'abord, il y a cette histoire relative à la baisse de régime enregistrée au début du premier trimestre 2009. Il y a ensuite cette affaire de changement d'actionnariat qui crée du brouillard dans l'esprit des gens. Tant qu'elle n'est pas bouclée, les rumeurs les plus folles vont enfler. Entre temps, les deux autres opérateurs se maintiennent ou se renforcent. Méditel fait incontestablement l'actualité. L'intention de Portugal Telecom (pour l'instant, ce n'est pas encore officiel mais tout laisse penser que l'opérateur étranger passera à l'acte) de vendre ses quelque 32% du capital crée des agitations dans le microsome des affaires, mais aussi dans celui des médias. Peu d'informations fiables et officielles confirment ou infirment les rumeurs qui circulent. Beaucoup de possibilités sont envisageables. Le départ de Portugal Telecom laisse entrevoir trois options. Soit il vendra ses parts sans que les autres actionnaires n'utilisent leur droit de préemption, soit Telefonica et lui se retirent simultanément, soit tous les actionnaires actuels cèdent leurs participations. Selon une source digne de foi, cinq opérateurs arabes ont fait part de leur intérêt pour cette transaction. Il s'agit de l'opérateur historique qatari (Qtel), de Bahrein Telecommunication Co (Batelco), d'Orascom (Egypte), d'Emirates Telecommunications corporation (Etisalat), et de Saudi Telecommunication Compagny (STC). « Etisalat serait dans une très bonne posture. Elle aurait présenté une offre (qui ne l'engage encore en rien puisqu'elle n'est pas officielle) alléchante non pas pour reprendre les parts de Portugal Telecom seulement, mais la totalité de l'entreprise. L'offre dépasserait la valorisation de Meditel que le cabinet conseil a fixée », soutient la source. Morgan Stanley, qui a été chargé par Portugal Telecom de mener une due-diligence pour connaître les niveaux de valorisation, a établi une fourchette variant entre 1,2 et 1,6 milliard d'euros. El Mandjra refuse de commenter ces racontars. Il précise que les offres reçues ne peuvent qu'être des offres « non binding », c'est-à-dire des offres d'achat sous forme de lettre d'intention mentionnant seulement, entre autres, le prix de l'opération. «Cela ne les engage donc en rien ». Un professionnel avisé, lui, nous informe que certains de ces opérateurs ont maintenu leur position, d'autres ayant changé d'avis. Telefonica vient de rendre officielle son intention. L'opérateur serait prêt à étudier toute offre d'achat de ses actions. Il n'a ni émis sa volonté de jouir de son droit de préemption ni sa volonté de vendre ses parts. Le groupe FinanceCom aurait fait savoir que s'il devait utiliser ce droit, il l'exercerait. Le groupe Holdco (CDG, Akwa…) ne s'est pas prononcé. Orascom aurait exprimé dernièrement son désintéressement…faute de moyens. Batelco et STC ne se sont pas pour leur part exprimés non plus. Toutes les probabilités sont donc possibles. Si le prix proposé par le futur acquéreur est trop aguichant, tous les actionnaires pourraient, pourquoi pas, céder leurs parts. Ou bien quelques actionnaires seulement pourraient se retirer. D'autres pourraient monter encore plus dans le capital. Ou bien carrément, Portugal Telecom pourrait décider de ne pas vendre, qui sait ?! Les professionnels s'attendent à un dénouement de cette affaire dans les mois à venir. D'ici à la fin de l'été, cette « énigme » devrait être résolue. En attendant, le staff de Méditel ne sait plus à quel saint se vouer. El Mandjra convient que la vie de l'entreprise a été quelque peu chamboulée au départ. Il y a eu un début d'ébullition, quelques perturbations mais qui ne sont pas significatives. Le patron du deuxième opérateur ne s'en trouve pas non plus ébranlé, même si certains pronostiquent son départ après le changement d'actionnariat, s'il a lieu. Ses rumeurs ne le perturbent point et ne vont pas le conduire à arrêter ses chantiers. « Je ne m'inscris pas dans une vision court-termiste. Pourquoi voulez-vous impacter la valeur d'une entreprise en attendant de voir si des changements doivent