Au cours de l'enquête, nous avons procédé par étape, dans un échange régulier avec les banques, afin d'éclaircir leurs tarifs officiels, auparavant collectés en agences, au tableau d'affichage. Il s'agissait de ne pénaliser aucune institution et de nous assurer de la justesse des coûts attribués à chaque établissement, comme de lui permettre d'apporter les rectifications nécessaires. Une procédure de longue haleine, entamée le 3 mars par un courrier officiel, remis en mains propres, avec justificatif de réception, vers les destinataires idoines, le cas présent, les Directeurs de Communication et/ou Marketing, qui se sont chargés de piloter dans leur institution pour obtenir les données. Après réception du courrier, des relances par téléphone ont été effectuées une semaine après. A l'issue de celle-ci , 4 banques ont réagi, nous faisant parvenir leur réponse à quelques heures de différence : BMCI – Société Générale, puis Crédit Agricole et Crédit du Maroc. Deuxième semaine, seconde phase des relances par téléphone. Relances quasi quotidiennes. Aucune réaction. Troisième semaine, même démarche. Obtention de la réponse du CIH. Quatrième semaine, toujours même approche, avec réception du document de la Banque Populaire. Deux grandes institutions, grandes absentes de cette enquête, Attijariwafa bank et BMCE Bank. Malgré nos multiples contacts, elles n'ont pas donné suite à nos sollicitations. Cette démarche aura permis de réellement recadrer les coûts affichés et relevés en agences, lesquels n'avaient pas été actualisés, une nouvelle tarification étant entrée en vigueur à l'époque de notre enquête. Et c'est cette récente tarification, officielle, qui est ici déclinée. La première constatation est au nombre de prestations gratuites rapportées à l'ensemble des services et produits explorés. Sur environ une soixantaine, près d'une vingtaine est gratuite. Un peu moins du tiers. Le gros est payant, sauf quelques exceptions, au cas par cas, qui allient gratuité et facturation. Ce qui est gratuit figure au rang des grands classiques, du basique. Néanmoins quelques classiques, gratuits il y a quelques années, sont aujourd'hui « taxés ». Pour exemple, la remise de chèque sur bordereau, les virements… Seconde constatation, les différences de coût d'un établissement à l'autre, même si un alignement est perçu sur certains registres. Le sentiment est à une tarification qui n'obéit à aucune logique. Un même service peut passer de 1 à 3 sans que l'on saisisse la raison. Les moins chères sont les institutions publiques: BP, Crédit Agricole et CIH. Est-ce la rançon de leur retrait sur le service en agence, ou encore est-ce la notion « de service public » qui prévaut ? Quant aux banques privées, elles se valent. Lorsque l'une est chère ici, l'autre l'est là. Elles sont l'objet d'une concurrence qui ne les autorise pas à « un grand écart » mais à une gymnastique mesurée, surveillée, non préjudiciable à leur santé financière d'abord, mais aussi à leur conquête de marchés autres. Ceci étant, cette transparence des prix ne renvoie pas une harmonisation des tarifs comme on pourrait l'imaginer. Elle semble faire office de territoire à frontières établies, mais au-delà desquelles on opère « des dépassements » totalement autorisés. Les intervalles sont usage, pour « jouer », tout en ne constituant pas forcément la règle. On peut agir en dessous comme en dessus. Les banques ont aujourd'hui bâti leur business sur la banque de détail (retail banking), celle des particuliers, autant ceux qui sont de plus en plus dans le besoin de financement que ceux à l'aise, qui effectuent nombre d'opérations «juteuses» pour le banquier. Un banquier dont l'inventivité ne cesse pas, et qui ne cesse d'encourager à la consommation de ses produits, que bien des clients « prennent » parfois sans que cela soit même utile. Et c'est là une autre observation : combien de produits et services sont ici répertoriés dont on sait l'inanité, comme probablement il est des services qui manquent et qui ne sont pas développés. Le cas des cartes bancaires et des packages illustrent parfaitement cette situation. On y « met tout et rien ». Combien de ces produits sont comme les ordinateurs et les téléphones portables, des multitudes fonctionnalités dont on utilise que le quart ou le tiers. On en oublie le prix, car le coût réel du compte s'en trouve alourdi sans que l'on consomme véritablement toute l'offre, comme les assurances des cartes, qui souvent ne sont nullement mises à contribution. On poserait volontiers la question de la carte sur mesure. Et si on allait dans cette voie, laisser au client le choix de «sa carte» selon les options qu'il utiliserait réellement ? La course à «la carte, au package» est lancée, intense, très rapide, indépendamment des vrais besoins du client, de chaque client. Sur la base de la grille qui suit, la BMCI vient en tête au niveau des cartes, les autres suivent, certaines de près, notamment Société Générale et Crédit du Maroc, d'autres s'efforcent de les rejoindre. Les banques se rattrapent-elles sur ce registre, pour reprendre d'une main ce qu'elles ont donné de l'autre ? Elles brillent par leur imagination, tout y passe. Jeunes, femmes, clients haut de gamme, clients aux besoins en argent fréquent…le contenu des cartes comme nous l'avons décortiqué, va du simple retrait aux prestations les plus évoluées. La grille des tarifs bancaires officiels dit tout, révélant les détails d'une « jungle » des prix, où il est peut-être simple de voir les écarts sur les mêmes services, mais bien plus difficile de comprendre pourquoi. Kamal JABRY, Directeur Marketing – Crédit du Maroc La variation des tarifs ne peut être imputable qu'au coût du service. Certaines banques peuvent minimiser leurs coûts grâce à l'automatisation avancée de leurs process. Mais tout cela reste encadré par le taux minimal imposé par Bank Al Maghrib qui limite les dérives. Ainsi la tarification est standardisée, ce qui donc la différencie c'est la qualité. Toutefois il y a des éléments qui relèvent de la gestion commerciale. Le but du « jeu » est de répondre aux besoins du client. Il s'agit quand même de respecter une certaine diligence pour entretenir la relation avec le client et le fidéliser. Cela peut prendre la forme de concessions ou de remises. Il faut aussi suivre son client, anticiper ses besoins, lui faciliter la banque et tout traiter de manière rapide. On peut faire des gentillesses mais pas partout et pas tout le temps. Isabelle COMBAUD haouch, Directrice Marketing et Communication- Société Générale Je ne pense pas qu'il y ait des différences au niveau des tarifs appliqués car les frais sont automatiques. La seule différenciation qui peut se faire à ce niveau rentre dans le cadre de conventions ou vers des cibles dans le cadre d'opérations spécifiques comme les jeunes… C'est finalement la qualité du service qui prime, car pour les taux, les tarifs, le gendarme est là (BAM), avec le minima qui est appliqué. Karima MORSY, Directrice Communication BMCI Il n'existe pas de différences entre les tarifs appliqués et les tarifs affichés, ni entre clients aux comptes fournis et ceux à revenus modestes. Il y a une règle, celle des tarifs officiels. Par contre l'offre de produis et services en place est adaptée à chaque segment de clientèle, ce qui présente des différences tout à fait normales. Bien peu de produits subissent une légère augmentation, comme à côté d'autres produits connaissent des diminutions de coût.