Alors que l'encre des premiers contrats de crédits Damane Oxygène n'est pas encore sèche que des voix -préférant garder l'anonymat- s'élèvent déjà au sein du secteur bancaire pour attirer l'attention quant à la bombe à retardement qu'incarnent ces prêts garantis par l'Etat. En effet, cette pierre angulaire du dispositif anti-Covid19 échafaudé par le Comité de Veille Economique pour soutenir les entreprises affaiblies (voire mises en danger) par la crise actuelle vient, certes, limiter l'onde de choc tant sur l'offre (en maintenant les chances de survie de l'appareil productif privé) que la demande (en évitant des licenciements massifs) mais elle alourdit encore davantage le fardeau de la dette portée par les entreprises qui en ont bénéficié. Car ce prêt providentiel garanti par l'Etat à hauteur de 95% doit tout de même être remboursé un jour ! Et c'est là où le bât blesse puisque les presque 4.000 entreprises qui en ont déjà bénéficié (pour un total de près de 7,5 milliards de DH) sont déjà, pour leur plupart, assez endettées. Il y a qu'à lire les derniers rapports de stabilité financière de Bank Al-Maghrib pour s'en rendre compte sachant que le crédit au secteur privé représente déjà 85% du PIB (plus de 120% si on y rajoute les dettes commerciales inter-entreprises) et que la composante la moins capitalisée de ces acteurs privés n'est autre que la TPME qui représente l'écrasante majorité des bénéficiaires à ce jour de Damane Oxygène. Lire aussi | Coronavirus : le taux appliqué à Damane Oxygène est de 4% Qu'adviendra-t-il donc dans quelques mois ? Le dispositif de sauvetage en question aura créé deux zombies : un Etat lourdement endetté et donc à la marge de manœuvre des plus limitées et un tissu de PMEs étranglées par l'endettement et subissant de surcroit une dégradation imparable de leurs marges normatives (lente remontée de la pente et risque de baisse de la consommation obligent). Ce qui promet un épisode post-Covid19 potentiellement marqué au sceau des restructurations douloureuses. Au demeurant, s'il n'est pas suivi d'autres mesures complémentaires pour permettre aux entreprises de sortir définitivement de la crise, le dispositif de Damane Oxygène risque d'avoir les mêmes effets que le Supplice du Pal (supportable au début mais extrêmement douloureux à la fin !). L'Etat doit impérativement trouver des solutions efficientes pour le sujet des fonds propres et quasi-fonds propres dont manqueront cruellement les entreprises dans la phase névralgique de relance économique (car il y aura pas de restructuration réussie sans recapitalisations significatives) et peut être aussi en finir une fois pour toute avec le fléau des délais de paiement horriblement longs, autre source d'étranglement des trésoreries des entreprises.