Votre banque vous invite à un événement culturel, c'est un geste anodin. Mais y trouver sur place la maquette d'un complexe de luxe, c'est une approche qu'a choisie Sotheby's pour toucher son cœur de cible. Comment dénicher ceux qui présentent assez de garanties de solvabilité pour s'adonner au confort du luxe ? Certains semblent avoir trouvé des formules qui peuvent prêter à suspicion, mais dont l'aspect créatif reste incontestable. Tout simplement en «sensibilisant» les organismes de crédit et de financement à leur cause. «Nous avons une certaine manière de collaborer avec les banques. Notre méthode de commercialisation ne repose pas sur la vente directe et agressive», souligne Cédric Bredoux, directeur commercial chez Sotheby's Maroc, opérant actuellement au Maroc dans la promotion immobilière de luxe depuis près de deux années avec deux agences, l'une à Casablanca et l'autre à Tanger (voir encadré). L'enseigne pratique un mode de démarchage des plus originaux. Elle se joint à des événements destinés à l'art et à la grande musique et c'est en toute originalité qu'elle pénètre la niche tant convoitée. Marketing bancaire Comme les banques sont en contact direct avec des teneurs de comptes nantis, ces derniers reçoivent de la part de leurs banquiers des invitations pour une manifestation, durant laquelle ils découvrent avec «surprise» une maquette d'El Houara par exemple, projet dont la commercialisation est exclusivement confiée à Sotheby's Maroc. Il consiste en un complexe touristique de luxe qui s'étale sur 234 hectares pour un investissement de 600 millions de dollars. Il comprend trois hôtels cinq étoiles, un parcours de golf de 18 trous, des commerces et des installations de loisirs, sans oublier les 1.100 appartements et villas. L'approche commerciale ne se limite pas à ce genre d'événement. Les chargés de clientèle possèdent une documentation complète sur le projet et les proposent aux intéressés. Il semble que les préposés à la banque ne perçoivent aucune forme de rémunération ou commission. «Nous ne savions pas qu'autant de Marocains pouvaient investir dans nos projets», déclare Cédric Bedroux. Et ces Marocains sont ceux qui ont la capacité financière et le désir de onsommer «luxe». «La clientèle de luxe marocaine représente 40% de nos ventes. Nombreuses sont les personnes qui achètent de petites propriétés comprenant entre une et quatre pièces», estime M. Bredoux. Et d'ajouter:«même si les prix sont à la hausse, nous restons raisonnables. Il y a des Marocains prêts à payer une villa à 30 millions de DH». Dans quelques semaines sera entamée la troisième phase de vente, qui concerne des appartements et des villas sur la plage. Certaines unités allient vue sur mer et vue sur le parcours de golf. Quelle est la morphologie de ces acquéreurs ? «Deux principales sortes d'acquéreurs, il y a ceux qui achètent avec l'objectif de s'y installer et d'autres qui y voient un investissement», explique-t-il. Certains propriétaires n'occupent les lieux que quelques semaines dans l'année. Et ceux désirant résider pour une période donnée dans d'autres pays peuvent piocher dans les 7.000 références que contient le catalogue de l'enseigne à l'international. Ils profitent ainsi d'un système d'échange. L'autre originalité de Sotheby's, c'est qu'elle se présente comme une agence de coût, dans le sens où les factures ne sont pas émises du Maroc. Se substituerait-elle aux banques ? «Quand l'acquéreur effectue le paiement, il le fait sur le compte du promoteur. Cet argent y est bloqué. C'est une garantie faite au client», explique-t-il. Comment cela se passe-t-il avec les banques nationales ? «Avec les établissements marocains, la méthode de travail est différente. Mais nous nous adaptons. Nous avons déposé des propositions auprès des banques, afin que ces dernières financent une partie du projet». D'autres promoteurs comme Emaar se sont lancés dans l'industrie immobilière de luxe, avec les projets Tinja à Tanger ou encore Saphira à Rabat. «C'est une concurrence directe. La clientèle touristique haut de gamme aura une offre diversifiée et par conséquent, le nord du pays disposera de produits de grande qualité», commente-t-il. Les Européens pourront satisfaire leur besoin «d'exotisme et de couleurs». Qui est Sotheby's Maroc ? À l'origine, une enseigne new-yorkaise qui opère sur le marché de l'art, puis, à travers une clientèle de haut niveau, qui devient une référence dans l'immobilier de luxe. Au Maroc, l'enseigne résulte d'une joint-venture entre Qatar Diar et le consultant en immobilier de luxe North Course. Le principal projet commercialisé est aujourd'hui El Houara à Tanger. D'autres sont annoncés dans les prochains jours. «Notre contrat nous permet de recevoir des propositions d'autres promoteurs», confie M. Bredoux. Ces derniers doivent réserver l'exclusivité de la commercialisation et répondre à certains critères : «le projet doit être bien étudié, juridiquement ficelé et l'achat du terrain doit être légal». L'interlocuteur au Maroc est aujourd'hui Cédric Bredoux, à qui la trentaine d'années d'expérience passées au sein de l'antenne espagnole de Sotheby's International a donné une certaine connaissance des attentes de la clientèle attirée par le marché marocain.