En trois semaines, l'action CGI a cumulé la performance de 130% qu'Addoha avait mis trois mois à gagner. Si la société d'Anas Sefroui avait profité de l'effet d'annonce de plusieurs projets ou partenariats pour enregistrer une forte croissance, pour le moment, seule la spéculation justifie cette folle progression. L'action CGI (Compagnie Générale Immobilière), filiale du groupe CDG (Caisse de Dépôt et de Gestion), a réalisé une excellente introduction. Vingt jours calendaires après son introduction, et seulement 13 séances de cotation, elle cumule une performance de 128% entre le vendredi 10 et le mercredi 29 août 2007. La place de Casablanca n'en attendait pas tant, mais le titre continue de surprendre, puisqu'à l'ouverture du jeudi, elle a de nouveau été réservée à la hausse, ce qui porte son cours théorique à 2.298 DH, contre 952 DH au moment de son introduction. Encore une fois, ces chiffres qui donnent le tournis, forcent à oser la comparaison avec l'action d'Addoha, la seule à avoir jamais multiplié par cinq son cours quelques mois seulement après sa première cotation au niveau de la bourse des valeurs. Pourtant, contrairement à ce que l'on pourrait penser, la CGI est en train de mieux faire qu'Addoha. En effet, l'action du groupe d'Anas Sefroui a été introduite le 6 juillet 2006 au cours de 585 DH, il lui a fallu beaucoup plus de temps pour réaliser une performance similaire de 128%, qui correspond au cours de 1.332 DH. Car ce n'est que le 26 octobre 2006, c'est-à-dire trois mois et demi après son introduction qu'elle a cumulé une telle performance. La bulle est enclenchée Cela veut-il dire que la performance de la CGI pourrait dépasser celle d'Addoha. Jusqu'ici, rien dans les faits ne vient contredire une telle éventualité. La bulle est bien enclenchée: la croissance déjà enregistrée attire une demande de plus en plus forte, laquelle entretient inlassablement cette même croissance. Toutefois, la différence avec Addoha ne se limite pas seulement à la forte croissance. En effet, Addoha avait bénéficié de l'annonce de plusieurs projets ou partenariats qui avaient permis à son cours de connaître d'importantes hausses notamment à partir du mois d'octobre. D'abord, il y a eu l'annonce des 11 milliards de DH d'investissement dans la région de Rabat, à partir d'un mémorandum signé entre le groupe et l'Etat Marocain. Dans ce cadre trois projets, tous aussi grands les uns que les autres, ont été approuvés. Le premier portait sur un programme immobilier et touristique s'étendant sur 53 ha et nécessitant un investissement de 4,65 milliards de DH. Ce terrain est celui du zoo de Rabat pour lequel le groupe Addoha a dû débourser quelque 420 millions de DH pour son acquisition. Cette somme a été affectée à la réalisation d'un parc zoologique et de loisirs devant prendre la place de celui cédé. Et c'est le groupe Addoha lui-même qui était chargé de réaliser ce deuxième projet. Enfin, le troisième projet alors annoncé s'étend sur une superficie de 450 ha destinés à la réalisation d'un véritable pôle touristique pour la capitale administrative. Le projet comprend entre autres une zone résidentielle, des hôtels, un parcours de golf de 18 trous, des équipements de loisirs et une zone commerciale. Cela nécessiterait un investissement de 6 milliards de DH. Les investisseurs ont du coup vu à travers ces projets d'envergure, la concrétisation du projet d'entreprise d'Addoha. Le groupe était en train de se diversifier vers le haut de gamme, appelé à représenter 48% de son activité à l'horizon 2010. En tout cas, ce premier coup de maître confortera la place dans son choix, l'action atteignant le cours de 2.500 DH. Ensuite est venu le mémorandum signé entre le groupe Addoha et le holding émirati Al Qudra. Ce dernier prévoit la mise en place par les deux groupes d'un partenariat stratégique portant sur la réalisation de projets d'investissements dans le secteur de l'immobilier mais aussi dans le tourisme, au Maroc et dans les autres pays du Maghreb. Le protocole ne concernait pas les projets immobiliers du groupe Addoha déjà lancés au Maroc comme le grand projet de Rabat. D'ailleurs, au cours de ce mois d'août 2007, la Société Al Qudra-Addoha vient de voir le jour, détenue à parts égales par les deux groupes. Une logique similaire ? De telles annonces ont donc permis au titre Addoha de poursuivre sa croissance pour atteindre le cours de 3.500 DH avant de se replier et de consolider autour de 2.750 DH pendant plusieurs mois. A l'époque déjà, cette forte croissance avait été décriée par plusieurs analystes qui estimaient qu'elle n'était pas fondée. Mais la publication d'un nouveau business-plan qui revoyait fortement à la hausse les prévisions de résultats allait calmer les critiques. Sommes-nous dans une logique similaire pour la CGI qui justifie cette forte croissance ? Rien n'est moins sûr. En effet, moins de trois semaines seulement après son introduction, aucune information nouvelle n'est venue changer les fondamentaux de l'entreprise qui avaient servi de base à son évaluation lors de son introduction. En estimant que cette estimation corresponde à la valeur réelle du titre, ce dernier n'aurait jamais connu une croissance supérieure à 20% juste après la première cotation. Aujourd'hui, on est visiblement dans une logique de spéculation qui ne risque pas de s'arrêter de sitôt. La CGI semble bien avoir quelques séances de hausse devant elle, puisque les investisseurs continuent de se ruer sur l'action. Force est de constater que l'engouement pour l'action CGI s'explique en bonne partie par la folle croissance qu'avait enregistrée le titre Addoha. Ce qui ressemble bien à un non-sens dans la mesure où la CGI a été déjà évaluée suivant la méthode des comparables boursiers par rapport à Addoha et aux autres titres du secteur du bâtiment et des matériaux de construction.