s'opérer ou non? Un actionnaire va vouloir une valeur maximale de la structure. Et si nous arrêtons nos projets, nous condamnons la valeur à la baisse. C'est ce que nous ne voulons pas. Nous avons les moyens de notre stratégie», argumente El Mandjra. Voilà en ce qui concerne le changement des actionnaires.Qu'en est-il des performances du premier trimestre 2009 qui ont créé une polémique ? Le groupe a longuement expliqué les raisons de la baisse de 2% du chiffre d'affaires. L'activité roaming et appels vers l'international, qui représente 22% du business global de l'opérateur, a chuté de 9%. « Mais n'oubliez pas que la tendance du marché a été marquée par une baisse se situant entre 15% et 18% », avance El Mandjra. L'Ebitda baisse de 8% C'est sa manière à lui de dire que Méditel est finalement bien loti par rapport à la concurrence. « D'autres opérateurs dans le monde, qui accusent des baisses de 20%, 30%..., nous en voudraient presque pour les performances que nous avons réalisées », ajoute-t-il. Ceci étant dit, Méditel a aussi régressé sur le plan de la rentabilité opérationnelle, l'Ebitda, qui s'est déprécié de 8%. Il s'agit du profit avant déduction des charges financières, des impôts et taxes, des dotations aux amortissements et aux provisions (dépréciations...). Là encore, El Mandjra a une explication: « sur ce plan, nous avons préféré faire des investissements, rembourser notre dette (qui a baissé de 20%)… C'est ce qui explique la performance. La santé financière de Méditel n'a jamais été aussi bonne. L'opérateur est solide financièrement. Il ne faut pas minimiser cet aspect de prospérité d'une entreprise». Face à tous ces défis, Méditel essaie de faire de son mieux. Des observateurs le disent « perdant » par rapport à un Maroc Telecom qui continue de cartonner et un Wana qui grignote de plus en plus de parts de marché (cela devra s'accentuer avec la licence GSM). El Mandjra voit les choses autrement. Pour lui, l'opérateur historique doit défendre certaines de ses positions qui sont attaquées. Wana doit quant à lui construire quelque chose qui n'existe pas aujourd'hui. Il doit encore chercher des clients à introduire dans son parc. Pour El Mandjra, « notre entreprise a la force, la taille et la stabilité pour attaquer et assez de souplesse et de flexibilité pour être très agressive. J'appréhende l'avenir avec beaucoup de sérénité et d'enthousiasme », conclut le patron de Méditel. Le deuxième semestre devrait mieux évoluer. Qui vivra verra ! Distribution : la levée de l'exclusivité n'est pas à l'ordre du jour Quelques grands distributeurs de Méditel (dont First Telecom, Ave Phone et Mobile Phone) préparent leur regroupement. Ce projet, managé par un fonds d'investissement, dont Telefonica est l'un des actionnaires, devrait aboutir en début d'année prochaine, et plus précisément vers le mois de mars ; le contrat des distributeurs vient à terme au mois de février 2010. Que pense alors l'opérateur de ce mouvement? Pour El Mandjra, chaque opérateur à ses spécificités. «Nous les avons aidés sur beaucoup de choses, à des niveaux stratégiques, nous les motivons… Nous sommes au courant des projets des grands distributeurs mais aussi des petits qui se penchent. Pour nous, qu'ils soient petits ou grands, regroupés ou non, l'essentiel est que le réseau soit sain et solide». Que pense-t-il aussi de la possibilité de lever la clause d'exclusivité de distribuer des produits Méditel sur lesquels les distributeurs se sont engagés ? Cette mesure, selon un expert en télécommunications, ne pourrait qu'aboutir à terme. Pour El Mandjra, le sujet n'est pour l'instant pas à l'ordre du jour. Le fixe : oui, mais pour les professionnels Selon le directeur général de Méditel, le fixe résidentiel est un segment du marché qui est en décroissance. « Il n'est pas judicieux pour nous d'investir ce segment ». Par contre, au niveau du segment des professionnels, consacré aux entreprises, Méditel a de la marge. El Mandjra s'enorgueillit de la croissance de 28% enregistrée au cours du premier trimestre 2009.