Les équilibres énergétiques se recomposent sous l'effet des tensions géopolitiques, des impératifs climatiques et des mutations industrielles. Le Maroc participe aux efforts pour refaçonner les visions actuelles. Leïla Benali, ministre marocaine de la transition énergétique et du développement durable, a plaidé, lundi 10 mars, pour une refonte des cadres de coopération liés aux ressources naturelles. Invitée de la conférence Ceraweek à Houston (Texas), elle a défendu une approche fondée sur la complémentarité des richesses du sol, la gestion efficiente des infrastructures existantes et une transition énergétique qui ne saurait s'affranchir des réalités économiques et technologiques. Prenant la parole aux côtés de Dan Jørgensen, commissaire européen à l'énergie et au logement, de Fatih Birol, directeur exécutif de l'Agence internationale de l'énergie et de Karim Badawy, ministre égyptien du pétrole et des ressources minérales, elle a mis en garde contre les écueils d'une vision trop segmentée de la sécurité énergétique. «La transition ne peut être univoque ni dogmatique. Elle doit intégrer la diversité des trajectoires nationales, la résilience des systèmes d'approvisionnement et la nécessité d'investissements massifs, notamment dans le gaz naturel, qui demeure un levier essentiel», a-t-elle déclaré. Leïla Benali a souligné le rôle central du Maroc en tant que carrefour énergétique entre l'Afrique et l'Europe, mettant en avant les avancées réalisées en matière d'énergies renouvelables mais aussi les défis d'une intégration régionale encore inachevée. Elle a insisté sur la nécessité d'une meilleure interconnexion des réseaux électriques et gaziers, citant les projets de corridors énergétiques qui doivent permettre de soutenir les échanges et de sécuriser les approvisionnements en période de volatilité. Elle a également mis en exergue l'importance de mécanismes de financement plus adaptés aux spécificités des pays émergents, remettant en cause les asymétries dans l'accès aux capitaux pour les projets énergétiques durables. «La transition énergétique ne saurait être entravée par des contraintes de financement qui privilégient les économies les plus avancées. L'enjeu est de construire un modèle où la rentabilité des investissements s'aligne avec les objectifs de durabilité et d'inclusion», a-t-elle affirmé. Abordant la question des hydrocarbures, la ministre a défendu une approche pragmatique, surtout dans le cadre africain, insistant sur le rôle du gaz naturel comme énergie de transition. Elle a rappelé que les efforts de décarbonation ne sauraient s'accompagner d'un désinvestissement prématuré dans les infrastructures gazières, sous peine d'aggraver la volatilité des marchés et d'accroître les risques pour les pays les plus vulnérables. Face aux mutations en cours, Leïla Benali a appelé à un dialogue renforcé entre pays producteurs et consommateurs afin de structurer des politiques énergétiques plus résilientes et mieux coordonnées. «La sécurité énergétique ne peut plus être pensée en vase clos. Elle suppose des choix collectifs, une coopération accrue et une vision de long terme qui dépasse les cycles de crise», a-t-elle conclu.