Le Maroc redouble d'efforts pour réaliser sept réformes stratégiques d'ici février 2025, condition sine qua non pour bénéficier de la troisième et dernière tranche du prêt octroyé par le Fonds monétaire international (FMI), qui s'élève au total à 1,3 milliard de dollars, rapporte le site spécialisé Asharq qui cite un rapport officiel. Cet accord, conclu en mars 2023, s'inscrit dans le cadre de l'instrument de financement flexible pour renforcer la résilience économique et environnementale du pays. La troisième évaluation du programme est prévue pour mi-février, avec une décision finale attendue en mars 2025, concernant le versement de 437 millions de dollars. Les deux premières tranches, représentant respectivement 426 et 437 millions de dollars, ont été débloquées en 2024 après des évaluations jugées globalement satisfaisantes par le FMI. Des réformes énergétiques et environnementales exigeantes Parmi les priorités recommandées au Maroc figure une refonte complète du marché de l'électricité. Les autorités marocaines sont appelées à établir et à publier des tarifs d'accès au réseau de distribution à moyenne tension pour les producteurs d'énergie renouvelable. Ces barèmes doivent refléter précisément les coûts d'entretien et de modernisation des infrastructures de transport, conformément aux recommandations techniques du FMI basées sur des études de benchmarking effectuées dans des pays comparables. De plus, l'Office national de l'électricité et de l'eau potable (ONEE) devra désormais dissocier ses comptes entre les activités de production et de transport, conformément au modèle dit unbundling pratiqué dans l'Union européenne. Cette mesure concerne la transparence financière et la saine concurrence en transférant la production électrique au secteur privé. L'objectif sous-jacent est d'accroître la part des énergies renouvelables dans le mix électrique national, actuellement plafonnée à 20 %, contre un objectif de 52 % d'ici 2030, fixé par la stratégie énergétique nationale. En parallèle, une réforme des politiques de gestion des ressources en eau s'impose, alors que le pays subit un stress hydrique aigu. Les nappes phréatiques marocaines, notamment celles du Souss-Massa et du Haouz, enregistrent une baisse annuelle moyenne de leur niveau de 1 à 2 mètres, selon des relevés hydrogéologiques de 2023. Pour y remédier, le gouvernement prévoit d'introduire une tarification progressive de l'eau en fonction des volumes consommés et d'interdire l'exploitation illégale des puits. Taxe carbone et fiscalité environnementale : un chantier complexe Le FMI presse le Maroc de renforcer sa fiscalité climatique, notamment en augmentant la TVA sur les combustibles fossiles, une mesure que le gouvernement hésite à appliquer en raison de son impact potentiel sur le pouvoir d'achat des ménages. En réponse, Rabat propose d'autres ajustements fiscaux ciblant principalement le charbon et le fioul lourd, qui représentent encore 39 % du mix énergétique national. Ces combustibles bénéficient actuellement d'exemptions fiscales, jugées incompatibles avec les engagements climatiques internationaux du Maroc. Le gouvernement envisage également d'élargir la base fiscale à des produits comme le bitume, utilisé dans les infrastructures routières, et les huiles lubrifiantes, tout en planifiant l'instauration d'une taxe carbone dès 2026. Cette taxe reposera sur une méthodologie standardisée de calcul du contenu carbone des produits, développée en collaboration avec l'Institut marocain de normalisation (Imanor). Les agents des douanes recevront une formation technique pour garantir la conformité des importations avec ce dispositif, inspiré des mécanismes d'ajustement carbone de l'Union européenne. Une dépendance structurelle au charbon Toutefois, les experts du FMI estiment que ces réformes auront un effet limité à court terme sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Le mix électrique marocain reste fortement dépendant du charbon, dont la part atteint 40 %, avec des centrales thermiques affichant une intensité carbone moyenne de 0,9 kg de CO2/kWh produit, selon les données de 2024. Près de 80 % de l'électricité issue du charbon provient de producteurs indépendants opérant sous contrat à long terme avec l'ONEE. Ces accords, souvent établis pour des durées dépassant 20 ans, posent un défi structurel majeur pour accélérer la transition énergétique. Leur échéance n'interviendra pas avant 2040 pour la plupart des installations, limitant ainsi les marges de manœuvre du gouvernement dans ce secteur.